En tant que second film à être en lice, « La Jeune fille à l’aiguille » a provoqué une vive émotion chez de nombreux participants au festival, du fait de la puissance de son thème et de la magnificence de sa réalisation.
Le cinéaste Magnus von Horn, d’origine suédo-polonaise, était déjà présent à la Quinzaine des réalisateurs en 2016 avec son film Le Lendemain et il faisait partie de la Sélection officielle de l’édition qui a dû être annulée en 2020 à cause de la pandémie, avec son film Sweat, finalement sorti en 2022. Son retour sur la Croisette avec La Jeune fille à l’aiguille a subjugué de nombreux participants au festival.
Présenté en format carré 4/3 et en noir et blanc, La Jeune fille à l’aiguille est une œuvre se déroulant au lendemain de la Première Guerre mondiale. Elle évoque les tensions de classe, la question de l’avortement, ainsi que les « gueules cassées », ces soldats défigurés pendant la Grande Guerre, dans un Copenhague désillusionné.
Personnages en décalage
À l’image de ses deux films précédents, La Jeune fille à l’aiguille de von Horn se centre sur un personnage décalé ou ayant du mal à s’intégrer dans la société. Dans Le Lendemain, c’est un adolescent criminel rejeté par sa communauté après sa sortie de prison, tandis que dans Sweat, c’est une influenceuse adulée en ligne, mais en proie à la solitude et même à la persécution dans la réalité. Dans La Jeune fille à l’aiguille, l’héroïne est une mère adultère qui retrouve son mari défiguré, rentré du front.
En 1918, à Copenhague, Karoline, une couturière, entretient une relation avec son patron alors qu’elle croit son mari mort au combat. Enceinte, son avortement échoue et elle fait la connaissance de Dagmar, une femme de caractère qui trouve en secret des familles pour les enfants abandonnés. Devenues très amies, Karoline devient nourrice aux côtés de Dagmar lorsque son mari revient du front.
Brutal et troublant
La Jeune fille à l’aiguille, situé à la fin de la Grande Guerre, s’inspire des débuts du cinéma dans sa réalisation. Il fait référence, par exemple, à La Sortie des usines Lumière (1895) et décrit son film comme « un conte pour adultes », citant Alice au Pays des merveilles lors d’un repas. Mais s’il s’agit d’un conte, il est très sombre, l’héroïne traversant de nombreuses épreuves sans pour autant verser dans le pathos.
Certains pourraient lui reprocher d’utiliser de belles images pour raconter une histoire sociale et tragique. Si Magnus von Horn présente La Jeune fille à l’aiguille comme un mélodrame, il se distingue en montrant des actes brutaux et dérangeants avec une certaine modernité. Cette esthétique de l’inconfort sous une apparence attrayante contribue à la réussite de ce film captivant, porté par l’excellente actrice Trine Dyrholm (Festen). Certains festivaliers lui attribuent déjà la Palme, un peu prématurément peut-être, mais il devrait figurer au palmarès.
Informations sur le film
Genre : Drame historique
Réalisatrice : Magnus von Horn
Acteurs : Trine Dyrholm, Victoria Carmen Sonne, Besir Zeciri
Pays : Danemark/Pologne/Suède
Durée : 1h55
Sortie : Prochainement
Distributeur : Bac Films
Synopsis : Copenhague, 1918. Karoline, une jeune ouvrière, lutte pour sa survie. Tombe enceinte, elle rencontre Dagmar, une femme charismatique qui dirige une agence d’adoption clandestine. Un lien fort se tisse entre les deux femmes et Karoline accepte de devenir nourrice à ses côtés.