Le Conseil d’État examine actuellement la question délicate du contrôle d’identité au faciès, suite aux émeutes qui ont éclaté dans plusieurs villes françaises trois mois auparavant, suite à la tragique mort du jeune Nahel. Cette problématique est soulevée par six associations qui ont saisi l’autorité compétente.
Abdoulaye a vécu une expérience qui l’a fait complètement craquer le 1er avril 2022 lorsqu’il a été confronté à quatre policiers du 16e arrondissement à Paris. Sur la vidéo du contrôle qu’il a lui-même filmée, on peut l’entendre dire : « C’est la 200ᵉ fois que je me fais contrôler par la police, il y en a ras-le-bol, je me fais tout le temps contrôler, tout le temps ! » Trois mois après les émeutes liées à la mort du jeune Nahel, le Conseil d’État examine la question sensible du contrôle d’identité au faciès.
Appuyées sur de nombreux témoignages, dont celui d’Abdoulaye, six associations, dont Human Rights Watch et Amnesty International, ont saisi la plus haute juridiction administrative française afin de contraindre l’État à changer ses pratiques en matière de contrôle policier, telles que la modification du code de procédure pénale ou l’introduction d’un récépissé par exemple.
La colère d’Abdoulaye, sans violence physique, lui a valu une amende de 2 400 euros pour outrage aux personnes dépositaires de l’ordre public. Il dénonce « le côté arbitraire » et la répétition de ces « contrôles au faciès ».
« J’ai des amis blancs de 30 ans, 35 ans, qui me disent qu’ils n’ont jamais été contrôlés par la police. » – Abdoulaye, à 42mag.fr
Aujourd’hui, Abdoulaye reste convaincu que c’est la couleur de sa peau, son apparence et une forme de profilage ethnique qui ont poussé les agents à le choisir ce jour-là parmi les autres automobilistes. « Dans un centre commercial où l’on va quelque part et qu’au milieu de la foule, on vous arrête, on vous met sur le côté, on vous fouille. Après vous posez la question ‘Pourquoi vous me contrôlez ?’ et on vous répond ‘Ne posez pas de questions, c’est comme ça !’. Il faut que ça change parce qu’il ne doit pas y avoir deux France dans un seul pays. »
Abdoulaye affirme avoir subi près de 200 contrôles d’identité qu’il estime être liés à son apparence depuis son enfance. Cette information est impossible à vérifier car en France, les forces de l’ordre ne délivrent pas de récépissés aux personnes qu’elles contrôlent dans l’espace public.
Il convient de noter que le président de la République, Emmanuel Macron, a reconnu le 4 décembre 2020 l’existence des contrôles au faciès, suite à l’agression du producteur de musique noir Michel Zecler, ce qui a provoqué la colère des syndicats de police.
Au cours des dernières années, la France a été condamnée plusieurs fois sur cette question : en juin 2021 par la Cour d’appel de Paris et en 2016 par la Cour de cassation, qui a condamné définitivement l’État pour des contrôles « au faciès ». Dans un rapport datant de 2017, le Défenseur des droits avait conclu qu’un jeune homme « perçu comme noir ou arabe » avait vingt fois plus de chances d’être contrôlé que le reste de la population.