Ce documentaire de dix-sept minutes rassemble des récits d’hommes et de femmes qui ont subi des violences sexuelles. Faisant partie de la sélection officielle, sa diffusion est prévue pour le 15 mai.
La 77ème édition du célèbre Festival de Cannes sera marquée par la projection d’un court-métrage de Judith Godrèche, qui est devenue une figure emblématique en France dans la bataille contre les violences sexuelles. Dans son nouveau film intitulé « Moi aussi », l’actrice donne la parole aux victimes de ces abus. Le Festival de Cannes, par ce choix, souhaite donner de l’écho à ces récits poignants. Le film est inclus dans la sélection officielle et sera présenté le 15 mai lors de l’ouverture de la section « Un Certain Regard ». Il sera aussi diffusé en plein air sur la Plage et, une semaine plus tard, sur les chaînes de France Télévisions.
Juste un mois après son discours poignant lors de la cérémonie des Césars le 23 mars 2024, Judith Godrèche utilise ses talents d’écrivain et de réalisatrice pour relayer le vécu traumatique de personnes qui ont subi des abus sexuels. Son appel vigoureux à la responsabilité collective face aux violences sexuelles persistantes dans l’industrie cinématographique française a frappé par son audace, sa limpidité et sa détermination. Ce discours a dépassé les frontières du cinéma et interpelle une société qui peine souvent à reconnaître l’ampleur du problème, remarquent les organisateurs du plus grand festival de cinéma.
Un cadre réel et symbolique pour partager des expériences
« Moi aussi » est un film présenté comme un ensemble de récits individuels, chacun énoncé par fragments. Il expose le parcours pénible mais nécessaire des victimes, de l’inexpressible souffrance à la nuance libératrice de la parole. « Soudainement, je me suis retrouvée face à une multitude de victimes, une réalité qui reflète aussi la France, tant ces témoignages proviennent de toutes les classes sociales, de toutes les générations. J’ai dû alors me demander comment utiliser tous ces récits. Que faire quand on est submergée par tout ce que l’on entend, par le volume de ces témoignages », confie Judith Godrèche, citée dans le communiqué du Festival de Cannes.
Aux mille personnes qui ont participé au court-métrage, le film offre une symbiose de la musique, de la danse, de l’image et de l’imagination : un espace concret et symbolique pour exprimer leur vécu. Ensemble, en pleine journée, au cœur de la ville, ils ont fait de leur présence un acte de protestation. Judith Godrèche, qui compte une cinquantaine de films à son actif, a fait ses débuts de réalisatrice avec « Toutes les filles pleurent » en 2010. En 2023, elle réalise une série intitulée « Icon of French Cinéma », diffusée sur Arte. Après avoir collecté des témoignages sur Instagram, elle reprend la caméra pour ce film de 17 minutes, qui fait suite à son discours lors de la cérémonie des César, où elle a dénoncé la complaisance, le déni et la protection offerte par le milieu cinématographique face aux violences sexuelles.
Contribuer à la lutte contre les violences sexuelles
Judith Godrèche, 52 ans, a déposé plainte en début d’année contre les metteurs en scène Benoît Jacquot et Jacques Doillon, pour des agressions sexuelles et physiques prétendument subies durant son adolescence. Les accusations qu’elle porte, malgré les dénégations des deux hommes, ainsi que son implication publique dans cette cause, ont déclenché une vague de libération de la parole des victimes dans le secteur du cinéma, sept ans après le lancement du mouvement #MeToo à Hollywood.
La semaine dernière, l’Assemblée Nationale a donné son accord pour la création d’une commission d’enquête sur les abus et les violences commis dans le cinéma, l’audiovisuel, le spectacle vivant, la mode et la publicité, répondant ainsi à une demande de l’actrice. Sur le plan juridique, une enquête préliminaire a été ouverte à Paris contre les deux réalisateurs susmentionnés.