Le dirigeant du Rassemblement national prétend se baser sur les statistiques fournies par Frontex, l’organisme européen chargé des frontières. Cependant, cette affirmation est erronée. Voici les clarifications nécessaires.
L’immigration aux frontières européennes serait en train d’augmenter considérablement, d’après Jordan Bardella, président du Rassemblement national: « Vous avez vu les derniers chiffres de Frontex, l’agence de garde-frontière européenne, qui montre qu’en comparaison à 2022, il y a une hausse de 300% des entrées illégales d’immigration en Europe », a-t-il déclaré sur France Inter.
Une augmentation très localisée
Cependant, les propos de Jordan Bardella sont incorrects: il n’y a pas une augmentation de 300% des entrées irrégulières en Europe. En réalité, c’est bien moins. Selon les données de Frontex, les entrées irrégulières en Europe ont augmenté de 30% durant les quatre premiers mois de 2023 par rapport à la même période en 2022. Cela représente un peu plus de 80 000 tentatives de passer une frontière européenne.
Le chiffre de 300% mentionné par le président du Rassemblement national existe bel et bien, mais il concerne uniquement une seule porte d’entrée dans l’Union européenne: celle de la Méditerranée centrale, c’est-à-dire le sud de l’Italie, notamment l’île de Lampedusa, près de la Sicile, où arrivent des navires de fortune. Sur cette route, d’après les données de Frontex, un peu plus de 42 000 entrées irrégulières ont été enregistrées entre janvier et avril, contre un peu plus de 10 000 l’an dernier à la même époque. Il s’agit effectivement d’un record pour cet axe, très utilisé depuis plusieurs années par les migrants, mais ce n’est pas le seul point de passage en Europe !
Les autres routes sont toutes en baisse
Pour les autres points de passage en Europe, c’est partout en baisse! Que ce soit dans les Balkans (qui était la route la plus empruntée l’an dernier par les migrants), mais aussi entre la Turquie et la Grèce ou encore autour de Gibraltar au sud de l’Espagne, tous ces axes ont vu passer moins de personnes en ce début d’année que l’année dernière à la même époque, avec des baisses parfois importantes de l’ordre de 30 à 50% selon les endroits.
Selon Frontex, si cela diminue dans les Balkans, c’est principalement parce qu’il y a eu moins de migrants syriens et afghans et que la Hongrie a renforcé ses contrôles aux frontières. Et si cela augmente significativement en Méditerranée, c’est parce que les groupes de passeurs en Libye et en Tunisie sont mieux organisés. Ils profitent également de l’instabilité politique dans ces deux pays, selon Frontex.
Une autre raison: les passeurs fabriquent plus rapidement des embarcations de fortune, des petits bateaux assemblés en quelques heures seulement sur une plage avant de prendre le large. En conséquence, le prix des traversées a baissé et le nombre de candidats au départ a augmenté.