Après avoir survécu à cinq tentatives de censure en seulement un mois, le Premier ministre est confronté à divers dossiers urgents. Il doit également naviguer à travers des votes décisifs au sein du Parlement.
Des enjeux politiques et polémiques
François Bayrou entame une semaine cruciale et pleine de controverses à la tête du gouvernement dès le lundi 17 février. Accusé d’avoir eu connaissance des violences et agressions sexuelles survenues à Notre-Dame de Bétharram, accusations qu’il récuse, le Premier ministre devra aussi gérer des désaccords au sein de son cabinet concernant la politique migratoire, suivre les débats sur le budget de la Sécurité sociale, et faire face à une probable motion de censure. Franceinfo fait le point sur les principaux défis politiques de la semaine qui s’annonce.
Appels à la démission suite à l’affaire Bétharram
L’affaire Bétharram est au premier plan et risque de continuer à accaparer l’attention du Premier ministre. François Bayrou a pris part à une rencontre avec les victimes des actes de violence et agressions sexuelles dans cet établissement catholique des Pyrénées-Atlantiques. Après plus de trois heures de discussions, il a promis des ressources judiciaires supplémentaires pour traiter les 112 plaintes déposées. Alain Esquerre, porte-parole du collectif, a salué l’écoute attentive de François Bayrou tout en soulignant qu’un grand nombre de victimes restent encore silencieuses.
Cependant, cette affaire a des répercussions politiques. La gauche accuse Bayrou de dissimulation quant à sa connaissance des faits de violence sexuelle dans cet établissement alors qu’il occupait divers postes ministériels et que ses enfants y étaient scolarisés. Interrogé à de nombreuses reprises, Bayrou affirme ne jamais avoir été informé de ces actes, expliquant avoir été au courant uniquement d’incidents mineurs dans les années 1990. Il insiste sur le fait d’avoir agi selon ses obligations tant en tant que ministre qu’après.
Selon le socialiste Olivier Faure, si Bayrou a contribué au silence autour de ces crimes pour protéger l’institution, il devrait alors démissionner par conscience. Olivier Faure évoque une incohérence dans les explications du Premier ministre. Selon Faure, Bayrou aurait demandé un rapport en 1996, ce qui soulève des questions sur ce qu’il savait réellement.
Olivier Faure demande à comprendre si Bayrou a cherché à protéger l’institution au détriment des élèves, notamment en raison des liens personnels de sa famille avec l’endroit. Le PS souhaite voir la création d’une commission d’enquête parlementaire ou que la justice se saisisse de cette affaire. La France insoumise et les Ecologistes ont également réclamé la démission du chef du gouvernement.
Une motion de censure en préparation par les députés socialistes
L’affaire Bétharram n’est pas le seul point de conflit entre l’exécutif et les socialistes cette semaine. Le PS a annoncé début février qu’il déposerait une motion de censure, en partie pour s’opposer aux commentaires de Bayrou sur le « sentiment de submersion » migratoire. Le texte pourrait être présenté dès lundi avec un vote à partir de mercredi.
François Bayrou devrait néanmoins éviter cette motion de censure, sa sixième depuis sa prise de fonction. Elle ne peut passer sans le soutien du Rassemblement national, qui a déclaré qu’il ne la soutiendrait pas. Thomas Ménagé, porte-parole du groupe RN, a déclaré que le PS a initié cette démarche pour s’opposer aux commentaires de Bayrou concernant la migration.
Jean-Philippe Tanguy, député RN, qualifie l’action des socialistes de manœuvre destinée à distraire l’opinion publique alors qu’ils ont soutenu le gouvernement Macron lors du vote du budget. Il conteste également que le gouvernement ait une politique migratoire stricte.
Un vote crucial sur le budget de la Sécurité sociale
Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale passera un examen décisif au Sénat. Après avoir été approuvé sans vote à l’Assemblée nationale grâce à l’article 49.3 de la Constitution, il sera évalué par le Sénat ce lundi 17 février.
Il est probable que le Sénat adopte le texte sans modifications, ce qui signifierait son adoption définitive. Si des modifications sont apportées, le projet de loi reviendra devant l’Assemblée nationale, avec probablement un nouveau recours à l’article 49.3.
En commission, le texte a reçu un avis conforme afin de ne pas retarder les hopitaux et Ehpad, bien que la rapporteure générale ait souligné le coût élevé associé aux décisions budgétaires. Le budget prévoit une augmentation de 3,3 % des dépenses pour l’Assurance-maladie, avec un déficit attendu à plus de 22 milliards d’euros, bien qu’il pourrait encore augmenter d’ici la fin de l’année.
Des divergences sur la politique d’immigration au sein du gouvernement
Parallèlement aux votes parlementaires, François Bayrou doit naviguer à travers les divergences au sein de son propre gouvernement. Le 7 février, il a exprimé son souhait d’un débat public sur l’identité nationale, exposant ainsi des désaccords parmi ses ministres.
Ainsi, le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, s’est dit favorable à l’interdiction du mariage pour les personnes en situation irrégulière, une proposition qui sera discutée au Sénat. Retailleau a rappelé que cette initiative serait soutenue par le gouvernement par l’intermédiaire du garde des Sceaux, Gérald Darmanin, qui a encouragé une modification de la loi.
Cependant, Manuel Valls, ministre des Outre-mer, fait entendre une voix différente, affirmant que remettre en question le droit du sol serait une erreur historique, tout en soulignant que les causes de l’immigration sont bien plus complexes. Il cite le droit au séjour et le système social français comme facteurs attractifs, exhortant à éviter les solutions simplistes.