À compter du 1er janvier, les créateurs de séries, de films et de contenus audiovisuels souhaitant prétendre à l’assistance du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), devront présenter une évaluation de l’empreinte carbone de leurs productions. Notablement nocif pour l’environnement, ce domaine entreprend de devenir plus écologique et a la possibilité à présent de faire appel à des gestionnaires écologiques.
À partir du 1er janvier 2024, l’obtention des subventions attribuées par le Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) sera soumise à la présentation d’un bilan carbone par les producteurs de films, séries et programmes audiovisuels. Ce bilan carbone devra rendre compte de l’empreinte écologique des projets, en prenant en compte l’énergie consommée lors des tournages et de la post-production, l’empreinte écologique des décors, la nourriture destinée aux équipes, ainsi que tous les déplacements nécessités par le tournage et jusqu’à la promotion. Il devra être fourni en deux temps, d’abord une estimation en équivalent carbone avant le tournage, puis une constatation de l’empreinte carbone réelle une fois le tournage terminé.
Cette mesure vise à sensibiliser le secteur cinématographique et audiovisuel à son impact sur l’environnement et à indiquer où des efforts doivent être faits pour réduire cet impact. Selon Ecoprod, un collectif engagé pour la réduction de l’empreinte carbone dans ces industries, la production d’une heure d’émission de télévision équivaut à dix tonnes d’équivalent carbone, soit l’équivalent de dix allers-retours Paris-New York. Pour un long-métrage, cela monte à 750 tonnes d’équivalent carbone.
Certains professionnels du cinéma n’ont toutefois pas attendu cette mesure pour agir en faveur de l’environnement. Ils ont déjà commencé à réduire leur empreinte carbone grâce à l’aide d’éco-managers. Étienne Labroue, auteur et réalisateur de métier, exerce cette activité depuis deux ans. Il a notamment collaboré avec Endemol sur des programmes comme Celebrity Hunted et avec Quad sur une série de fictions.
Des tournages sans plastique
Étienne Labroue souligne qu’une intervention précoce d’un éco-manager dans un projet augmente les chances de succès des mesures prises pour réduire l’empreinte carbone. Les conseils de ce dernier peuvent s’appliquer à tous les aspects du tournage. Pour exemple, il suggère d’éviter les déchets plastiques en substituant les bouteilles d’eau en plastique par des gourdes, d’abandonner l’utilisation de lingettes démaquillantes au maquillage, ou d’opter pour des lampes LED pour l’éclairage.
De son point de vue, la construction des décors constitue l’un des postes les plus polluants dans cette industrie. Il recommande alors de recourir aux matériels de seconde main. Des sites tels que la Ressourcerie du cinéma à Montreuil et la Réserve des arts à Pantin proposent des décors recyclés. Une autre solution est le retro-design pour les productions les plus écologiquement ambitieuses. Il s’agit de concevoir les décors non pas à partir de dessins mais à partir d’éléments déjà existants que l’on est certain de pouvoir réutiliser.
L’empreinte carbone d’une production audiovisuelle dépend également de ce que l’équipe mange. Il est donc recommandé de privilégier les fournisseurs locaux et de limiter, voire éliminer la consommation de viande, en particulier la viande rouge. Un repas à base de viande rouge a 14 fois plus d’impact qu’un repas végétarien. Multiplié par le nombre de repas servis lors d’un tournage, cet impact est notable.
« C’est surtout une question de conviction »
Les transports sont également un poste important d’émissions de carbone. C’est pourquoi les éco-managers recommandent de choisir les moyens de transport les moins polluants, comme le train plutôt que l’avion, et de promouvoir le covoiturage. Il est également nécessaire de réfléchir à l’emplacement du lieu de tournage, l’impact environnemental étant différent si le tournage a lieu en Normandie ou aux Philippines.
La mise en œuvre de ces recommandations requiert une certaine organisation et un coût supplémentaire estimé entre 0,1 et 1% du budget, selon Étienne Labroue. Néanmoins, il affirme qu’il s’agit avant tout d’une question de conviction.
Le résultat du bilan carbone ne déterminera pas encore, pour l’instant, l’attribution des aides du CNC. Cependant, il n’est pas exclu que soit instauré un bonus sur le modèle de celui attribué depuis 2019 aux productions cinématographiques et audiovisuelles qui assurent la parité au sein des postes d’encadrement de leur équipe de tournage. On peut également s’attendre à ce que le bilan carbone soit un critère pour l’attribution des aides du CNC aux œuvres d’animation, immersives et jeux vidéo.