Ce collectif, qui a vu le jour en 2019 et se présente comme féministe, est réputé pour ses prises de position hostiles à l’encontre des personnes immigrées.
« Félicitations pour votre combat. Vous savez que je m’y sens très lié. » C’est par ces mots, énoncés mardi 21 janvier lors d’une conférence, que Bruno Retailleau, ministre de l’Intérieur, a salué la présidente du collectif identitaire Némésis. Ces déclarations ont suscité la colère des députés de La France insoumise, Clémence Guetté exprimant son désaccord face au soutien d’un groupe qualifié d’extrême droite, jugé violent et raciste.
Devant cette polémique, Bruno Retailleau a rectifié ses propos vendredi, sur CNews : « Je ne me sens pas du tout aligné avec cette association en tant que telle. » Des membres de ce collectif « m’ont interrogé sur leur lutte contre l’islamisme et l’antisémitisme, et logiquement, je leur ai partagé que je soutenais ces luttes« , a précisé le ministre, admettant avoir découvert après coup qu’il s’agissait d’un groupe aux positions très radicales, ayant par exemple vivement attaqué Valérie Pécresse. Franceinfo vous présente maintenant ce groupe qui se déclare féministe, bien que ses positions restent très controversées.
Un groupe identitaire et controversé
Créé en 2019, le collectif Némésis emprunte son nom à la déesse de la vengeance. Ce groupe, qui se revendique féministe, a acquis une certaine notoriété pour ses initiatives provocatrices lors des manifestations, souvent teintées de propos xénophobes et anti-immigrants. Il s’est fait remarquer le 23 novembre 2019, quand plusieurs de ses membres ont brandi des pancartes mentionnant les « agresseurs étrangers » lors d’une marche à Paris contre les violences sexuelles et sexistes, organisée par le mouvement #NousToutes.
Ce groupe d’extrême droite, qui jouit d’une large visibilité sur les réseaux sociaux, revendique un effectif de 200 personnes, selon Le Monde. Il attribue la majorité des violences sexuelles aux immigrés et aux musulmans. En septembre 2024, il a organisé une manifestation pour protester contre le meurtre de Philippine, une étudiante de 19 ans, tuée par un Marocain de 22 ans, déjà condamné pour viol et en attente d’expulsion.
Une présidente très visible médiatiquement
Alice Cordier, un pseudonyme sous lequel se présente la présidente et fondatrice de Némésis, est la figure de proue médiatique du groupe. Elle intervient régulièrement sur les médias du groupe Bolloré (Europe 1, CNews, C8) et a acquis de la notoriété en participant à des émissions telles que « Touche pas à mon poste » et « Les Grandes Gueules ». Elle se décrivait autrefois comme « féministe identitaire » et aujourd’hui se présente comme « féministe de droite », selon une interview dans Le Monde en novembre.
Bruno Retailleau s’adressait à elle lors de la conférence du mardi. Alice Cordier a réagi sur X en disant : « Après des années de difficultés, de comptes en banque fermés, de censures sur les réseaux sociaux, d’attaques par des militants d’extrême gauche, et d’articles diffamatoires, recevoir les félicitations de notre ministre de l’Intérieur a été une surprise ». Très active en ligne, elle est qualifiée de « spécialiste de la communication politique » par la chercheuse Magali Della Sudda, auteure de Les nouvelles femmes de droite, dans un entretien avec l’Institut de relations internationales et stratégiques (Iris).
Des actions chocs et provocantes
Leur tactique principale reste de perturber les manifestations en arborant des messages provocateurs ou xénophobes. À titre d’exemple, ils ont interrompu la cérémonie des vœux de la maire écologiste de Besançon, Anne Vignot, en janvier. Deux militantes ont fait irruption avec une « banderole portant le texte : ‘Bienvenue aux agresseurs étrangers' », selon un communiqué de la mairie, qui a porté plainte pour « incitation à la discrimination et à la haine raciale ». En avril 2024, lors du carnaval de la même ville, deux autres membres avaient déjà brandi des pancartes proclamant « Dehors les agresseurs étrangers » et « Libérez-nous de l’immigration ».
Les militantes ont aussi perturbé un événement parisien contre l’extrême droite, trois jours avant le premier tour des législatives le 27 juin 2024. Selon StreetPress, co-organisateur de l’événement, le groupe a brandi des pancartes visant trois candidats du Nouveau Front populaire, s’accompagnant d’une sécurité masquée. De plus, Alice Cordier a lancé une cagnotte pour financer un « billet d’avion » à destination de la journaliste française d’origine marocaine, Nassira El Moaddem, une action qu’elle a ensuite justifiée par « l’humour », selon Libération.
Des affinités avec le Rassemblement national
Bien que le collectif ne soit pas officiellement affilié au Rassemblement national, Némésis exprime des sympathies idéologiques avec le parti dirigé par Jordan Bardella et Marine Le Pen, l’ayant soutenu lors des élections législatives anticipées des 30 juin et 7 juillet.
En réaction à l’arrestation d’une militante de Némésis, des représentants du RN en Bourgogne-Franche-Comté, tels que le député Julien Odoul, avaient levé une pancarte « Dehors les agresseurs étrangers » en plein conseil régional en avril 2024. Plus récemment, à Fréjus, Alice Cordier a tenu une conférence sur le thème « Lutter contre l’entrisme islamique », avec la participation du maire David Rachline (RN).
Par ailleurs, le site StreetPress a rapporté que Stéphane Ravier, sénateur d’extrême droite et ancien membre du Rassemblement national, devenu parti Reconquête, a remis en février 2024 « une médaille pour acte courageux » à une militante du collectif Némésis.