La responsable du Ministère des Solidarités et des Familles a révélé cette disposition, le dimanche, sans en préciser les détails exacts.
En réaction aux émeutes qui ont suivi la mort de Nahel à Nanterre six mois plus tôt et à la mise en garde adressée aux parents des émeutiers par le ministre de la Justice, le gouvernement envisage des mesures plus strictes. Aurore Bergé, la ministre des Solidarités et de la Famille, a annoncé dans une interview à La Tribune, le 10 décembre, qu’elle souhaitait instaurer des « travaux d’intérêt général pour les parents défaillants ». Toutefois, elle n’a pas précisé ce qu’elle entend par « parents défaillants » ni la nature de ces « travaux d’intérêt général ».
Généralement, une condamnation à des travaux d’intérêt général (TIG) implique de fournir un travail gratuit à la collectivité. Cette peine peut être prononcée par un tribunal pour un délit passible d’une peine de prison inférieure à dix ans ou pour une contravention de 5e classe. Le ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, avait rappelé en juillet que les procureurs avaient le pouvoir de poursuivre les parents des émeutiers en vertu de l’article 227-17 du Code pénal. Les parents qui manquent à leurs obligations légales au point de mettre en danger la santé, la sécurité, la moralité ou l’éducation de leurs enfants mineurs encourent une peine d’emprisonnement de deux ans et une amende de 30 000 euros.
Malgré le manque de précisions entourant la proposition, les premières réactions ont été mitigées. Attardons-nous sur certaines d’entre elles.
Les présidents de la commission sur la parentalité ne partagent pas cette approche
Dans son interview à La Tribune, Aurore Bergé a également annoncé la mise en place d’une commission destinée à élaborer des « propositions concrètes » pour « relever les défis de la parentalité ». Cette commission sera dirigée par le pédopsychiatre Serge Hefez et Hélène Roques, fondatrice de Notre Avenir pour tous, une organisation spécialisée dans les questions de jeunesse.
Cependant, tous deux ont exprimé des réserves quant à la proposition sur les « parents défaillants ». Selon Hélène Roques, « Cela mettrait ces parents en situation vis-à-vis de leurs enfants d’être eux-mêmes des délinquants ». Elle a expliqué que les membres de la commission sont motivés par le désir d’aider et de soutenir les parents, et leur objectif est la prévention, c’est-à-dire agir avant que les situations problématiques ne se déclarent.
« Je ne sais pas très bien ce que ce sont des parents défaillants. Nous sommes peut-être nombreux à nous reconnaître dans le fait que nous ne sommes pas forcément des parents parfaits. »
Hélène Roques, président de Notre Avenir pour toussur 42mag.fr
Du côté du pédopsychiatre Serge Hefez, il préfère « aider les familles en difficultés » plutôt que de les surveiller et de les punir. Ces TIG pour « parents défaillants » ne correspondent pas à son approche de pédopsychiatre à moins que ce concept puisse être modifié pour inclure des systèmes d’information qui aideraient les parents à restaurer leur autorité. Sur la base de son expérience professionnelle, il a constaté que travailler avec des familles en difficulté permettait d’améliorer de manière significative leur situation.
Certains membres de la commission ont déjà démissionné lors de la première réunion qui s’est tenue lundi. Ils ont exprimé leur regret que les travaux à venir soient placés sous le signe de la répression.
La gauche trouve l’idée « indigne » et stigmatisante
La proposition de la ministre a fait l’objet de critiques de la part de plusieurs personnalités de gauche. Par exemple, Manuel Bompard du parti La France insoumise a exprimé son indignation face à cette idée qui, selon lui, blâme et rend responsables les parents qui veulent le mieux pour leurs enfants pour la plupart.
« On va stigmatiser toujours la même chose, c’est-à-dire les parents pauvres. »
Manuelle Bompard, coordinateur politique de La France insoumisesur France 2
Marie Toussaint, députée européenne écologiste, estime également que la pauvreté dans un nombre significatif de familles est le véritable problème, et elle soutient que la solution n’est pas de pénaliser les parents, mais plutôt de leur venir en aide.
Selon le collectif Les Gilets roses, les mères seront les premières victimes de cette mesure
Fatimata Sy, fondatrice du collectif de mères Les Gilets roses a dénoncé ces annonces, arguant que les mères seront les principales cibles de ces sanctions, ce qui risque d’aggraver la situation.
Aurore Bergé a précisé que 60% des jeunes émeutiers provenaient de familles monoparentales et a reconnu que la société avait tendance à accepter le fait que les femmes assument seules certaines responsabilités parentales. La ministre a souligné que le rôle des pères ne devrait pas se limiter à une pension alimentaire.
La droite considère ce projet comme une série supplémentaire de mesures
Renaud Muselier, président des Républicains du conseil régional de Provence-Alpes-Côte d’Azur, a félicité Aurore Bergé pour cette « bonne idée » . Il a insisté sur le fait que chacun doit assumer sa part de responsabilité et que les parents qui ne s’occupent pas de leurs enfants lorsque des problèmes familiaux se présentent devraient être pénalisés. Cependant, il a également souligné l’importance de soutenir les mères célibataires.
« Vous avez des mères célibataires qui souffrent et vous avez des parents défaillants. Ce n’est pas tout à fait la même chose. »
Renaud Muselier, président LR du conseil régional de Pacasur le plateau du « Grand Jury »
Manuel Aeschlimann, le maire LR d’Asnières, a accueilli favorablement l’annonce d’Aurore Bergé. Il a estimé que cela représente l’instauration d’une nouvelle série de mesures visant à résoudre les problèmes d’autorité parentale. Il a donné en exemple l’envoi de factures d’eau par la mairie après la destruction de bouches à incendie, dont le paiement par les familles a contribué à résoudre le problème dans les quartiers concernés.
Le Rassemblement national juge les annonces « particulièrement timides »
Edwige Diaz, du Rassemblement national, a jugé les suggestions de la ministre insatisfaisantes. Bien que le Rassemblement national accueille favorablement l’acceptation par le gouvernement du laxisme judiciaire dans le pays, Diaz considère les annonces d’Aurore Bergé comme particulièrement timides.







