En 2010, le représentant légal des proches des personnes qui ont subi les violences de Marc Dutroux est poursuivi pour possession d’images pédopornographiques. Le cinéaste réputé, Joachim Lafosse, a utilisé cette affaire comme source d’inspiration pour la conception de son dixième film d’une durée importante.
Un scandale majeur a secoué la Belgique. Dans son récent film, Un silence, sorti en salle le mercredi 10 janvier, Joachim Lafosse raconte l’explosion d’une famille aisée sur le thème de la pédocriminalité.
Le protagoniste, joué par Daniel Auteuil, est basé sur Victor Hissel. Cet homme de loi originaire de Liège a acquis une notoriété significative suite à l’affaire Marc Dutroux, mais s’est trouvé plus tard mêlé à une affaire dans laquelle il était accusé de possession d’images pédopornographiques. Cet article de 42mag.fr éclaire l’histoire réelle derrière ce film.
Une figure emblématique de la lutte contre la pédocriminalité
Le 24 juin 1995, Julie Lejeune et Mélissa Russo, 8 et 9 ans, disparaissent. On retrouve leurs corps un an après, enfouis dans le jardin d’un des plus notoires criminels pédophiles de l’histoire. Julie et Mélissa étaient les deux premières victimes de Marc Dutroux. Pour les représenter, les familles de ces filles ont fait appel au même avocat: Victor Hissel. On le voit pour la première fois sur l’écran en août 1996, lors d’une conférence de presse.
En menant cette bataille judiciaire, Victor Hissel acquiert une renommée conséquente. Il est en première ligne lors des marches de protestation, son discours audacieux faisant de lui un symbole de la lutte contre la pédocriminalité. « Il n’était pas réticent à secouer le cocotier, mettant en lumière la corruption des juges, des enquêteurs ou de la politique », a écrit La Libre Belgique à son sujet en 2008.
Cependant, sa manière « prêcheuse » œuvrer et ses « déclarations parfois imprudentes et éloignées du respect du droit strict » lui valent aussi des critiques, comme l’a rapporté le quotidien belge. Se considérant comme victime de pressions injustes, il abandonne la cause des parents de Julie et de Mélissa en mars 1998.
Accusé de possession de matériel pédopornographique
Dix ans après, on parle encore de lui, mais cette fois pour de sombres raisons. Dans une enquête internationale appelée « Koala », on identifie les propriétaires de machines contenant des images pédopornographiques. Le nom de Victor Hissel est sur cette liste. Le 18 février 2008, la police perquisitionne son domicile. Il est accusé de détention de matériel pédopornographique et l’Lopinion publique le désavoue.
Pendant son interrogatoire, Hissel admet les faits. Il affirme avoir été victime d’abus commis par un proche pendant son enfance et invoque des problèmes personnels et de santé pour se justifier. L’enquête dévoile qu’il a consulté plus de 7 500 images pédopornographiques entre 2005 et 2008. Il est traduit en justice.
Bien qu’il n’ait pas nié les faits, il estime ne pas avoir enfreint la législation. Il se justifie en disant qu’il a « simplement » regardé le contenu des sites. En effet, la loi belge de l’époque, datant d’avant la démocratisation d’internet, ne punit que l’impression ou le téléchargement d’images, mais pas leur visionnement.
Attaqué par son fils
Le 9 avril 2009, à l’âge de 53 ans, Hissel échappe de peu à la mort. Son propre fils, Romain, a tenté de le tuer en lui assénant cinq coups de couteaux. Le jeune homme de 20 ans reste muet au début du procès, mais il finit par mentionner les penchants pédocriminels de son père comme motif de son acte.
Le 4 mai 2011, Romain est jugé pour « tentative de parricide » devant le tribunal correctionnel de Liège. Les rapports médicaux indiquent qu’il était en état de démence passagère lorsqu’il a commis son acte. Les juges décident de l’acquitter, en vertu de l’article 71 du Code pénal belge.
Jugé coupable par sa profession
À l’inverse de son fils, Hissel a été jugé responsable de ses actes. Le 14 octobre 2010, il est condamné à 10 mois de prison ferme par le tribunal de Liège pour avoir détenu du matériel pédopornographique. En mai 2011, il est jugé en appel et cette fois, est condamné à 10 mois de prison avec une possibilité de sursis pendant cinq ans.
Malgré cela Hissel continue de contester la décision même après le rejet de son pourvoi en cassation. Il se tourne vers la Cour européenne des droits de l’homme, qui rejette également sa requête. C’est la fin de cette procédure judiciaire pour cet homme de 60 ans.
Une autre condamnation l’attend, cette fois d’ordre professionnel. Le barreau de Liège décide de le radier en 2012. Victor Hissel fait appel de cette décision. À Bruxelles, le conseil de discipline d’appel lui donne une seconde chance en transformant sa radiation en suspension d’un an, dont la moitié est avec sursis.