L’emblématique actrice du théâtre britannique, récompensée par deux Oscars pour des personnages féminins érotiquement envoûtants, a dévoué la même passion à sa considérable carrière en tant que députée du parti travailliste britannique.
L’actrice britannique Glenda Jackson, lauréate de deux Oscars avant de poursuivre une carrière en politique avec le Parti travailliste, est décédée à l’âge de 87 ans, a annoncé son agent le jeudi 15 juin. Il a également précisé qu’elle venait de tourner un nouveau film avec Michael Caine, confirmant son retour à la comédie après des années consacrées à la politique.
Une vie audacieuse
À 80 ans et après 23 ans d’absence, cette femme élancée aux mains larges était revenue sur scène en 2016, en interprétant le roi Lear, un rôle consacrant pour les acteurs masculins au théâtre. Deux ans plus tard, elle remportait un Tony Award à Broadway. « Qui a peur de Glenda Jackson ? La plupart des gens, et à juste titre », écrivait le New York Times en 2019.
Muse de Ken Russell, elle remportait en 1970 son premier Oscar pour le film « Love », une adaptation audacieuse du roman de D.H Lawrence qui raconte des relations passionnées entre deux soeurs et leurs amants. En 1973, elle décrochait son deuxième Oscar avec la comédie « Une maîtresse dans les bras, une femme sur le dos » (A touch of class en anglais) grâce à son interprétation d’une femme divorcée piégée dans une relation d’amour impossible avec un homme marié.
Originaire de Birkenhead, un petit port face à Liverpool, où elle est née le 9 mai 1936, elle avait conservé un accent populaire et une soif de succès. Fille d’un maçon et d’une femme de ménage, elle travaillait d’abord dans une pharmacie et suivait des cours de théâtre pour amateurs. Malgré l’absence de soutien familial, elle s’inscrivait à l’Académie Royale d’Art Dramatique de Londres et partait en tournée.
Des rôles sulfureux entre théâtre et cinéma
C’est ainsi que le metteur en scène Peter Brook la repère et l’engage en 1963 pour jouer son Ophélie dans « Hamlet ». L’année suivante, elle rejoignait la Royal Shakespeare Company et faisait sensation dans la pièce « Marat/Sade ». Elle y incarnait une Charlotte Corday démente, fouettant Marat avec ses longs cheveux dans un asile où étaient internés les protagonistes de la Révolution française. L’actrice au tempérament de feu n’avait que 26 ans. La pièce était acclamée à Broadway deux ans plus tard.
Après son premier Oscar, sa féminité atypique et son magnétisme continuaient d’éblouir le public : dans « La symphonie pathétique » (1970, Ken Russell), elle jouait la femme d’un Tchaïkovski homosexuel qui finissait en nymphomane rasée dans un hôpital psychiatrique. Dans « Un dimanche comme les autres » (1971, John Schlesinger), elle se retrouvait à partager son amant avec un médecin new-yorkais dans un triangle bisexuel très audacieux pour l’époque.
Ministre des Transports
Après 35 ans de carrière au théâtre et au cinéma, elle entrait en politique pour lutter contre Margaret Thatcher, qu’elle accusait de détruire la société britannique. Élue en 1992 comme députée travailliste de la banlieue londonienne, elle conservait son poste jusqu’en 2015 et se distinguait par son engagement envers « les pauvres, les chômeurs et les malades ».
Nommée ministre des Transports dans le gouvernement de Tony Blair de 1997 à 1999, elle devenait par la suite une ardente opposante à la suite de l’invasion de l’Irak en 2003.
Habituée des diatribes théâtrales au Parlement, elle avait déclaré, d’une voix grave et tranchante, en hommage à la Dame de fer : « Première ministre de sexe féminin, certes. Mais une femme ? Certainement pas, du moins pour moi ».