Selon les associations, le nombre de mineurs prostitués en France aurait considérablement augmenté ces cinq dernières années, passant de 15 000 à 20 000. Cette statistique alarmante a été révélée par une enquête menée par « L’Œil du 20 heures ».
Quels facteurs peuvent amener une adolescente de 16 ans à se prostituer ? Pour Alice, son calvaire a débuté sur les réseaux sociaux. En 2018, elle était en rupture familiale et scolaire, et un soir, sa vie a changé de façon irrémédiable. Alice raconte : « J’ai été recrutée par les réseaux sociaux. Des hommes sont venus me parler, ils m’ont fait croire à de belles choses – vu que j’étais dans une situation précaire –, que j’allais avoir un appartement et uniquement faire le ménage. Je faisais ce qu’on me demandait. J’étais leur chose. » Pendant six mois, Alice a été séquestrée et prostituée dans des appartements et chambres d’hôtels en région parisienne, enchaînant jusqu’à dix clients par jour. Elle raconte les sévices subis et la souffrance physique et psychologique endurée. Tombée gravement malade, elle finit par se retrouver aux urgences et dénoncer ses bourreaux, mais cinq ans après les faits, est toujours en attente du procès.
Les réseaux sociaux jouent un rôle majeur dans le recrutement de jeunes filles pour la prostitution. Pour en apprendre davantage, une enquête a été menée à travers la création d’un faux profil sur une plateforme de rencontres pour ados. Le profil fictif, celui d’une jeune fille de 16 ans, a reçu de nombreuses propositions explicites d’hommes de 18 à 60 ans. Certains proposaient de payer pour des services sexuels, voire de partir à l’étranger pour se prostituer. Il s’agit là d’un mode opératoire bien connu des services de police, qui lutte contre une prostitution des mineurs de plus en plus organisée.
Également, des clients potentiels ont été interviewés. L’un d’eux, âgé de 50 ans, reconnaît que trouver des jeunes filles pour des relations tarifées via Internet est très simple. Il prétend, cependant, ne forcer personne et cherche à se justifier en affirmant qu’à 16 ans, les filles ne sont pas des enfants. Pourtant, solliciter des relations sexuelles avec une mineure en échange d’une rémunération est illégal et passible d’une peine d’emprisonnement et d’amende.
La Police judiciaire de Paris s’inquiète et affirme avoir multiplié par cinq le nombre d’affaires de pédocriminalité impliquant les réseaux sociaux. Les autorités relèvent une méconnaissance ou une minimisation du risque des réseaux sociaux de la part des mineurs, et mettent en garde sur l’augmentation prévisible des cas liée à l’arrivée des Jeux olympiques.
Des spécialistes du domaine soulignent également le rôle des réseaux sociaux dans la mise en danger des adolescents, qui sont souvent attirés par un mode de vie luxueux et alléchant. Ils insistent sur la nécessité d’une éducation préventive et d’un dialogue ouvert avec les jeunes pour les sensibiliser aux dangers potentiels.
Malgré les mesures prises par le gouvernement pour lutter contre la prostitution des mineurs, les associations témoignent d’une situation jugée toujours plus préoccupante.