Bien que la quasi-totalité des partis du Nouveau Front populaire, une alliance de gauche, ait cosigné le texte, il apparaît que le gouvernement ne court pas de réel danger. En effet, le Rassemblement national ne compte pas appuyer cette motion de censure.
Michel Barnier fait face, ce mardi 8 octobre, à sa première motion de censure à l’Assemblée nationale. Cet événement constitue un test sans grand danger pour le chef du gouvernement. Il est déjà établi que l’exécutif ne tombera pas. Le groupe des députés du Rassemblement National ne soutiendra pas cette proposition émanant de la gauche. Ainsi, ce texte ne devrait recueillir qu’environ 200 votes, ce qui est nettement inférieur au seuil requis de 289 pour atteindre la majorité absolue.
Pourquoi alors la gauche se lance-t-elle dans une bataille perdue d’avance ? En réalité, la motion de censure est souvent un rite, un jeu de rôles, une scène classique du théâtre parlementaire. Pour ceux qui la proposent, c’est l’occasion de se montrer comme les principaux adversaires du gouvernement, les plus fermes, ceux qui ne cèdent pas. C’est le premier but de la gauche aujourd’hui. Dans la foulée, le second objectif consiste à démontrer que Michel Barnier est sous l’influence du Rassemblement National. En fin de journée, assurément, toute la gauche s’offusquera en notant que le RN ne souhaite pas renverser le gouvernement, du moins pour le moment.
La gauche blâmera l’exécutif pour sa dépendance à l’égard de la bonne volonté de Marine Le Pen, alors qu’elle-même a besoin du soutien de l’extrême droite pour éjecter Michel Barnier. Le dernier objectif est de resserrer les rangs d’une gauche qui ne se rassemble que pour faire front contre l’exécutif, et se divise sur presque tout le reste. Ce week-end encore, on a vu cette division avec l’appel de Jean-Luc Mélenchon à «mettre des drapeaux palestiniens partout dans les universités», une provocation que les socialistes ont vivement critiquée.
Une approche qui comporte des risques
Il y a également des inconvénients à déposer une motion de censure. Son échec révèle aussi l’absence d’une majorité alternative. Le Nouveau Front populaire peut bien clamer le « déni de démocratie » parce qu’Emmanuel Macron n’a pas nommé Lucie Castets à Matignon, le vote d’aujourd’hui va montrer que la gauche est minoritaire dans l’assemblée, tout comme ce fut le cas lors de l’élection de Yaël Braun-Pivet au perchoir. Déposer à répétition des motions de censure dont l’échec est assuré risque de fortifier l’exécutif tout en emprisonnant la gauche dans une posture stérile et purement protestataire. Notamment, si le jour vient où une motion de censure parvient enfin à évincer Michel Barnier, le soutien décisif du Rassemblement National pourrait le placer en position de revendiquer cette victoire.