Dès que le résultat de la motion de censure a été annoncé, le Rassemblement National n’a pas dissimulé sa volonté d’influencer davantage la scène politique en France. Cependant, quelles seront les limites de cette ambition ?
Le Rassemblement national refuse de donner totale liberté à Emmanuel Macron suite à ce revirement politique au Parlement. Le jour suivant une censure sans précédent, Michel Barnier a remis sa démission à Emmanuel Macron le 5 décembre, celui-ci étant attendu lors d’une allocution télévisée à 20 heures. Cette intervention vise à poser des bases claires alors qu’une période politique d’incertitude exceptionnelle débute.
Évincé mercredi soir par un vote de 331 députés avec une contribution notable du RN et du NFP, Michel Barnier détient désormais le record peu enviable de la plus courte durée de mandat à Matignon sous la Cinquième République. Pour le Rassemblement national, l’enjeu est de maintenir la pression sur le président Macron.
Le parti s’assure ainsi de pouvoir influer sur le choix du futur chef du gouvernement. « Bien sûr que nous aurons notre mot à dire ! Aujourd’hui, Marine Le Pen occupe une position clé dans la vie politique : elle est indispensable« , affirme Laurent Jacobelli, porte-parole du RN. « Aucun exécutif ne peut se passer d’un soutien implicite du Rassemblement national. 11 millions d’électeurs nous ont soutenus, et cela compte énormément. Sans nous, aucun gouvernement ne peut perdurer.«
Candidats potentiels pour le poste de Premier ministre
Le RN impose déjà ses critères : exclure un Premier ministre issu de la gauche ou qui serait trop critique envers Marine Le Pen. Par conséquent, des personnalités comme Xavier Bertrand et François Baroin sont écartées. À l’inverse, deux figures semblent obtenir les faveurs du RN : Sébastien Lecornu, ex-ministre des Armées, et François Bayrou, dirigeant du Modem.
« Aucun d’entre eux n’a eu de propos désobligeants envers nous, explique un proche de Marine Le Pen. En outre, ils sont attentifs à nos préoccupations. » Ces attributs avaient également été reconnus à Michel Barnier par le RN il y a quelque temps, mais… cela n’a cependant pas suffi.
« Ça y est, on sait que nous pouvons passer des paroles aux actes »
Une interrogation persiste quant à leur stratégie : cet épisode pourrait-il un jour se retourner contre le RN ? Au Parlement, aucun député du RN n’adhère à cette hypothèse. Bien au contraire. « Le futur gouvernement devra nécessairement collaborer avec nous, se vante un député, car désormais, il est acquis que nous pouvons appliquer nos menaces.«
Marine Le Pen se projette même dans les prochaines discussions budgétaires. « Nous allons construire ensemble – pas uniquement avec le RN, mais avec toutes les forces représentées à l’Assemblée nationale – un budget qui soit acceptable pour le plus grand nombre, et c’est celui-ci qui sera mis en œuvre pour les Français« , a-t-elle affirmé lors d’une interview au journal de 20 heures sur TF1, peu après le vote contre le gouvernement Barnier.
En ce qui concerne un éventuel impact négatif sur la perception publique, un député du RN balaie cette idée d’un revers de la main : « Les électeurs n’en ont que faire. Pour les Français, le seul responsable du chaos, c’est Emmanuel Macron. »