Suite au vote de la motion de censure, le Nouveau Front populaire paraît fragmenté quant à la stratégie à suivre. Pendant ce temps, le Rassemblement National s’engage à « bâtir ensemble » le budget avec le futur chef du gouvernement.
À peine le gouvernement a-t-il été renversé que les responsables politiques envisagent déjà l’avenir. Jeudi 5 décembre à 20 heures, Emmanuel Macron doit s’adresser à la nation après la destitution de Michel Barnier. Chaque parti précise les conditions sur lesquelles il pourrait soutenir le prochain gouvernement.
À gauche, les divisions sont visibles, tandis que la droite attend de voir et que l’extrême droite cherche à se montrer coopérative. Chacun présente ses propres lignes directrices et positions, que Franceinfo explore à travers les différents blocs politiques.
Les désaccords au sein de la gauche sur la marche à suivre
Le Nouveau Front populaire (NFP) demeure, comme souvent depuis sa fondation en juin, divisé concernant sa stratégie. La France insoumise (LFI) exige qu’Emmanuel Macron nomme un membre du NFP à la tête du gouvernement, une demande constante depuis les élections législatives anticipées, et réclame également la démission d’Emmanuel Macron. Mathilde Panot, la chef de file des députés LFI, a averti sur LCI que son parti rejetterait toute candidature au poste de Premier ministre n’émanant pas du NFP, incluant dans sa menace Bernard Cazeneuve, qui a fondé son propre mouvement après avoir quitté le Parti socialiste (PS). Selon Manuel Bompard, à la tête de LFI, une alliance avec le bloc central est irréaliste, comme il l’a affirmé sur X.
Le Parti socialiste (PS) se montre, en revanche, plus enclin à dialoguer. Boris Vallaud, le chef des députés socialistes, a déclaré sur 42mag.fr qu’un Premier ministre de gauche ouvert au compromis était nécessaire. En différenciation d’avec LFI, le PS se dit prêt à composer avec les macronistes. « Cela implique l’abandon du 49.3, l’absence de passage en force, et la nécessité de rechercher des compromis sur chaque projet », a averti Olivier Faure, le chef du parti, sur France Inter. Le Parti communiste français (PCF), bien que moins représenté au parlement, appelle quant à lui à un « pacte républicain et social ».
Les écologistes, sous la houlette de leur cheffe Marine Tondelier, semblent eux aussi pencher vers le dialogue avec les soutiens d’Emmanuel Macron. Elle a exprimé sur les réseaux sociaux le besoin de trouver une issue « dans le cadre du front républicain », en s’adressant notamment aux « centristes » et aux « partisans de Macron ». Les députés écologistes, dirigés par Cyrielle Chatelain, ont présenté une « feuille de route » centrée sur 11 priorités, focalisées sur le « quoi » plutôt que le « qui ». A l’instar des élus socialistes, ils s’engagent à ne pas recourir au 49.3 si la gauche devrait diriger à Matignon, rapporte Le Monde. Yannick Jadot, sénateur et voix différente au sein des écologistes, s’est montré ouvert à la présence de ministres issus du bloc central si un Premier ministre du NFP était désigné, pour éviter « d’aggraver la crise politique », comme il l’a confié sur 42mag.fr.
Le bloc central optimiste quant à un partenariat avec le PS
Les élus proches d’Emmanuel Macron écartent toute alliance avec LFI, comme ils l’ont exprimé suite aux législatives. Gabriel Attal, à la tête des députés d’Ensemble pour la République (EPR), a mentionné mardi un « accord de non-censure » qui engloberait les Républicains (LR) et le PS, permettant au gouvernement d’échapper à l’influence du RN lors de l’étude du budget. Durant son discours lors des débats mercredi, l’ex-Premier ministre a tendu la main aux socialistes, les incitant à se distancier de « l’extrême gauche », et critiquant « le camp du désordre incarné par les lepénistes et mélenchonistes ».
Le député Renaissance Pieyre-Alexandre Anglade a souhaité auprès de l’AFP, après la destitution, que le « front républicain » de juillet ait un prolongement au sein de l’Assemblée. Horizons, le parti d’Edouard Philippe, partage cette vision. Frédéric Valletoux, député de cette formation, a reconnu sur 42mag.fr l’échec du « bloc central » et a plaidé pour une « coalition » rassemblant la « droite républicaine » et les « sociaux-démocrates », excluant ainsi LFI.
La droite s’engage à ne pas s’opposer au futur gouvernement
Les Républicains (LR) n’entendent pas renverser le prochain gouvernement, même s’ils n’en faisaient pas partie. Laurent Wauquiez, leur leader à l’Assemblée nationale, a assuré sur France 2 : « Nous ne bloquerons pas, nous ne chercherons pas le chaos ». La participation de LR à la nouvelle équipe dépendra des priorités mises en avant. Excluant de facto la possibilité de renouveler l’alliance « socle commun » avec les macronistes, Laurent Wauquiez a exposé ses priorités : « réduire le gaspillage des finances publiques », « revaloriser le travail », et renforcer « la sécurité ».
Le Rassemblement national cherche à collaborer sur le budget
Au sein du RN, les dirigeants affirment que le futur gouvernement aura besoin de leur coopération. « Nous aurons bien sûr notre mot à dire (…) Aucun gouvernement ne peut ignorer la contribution bienveillante du Rassemblement national », a affirmé Laurent Jacobelli, porte-parole du RN, à 42mag.fr. Certains élus ont déjà exprimé leur opposition à certaines figures : « Xavier Bertrand, François Baroin, Lucie Castets et Bernard Cazeneuve, c’est non », a précisé le député Franck Allisio à 42mag.fr. « Il faut un Premier ministre qui possède une certaine indépendance et autorité par rapport à M. Attal », a-t-il ajouté.
Marine Le Pen, chef des députés RN, a exprimé son refus d’une censure systématique. Elle et ses collègues « laisseront agir » le prochain Premier ministre pour « co-élaborer » un budget « intéressant pour tous », comme elle l’a déclaré le mercredi soir sur TF1. Sur RTL jeudi matin, Jean-Philippe Tanguy, député RN, a néanmoins précisé certaines lignes rouges, avertissant que « si le futur Premier ministre ne renonce pas à l’indexation des retraites, il échouera ».
Lors de son intervention, Marine Le Pen a également critiqué Emmanuel Macron, le rendant responsable de la situation actuelle. Sans demander sa démission comme le fait LFI, elle estime que « la pression » sur lui « augmentera inévitablement » si « on ne respecte pas la volonté des électeurs ».