Un tribunal correctionnel français devrait rendre son verdict jeudi dans le procès pour viol collectif de Pélicot, qui constitue un moment décisif pour les victimes de violences sexuelles.
Cinquante et un hommes sont accusés d’avoir drogué et violé Gisèle Pelicot pendant près d’une décennie à son domicile de Mazan, dans le sud de la France, dans une affaire qui a mis à nu la réalité brutale des violences sexuelles et, ont souligné certains observateurs, la culture du viol.
Son ancien mari, Dominique Pelicot, 72 ans, a reconnu lors du procès avoir drogué sa femme avec des tranquillisants cachés dans sa nourriture et ses boissons.
Il a méticuleusement documenté les agressions dans 20 000 photos et vidéos stockées sur son ordinateur, que la police a utilisées pour identifier 72 agresseurs différents, même si tous n’ont pas été traduits en justice.
« Calculé et cruel »
La procureure Laure Chabaud a requis une peine maximale de 20 ans de prison contre Pélicot, qualifiant ses actes de « calculés, soutenus et cruels ». Chabaud a requis des peines de 10 à 18 ans pour les autres accusés.
Pelicot a affirmé avoir agi seul, niant les allégations selon lesquelles il aurait drogué les hommes qu’il avait invités dans la maison du couple à Mazan, en Provence.
Certains accusés ont fait valoir qu’ils avaient été induits en erreur en leur faisant croire que les rencontres étaient consensuelles.
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Le procès a mis en lumière les problèmes liés au consentement et à l’usage de drogues dans les affaires de violence sexuelle. Les militants voient cette affaire comme un tournant dans la sensibilisation à la soumission des produits chimiques.
« Un viol est un viol », pouvait-on lire sur une banderole accrochée face au palais de justice d’Avignon, où des groupes féministes se sont rassemblés tout au long du procès. Les manifestants brandissaient des pancartes indiquant « nous te croyons, Gisèle » et « la honte change de camp ».
Gisèle Pelicot, qui a divorcé de son mari après que la police a découvert ses crimes en 2020, se présentait quotidiennement au tribunal, souvent accueillie par ses partisans.
Parlant de sa décision de faire face à l’accusé, elle a déclaré : « Je me bats pour toutes ces victimes dans le monde, femmes et hommes, qui souffrent de violences sexuelles ».
Sécurité renforcée
L’annonce du verdict devrait attirer de nombreuses foules à Avignon. La police a renforcé la sécurité au palais de justice, avec des agents supplémentaires déployés pour contrôler la foule.
Des groupes féministes et les familles des accusés ont déclaré qu’ils se rendraient dans cette ville du sud de la France pour la décision, qui intervient après près de quatre mois de témoignages poignants.
Le groupe féministe Amazones d’Avignon affirme qu’une trentaine de ses membres manifesteront devant le tribunal. « On va faire du bruit », a déclaré à FranceInfo l’un de ses militants.
Plus de 170 médias de 12 pays ont été accrédités pour couvrir le verdict, mais les contraintes d’espace signifient que seuls trois médias français seront autorisés dans la salle d’audience.
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Préparatifs pénitentiaires
Les 32 accusés, actuellement en liberté sous caution, ont été priés d’arriver avec des sacs emballés au cas où ils seraient condamnés à des peines de prison.
Antoine Minier, avocat représentant trois des prévenus, a déclaré : « Ils espèrent éviter la détention, mais ils sont prêts à de lourdes peines. »
Les personnes condamnées à des peines privatives de liberté seront probablement réparties entre les établissements de Marseille, Aix-en-Provence, Nîmes et Villeneuve-lès-Maguelone.
Les avocats de la défense ont critiqué les recommandations de l’accusation, les qualifiant d’« excessives et injustes ».
Patrick Gontard, qui représente d’autres accusés, a déclaré que nombre de ses clients craignent d’être pris pour cible en prison, où « les violeurs sont traités avec une hostilité particulière ».
Les juges sont tenus de justifier leurs décisions de condamnation, ce qui pourrait prolonger le processus.
Si des acquittements sont prononcés, chacun nécessitera des explications individuelles, tandis que les verdicts de culpabilité pourraient être accompagnés d’une déclaration générale sur l’absence de consentement dans l’affaire.
Le procureur Chabaud a déclaré au tribunal : « Il n’y a pas de viol ordinaire ni de viol accidentel. Cela doit être clair.
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