L’actuelle secrétaire nationale des Verts en France souligne que la grande majorité des Français, soit « neuf sur dix », sont contre cette réforme, et il en est de même pour « l’ensemble des organisations syndicales françaises ».
« La paix ne sera pas possible sans le retrait de la réforme des retraites. Ce n’est pas une menace que je formule, ce sont les faits. Neuf personnes sur dix en France y sont opposées, » déclare Marine Tondelier, secrétaire nationale d’EELV, le lundi 3 avril sur 42mag.fr. Elle sera reçue avec le premier secrétaire du PS, Olivier Faure, par Elisabeth Borne à Matignon mardi. Ils ont demandé à ce que cette réunion porte sur « la crise que traverse le pays ». Tondelier et Faure seront reçus en tant que chefs de parti, les chefs des groupes parlementaires ayant décliné l’invitation initiale. Marine Tondelier dénonce également la stratégie du maintien de l’ordre lors des manifestations. « Il finira par y avoir un mort, et il y a de fortes chances qu’il soit écologiste. Je pense qu’il faut se réveiller avant que cela n’arrive. »
franceinfo : Que direz-vous demain mardi à Elisabeth Borne lorsque vous serez reçue avec Olivier Faure ? Exigez-vous toujours le retrait de la réforme des retraites ?
Marine Tondelier : Il n’y aura pas de paix sans retrait, et ce n’est pas une menace, ce sont les faits. Neuf Français sur dix y sont opposés. De nombreux partis politiques s’y opposent aussi. Tous les syndicats du pays sont contre. À un moment donné, le gouvernement est dans une impasse et ils peuvent chercher tant qu’ils veulent à tourner la page, à passer à autre chose, nous ne passerons pas à autre chose. La France n’y est pas prête, les syndicats n’y sont pas prêts, Europe-Ecologie les Verts encore moins. Je pense qu’il serait honorable pour Elisabeth Borne d’agir avant la décision du Conseil constitutionnel [le 14 avril]. Si elle ne le fait pas, il y aura un référendum. Le temps de recueillir les 4 millions de signatures nécessaires, cela prendra des mois. Je ne vois pas comment ce gouvernement tiendra des mois comme si de rien n’était en essayant tranquillement de passer à la suite.
franceinfo : Concernant le maintien de l’ordre et la violence que vous évoquez, que demandez-vous ? Des excuses de la part du gouvernement ?
Je voudrais tout d’abord de la considération. J’ai toujours condamné les violences dans les manifestations, et cela fait quarante ans que les Verts le font. En revanche, j’ai très peu entendu le gouvernement se préoccuper des deux personnes qui sont entre la vie et la mort après la manifestation de Sainte-Soline et s’excuser des dérapages de certains policiers. Il y a un problème de maintien de l’ordre. Il y a eu huit manifestations qui se sont déroulées sans problème, puis tout à coup, tout bascule, car le 49.3 a été mis en place et le président de la République, dans un exercice raté, a voulu faire un entretien plein de cynisme et de mépris, ce qui a embrasé le pays. Il y a eu beaucoup de répression. Beaucoup de gens ont été victimes d’arrestations arbitraires et d’agressions sexuelles de la part de policiers qui ne sont pas représentatifs de toute la police, mais il faut en parler.
franceinfo : Pour ce qui est de Sainte-Soline, que pensez-vous du déploiement des forces de l’ordre ?
Cinq millions d’euros ont été dépensés pour protéger ce trou à Sainte-Soline, alors que des écologistes sont menacés dans tout le pays. Morgan Large, journaliste spécialisée dans l’agroalimentaire, a été victime d’une tentative de meurtre. Sa voiture a été sabotée deux fois en deux ans. Paul François, qui avait gagné son procès contre Monsanto, a été victime d’une agression extrêmement violente. Et eux, on ne les protège pas. C’est un vrai problème dont je souhaite discuter avec Elisabeth Borne, car cela finira mal. Un mort pourrait survenir, et il y a de fortes chances que ce soit un écologiste. Je pense qu’il faut se réveiller avant que cela n’arrive.
franceinfo : Diriez-vous qu’avec cette réforme, la démocratie est en danger ?
Je suis encore très choquée par la une du Journal du Dimanche de ce week-end, avec un ministre de l’Intérieur qui menace tout le monde et parle de terrorisme intellectuel. Mais où sommes-nous ? C’est la France en 2023. Je n’arrive toujours pas à y croire. Ce qui se passe est extrêmement grave. Il a expliqué que toutes les forces de l’ordre envoyées à Sainte-Soline devaient empêcher l’installation d’une ZAD, mais cette option n’a jamais été évoquée, ni par les organisateurs, ni par les manifestants. Une semaine après, il continue de multiplier les mensonges et d’inventer des risques inexistants pour justifier une doctrine de maintien de l’ordre mise en place ce jour-là. Ce n’est pas acceptable et cela a été condamné par tout le monde. Lorsque l’outrance vient d’un ministre de l’Intérieur, cela pose un problème pour l’état de droit. Je pense qu’Elisabeth Borne ne pourra pas rester silencieuse plus longtemps sur ce sujet, car ce qui s’est passé est beaucoup trop grave.