Tandis que l’on prévoit la réponse des experts pour ce vendredi, il semble que le schéma le plus plausible soit une désapprobation partielle, en annulant quelques dispositions, telles que l’indice pour les seniors. Les dispositifs mis de côté pourraient être réutilisés dans une vaste législation sur l’emploi.
Qu’arrivera-t-il à la réforme des retraites? La pression politique et sociale ne diminue pas et le Conseil constitutionnel rendra une décision cruciale vendredi 14 avril pour approuver ou rejeter le plan du gouvernement, notamment le report de l’âge de la retraite de 62 à 64 ans. Les Sages devront également se prononcer sur un éventuel référendum d’initiative partagée (RIP). Concernant le fond de la réforme, plusieurs scénarios sont possibles, allant d’une validation claire du texte à une censure totale.
Le scénario le plus plausible est une censure partielle: le Conseil constitutionnel ne trouverait alors pas grand-chose à redire sur le projet du gouvernement, en approuvant notamment l’âge de départ à la retraite à 64 ans. Toutefois, il y a de fortes chances que les Sages assortissent leur décision de coupures importantes.
L’index tant attendu sur l’emploi des seniors est menacé, par exemple. Il obligerait les entreprises à déclarer leurs salariés de plus de 55 ans. Selon plusieurs experts, cette mesure ressemble à un « cavalier », c’est-à-dire qu’elle n’a rien à faire ici, car le gouvernement a choisi un projet de loi de financement rectificatif de la sécurité sociale (PLFSSR) pour sa réforme. Pour être conforme à la loi, ces dispositions doivent avoir un impact budgétaire sur l’année en cours. Or, cet index senior n’en a pas nécessairement, contrairement au report de l’âge de départ à la retraite, qui doit commencer progressivement à partir du 1er septembre.
Officiellement, le gouvernement ne s’inquiète pas. « On n’y a pas été à la hussarde », plaisante même un pilier de la majorité, manière de dire que la réforme des retraites a été bien encadrée, ce qui est une bonne chose puisque l’exécutif fait de cette décision du Conseil constitutionnel un véritable arbitre.
Le noyau dur de la réforme préservé
Ce scénario de censure probable est, en fin de compte, celui qui conviendrait le mieux à l’exécutif, car il permettrait au gouvernement de montrer sa fermeté, en proclamant haut et fort que sa réforme n’a pas été démantelée et que son noyau dur a été préservé. Cet argument politique est tout trouvé pour dire que la loi a terminé son « cheminement démocratique », devenue l’expression à la mode au gouvernement. Emmanuel Macron aura 15 jours, après la décision, pour promulguer tout ce que le Conseil constitutionnel aura validé. Cette promulgation pourrait s’accompagner d’une allocution solennelle à laquelle réfléchissent plusieurs de ses proches. « Les syndicats auront plus de mal à mobiliser », estime un député influent, pour qui la tension pourrait commencer à baisser dans le pays.
Laurent Berger estime d’ailleurs que la décision des Sages, quelle qu’elle soit, s’imposera « à tout le monde ». Traduction du chef de la CFDT : « Je continuerai à dire que cette réforme est injuste, mais démocratiquement, elle est légitime ».
L’Élysée et Matignon ont toutefois anticipé cette censure partielle. Les mesures rejetées pourraient être recyclées dans une grande loi travail, un bon argument pour réinviter les syndicats à la table des négociations, sans certitude qu’ils acceptent de discuter et sans certitude non plus que la mobilisation s’arrête du jour au lendemain.