Depuis le début du mois de février, on observe une hausse de 4,75% en moyenne sur les tarifs des péages. Cependant, un rapport officiel préconisait une réduction de ces tarifs pour les réseaux confiés à Vinci et Eiffage. Un écrit que le ministère de l’Economie aurait gardé caché pendant une période de deux ans. C’est un extrait de « Complément d’enquête » concernant un sujet très délicat.
Le Canard enchaîné a révélé une information choc en début d’année. L’hebdomadaire satirique a signalé que Bercy aurait dissimulé un rapport analysant le fonctionnement économique des compagnies d’autoroutes depuis deux ans.
Ce rapport émanant de l’Inspection générale des finances (IGF) met en évidence la sur-lucrativité de plusieurs concessions autoroutières initialement contrôlées par l’État. Les deux principales entreprises en charge, Vinci et Eiffage, pourraient accumuler un bénéfice de 55 milliards d’euros, d’après les évaluations des inspecteurs financiers. Ces derniers ont soulevé deux solutions pour ramener la rentabilité de ces concessions autoroutières à l’échelle anticipée lors de la privatisation: réduire la période de leurs contrats ou obliger une réduction de leurs tarifs d’environ 60%.
« Nos éstimations n’étaient pas justes »
Le dossier des autoroutes est un sujet maîtrisé parle ministre de l’Economie, qui est à l’origine de ce rapport. En 2006, Bruno Le Maire fait partie du cabinet du Premier ministre Dominique de Villepin, celui qui a décidé de la privatisation. Le 22 mars dernier, face à l’assemblée législative, il a nié avoir occulté les conclusions du rapport qui n’était pas, d’après lui, « destiné à être publié ». Cependant, sous la pression des médias, il a fini par le dévoiler. « Nos éstimations d’origine [lors de la privatisation] étaient incorrectes. Nous avons fait une erreur », reconnaissait-il, s’engageant à consulter le Conseil d’Etat pour explorer l’option prioritaire exposée dans le rapport : abréger la durée des concessions autoroutières. Pourquoi ne pas l’avoir fait deux ans plus tôt, dès la découverte des conclusions de l’IGF ? Le ministre n’a pas voulu commenter lors de l’émission « Complément d’enquête ».
Le mardi 20 juin, Bruno Le Maire a informé que le gouvernement envisageait de taxer les concessions autoroutières. Cette éventualité aurait obtenu l’approbation du Conseil d’Etat – une décision qui n’a pas non plus été divulguée.
Extrait du reportage « Péages, profits extraordinaires : nos autoroutes exorbitantes », un document à découvrir dans « Complément d’enquête » le 29 juin 2023.