Le but d’Elisabeth Borne est de rassembler les syndicats de salariés et les associations d’employeurs pour discuter du problème des salaires.
En dépit d’une actualité complexe, la Première Ministre Elisabeth Borne a lancé le lundi 16 octobre une réunion sociale sur la question des bas salaires. Cette initiative intervient au lendemain de l’incident terroriste survenu à Arras le vendredi précédent et à l’encontre des différends avec les acteurs sociaux. La Première Ministre aura une conversation avec sept syndicats de travailleurs (CFDT, CGT, FO, CFTC, CFE-CGC, Unsa et Solidaires) et six organisations patronales (Medef, U2P, CPME, FNSEA, Fesac et Udes). Comme le souligne Marylise Léon, la secrétaire générale de la CFDT, « Elisabeth Borne nous assure qu’il y a des annonces à venir et nous attendons qu’elle tienne parole. »
Franceinfo se penche sur quatre aspects de cette réunion sociale, dont l’objectif est d’ajuster les barèmes salariaux de quelque 60 secteurs d’activité dont les échelles n’ont pas été mises à jour depuis de nombreuses années.
1. De quoi s’agit-il exactement?
Présentée par Emmanuel Macron fin août lors d’une réunion avec les dirigeants des partis politiques, cette session sociale abordera plusieurs sujets, dont « les minima conventionnels, les classifications et les progressions de carrière », « les contrats à temps partiel et de courte durée », « la suppression des cotisations, les primes d’activité et l’aplatissement des salaires » selon les termes de Matignon. « L’objectif central de cette réunion sera l’augmentation des salaires et l’évolution des carrières professionnelles », a souligné la Première Ministre dans un entretien avec La Tribune Dimanche.
Actuellement, 56 branches professionnelles ne sont pas conformes, tandis qu’une dizaine sont « structurellement » non conformes, selon le ministre du Travail, Olivier Dussopt. Cela ne veut pas dire que certains travailleurs sont rémunérés en dessous du SMIC – l’employeur est tenu de combler le déficit le cas échéant – mais que de nombreux niveaux d’ancienneté sont alignés sur le salaire minimum, ce qui a pour conséquence d’aplatir les salaires.
« Des travailleurs commencent leur carrière au SMIC et sont toujours au même niveau plusieurs années après, c’est décourageant » a déclaré Elisabeth Borne, la Première ministre, dans un entretien à « La Tribune Dimanche ».
A la demande de plusieurs syndicats, la question de l’égalité entre les hommes et les femmes a été rajoutée à l’ordre du jour au dernier moment. Avec ce sujet, le gouvernement s’est fait taper sur les doigts par la Cour des comptes en septembre dernier, qui a souligné que malgré une « mobilisation indéniable », les avancées ont été « limitées » principalement en raison de « défaillances dans l’approche adoptée ».
2. Quel est son but?
En premier lieu, l’objectif de cette discussion est de renouer les liens avec les syndicats et le patronat, qui ont été mis à l’épreuve par la réforme des retraites. De plus, dans un entretien avec La Tribune dimanche, la Première ministre a annoncé la création d’un « Haut Conseil des salaires », dont la mission sera « d’éclairer cette situation et de proposer des solutions ». « Les barèmes de certaines branches professionnelles ne sont plus adaptés aux qualifications. Des travailleurs acquièrent des compétences très utiles pour la performance de notre économie sans que leur rémunération ne progresse », a expliqué Elisabeth Borne.
Toutefois, il est difficile de prédire les résultats de ces ateliers et discussions, même si les syndicats restent optimistes. Sophie Binet, le secrétaire général de la CGT, a expliqué au Monde que « La Première ministre m’a semblé nous écouter attentivement en essayant de comprendre nos propositions ». « La journée sera courte, mais au moins, on mettra les choses au clair et on sortira des discours lénifiants qui nous disent que tout va bien parce que le chômage baisse », a ajouté son homologue de la CFE-CGC, François Hommeril, dans le quotidien du soir.
3. Quelle est la position des syndicats?
Les syndicats sont généralement favorables à ce nouveau rendez-vous, bien que des divergences apparaissent d’ores et déjà. Tout d’abord, une des principales revendications de Force ouvrière et de la CGT est l’indexation des salaires sur l’inflation. Toutefois, cette option semble avoir été écartée par le gouvernement, selon Sophie Binet, citée par l’AFP.
De plus, plusieurs syndicats souhaitent « conditionner les aides publiques en général, ou les allègements de charge en particulier, au comportement de l’entreprise » en matière salariale ou environnementale, ont rappelé les services de Matignon. Toutefois, le patronat est opposé à cette idée. « Il est juridiquement impossible de sanctionner une entreprise qui serait à jour en matière de salaire, au motif que sa branche ne le serait pas », a relevé le Medef. De son côté, Matignon a évoqué « une proposition qui revient régulièrement, qui est de calculer les allègements généraux non pas par rapport au SMIC, mais par rapport aux minima de branches » professionnelles encore sous le SMIC.
Autre point noir: la conférence se tient sur fond de profond désaccord entre les partenaires sociaux et le gouvernement sur les régimes des retraites complémentaires du privé (Agirc-Arrco) et de l’assurance-chômage (Unedic). L’État souhaite y prélever des sommes pour combler le déficit du régime général des retraites ou alimenter France Travail, le nouveau service public de l’emploi. Toutefois, ces transferts sont une « ligne rouge » pour Sophie Binet, la leader de la CGT, et augurent « la fin de la lune de miel » avec le gouvernement, selon le Medef.
4. Comment se passe la journée?
La journée commence à 9 heures, au Conseil économique, social et environnemental (Cese) à Paris, avec une séance plénière et des interventions d’experts. Les dirigeants des organisations syndicales et patronales, ainsi que les ministres de l’Economie, Bruno Le Maire, du Travail, Olivier Dussopt, et des Solidarités, Aurore Bergé, doivent également prendre la parole dans la matinée. L’après-midi sera consacré à quatre ateliers, avec une restitution prévue en fin de journée. C’est la Première ministre qui aura la tâche de clôturer cette conférence sociale par un discours prévu à 17h30.