Le ministre français de l’Intérieur, Gérald Darmanin, a été critiqué pour « atteinte aux valeurs républicaines » après avoir soutenu des commentaires selon lesquels les officiers faisant l’objet d’une enquête devraient être traités différemment lorsqu’ils sont traduits devant les tribunaux.
Dans une interview au journal le week-end dernier, le chef de la police nationale, Frédéric Veaux, a déclaré qu' »un policier n’a pas sa place en prison, même s’il a mal agi ou commis de graves erreurs au travail ».
Jeudi, avant de se rendre à une réunion avec des représentants du syndicat de la police, Darmanin a déclaré : « Je veux dire que je peux comprendre cette fatigue, cette tristesse et cette émotion ». Il a toutefois ajouté que les agents de police ne doivent pas oublier leur « sens de la mission ».
Ses propos télévisés, prononcés jeudi dans le contexte d’un commissariat de police parisien, sont intervenus alors que le gouvernement français s’efforce d’apaiser le mécontentement au sein des forces de police face à ce que beaucoup considèrent comme des conditions de travail difficiles, aggravées par la récente incarcération d’un officier à Marseille. trouvé injuste.
L’officier marseillais détenu en détention est accusé de « violences volontaires » lors de la vague d’émeutes qui a balayé la France au début du mois et qui a gravement blessé un jeune de 22 ans.
Son arrestation a suscité la colère de ses collègues à travers le pays et a conduit à un «ralentissement» par des congés de maladie concertés dans certains endroits.

Les remarques de Veaux ont été largement perçues comme un défi à l’indépendance du pouvoir judiciaire et ont provoqué l’indignation de la gauche politique française qui a accusé le responsable de ne pas respecter la séparation des pouvoirs.
Jeudi, Darmanin a pris la défense de Veaux, affirmant qu’il était un « excellent » commissaire qu’il était « fier de compter parmi ses collaborateurs ».
Appel à la démission de Darmanin
Cela intervient alors que le chef du Parti socialiste Olivier Faure a appelé à la démission de Darmanin, qu’il a accusé de « défier la République » en soutenant le chef de la police nationale malgré le « risque de sédition ».
Le député de Seine-et-Marne a également appelé le président Emmanuel Macron, « garant de l’indépendance de la justice… à mettre de l’ordre chez lui… car il ne peut y avoir d’Etat dans l’Etat ».
Un tweet de Faure, affirmait qu’il y avait « un triumvirat composé du ministre de l’intérieur, du directeur général de la police nationale et du préfet de police de Paris – tous trois défiant les règles républicaines… l’indépendance de la justice… et l’égalité des citoyens devant la loi. »
Le leader socialiste a également dénoncé le fait que « le ministre de l’Intérieur n’est plus qu’un collaborateur de sa propre administration… (défiant) à la fois du président de la République et de la République ».
Rappelant qu’en 1983, l’ancien président François Mitterrand avait « immédiatement sanctionné » une rébellion policière défiant l’autorité politique, Faure a ajouté que « nous attendons du chef de l’Etat qu’il ait le même courage ».
Pendant ce temps, le parti d’extrême gauche France Unbowed a soutenu les appels à la démission de Darmanin, la députée européenne Manon Aubry tweetant : « La seule chose dont Gérald Darmanin devrait maintenant s’honorer est sa démission ».
Les magistrats expriment leur inquiétude
Les hauts magistrats ont également exprimé leur inquiétude face aux propos de Darmanin concernant une « présomption de culpabilité » sur les policiers devant les tribunaux, les qualifiant de « nouvelle atteinte » à l’indépendance de la justice.
Dans un communiqué, la conférence nationale des chefs de cours d’appel indique ce vendredi : « Une nouvelle fois, la remise en cause par le ministre de l’Intérieur de l’application de la loi pénale par les magistrats, invoquant un non-respect de la présomption d’innocence et donc du principe d’impartialité vis-à-vis des policiers, constitue une critique directe des décisions judiciaires. »
Magistrats et procureurs ont souligné que la garde à vue d’un policier dans la banlieue parisienne de Nanterre – dans le cadre de l’enquête sur la mort de l’adolescente Nahel – et d’un autre à Marseille soupçonné d’avoir tabassé un jeune homme, sont des décisions « motivées » qui ont « fait l’objet d’un recours ».