Jeudi, durant la journée réservée aux propositions de loi des Républicains, l’Assemblée nationale a approuvé un projet renforçant les critères pour acquérir la nationalité française dans l’archipel. Bien que la gauche ait montré des différences d’opinion sur les propositions financières, elle a joint ses forces pour s’opposer à cette mesure, mais sans succès.
Bien que largement critiquée par la gauche, cette mesure a fini par être validée avec difficulté. Le jeudi 6 février, en fin de journée, les députés ont voté en faveur d’un projet de loi cherchant à limiter le droit du sol à Mayotte. Cette proposition a été introduite par Les Républicains lors de leur journée parlementaire dédiée à leurs initiatives législatives.
Avec le soutien de l’exécutif, la proposition a donné l’occasion à la gauche de montrer une certaine cohésion retrouvée, après des désaccords marqués liés aux textes budgétaires. En effet, le Parti socialiste n’avait pas appuyé la motion de censure contre le gouvernement de François Bayrou la veille. Du côté opposé, le Rassemblement national a approuvé cette mesure, bien que critiquant ce qu’il considérait comme un « bricolage » pour faire face à l’immigration venant des Comores voisines.
« Une révision nécessaire et urgente »
Depuis 2018, une exception au droit du sol s’applique à Mayotte, restreignant l’acquisition de la nationalité française pour les enfants nés sur l’île. À présent, un parent doit être en situation régulière en France depuis trois mois avant la naissance. Le nouveau texte suggéré par Les Républicains entend durcir ces critères en exigeant la présence régulière des « deux parents » et en allongeant la période de résidence sur le territoire à trois ans. Initialement, il était question d’un an, mais un amendement soutenu à tort par la gauche a fait passer ce délai à trois ans. Le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, a assuré qu’une rectification sera faite au Sénat suite à la menace d’une censure par le Conseil constitutionnel.
Le texte des auteurs met en avant le caractère « impératif de stopper l’attraction de Mayotte pour les flux migratoires » et affirme que le droit du sol actuel agit comme un « aimant en attirant des populations en situation irrégulière » depuis les Comores voisines.
« L’objectif est d’éliminer l’accès au droit du sol pour les personnes en situation irrégulière », a déclaré Laurent Wauquiez, chef des députés LR, lors d’une conférence de presse. « Nous souhaitons ensuite élargir ces restrictions à l’ensemble du territoire français », a-t-il ajouté. Le Premier ministre François Bayrou a exprimé son approbation pour une limitation du droit du sol à Mayotte, tout en excluant de telles mesures en métropole et en Corse.
« Je voterai en faveur de cette limitation à Mayotte », avait affirmé Estelle Youssouffa, députée Liot du département 101, sur 42mag.fr avant le vote. Selon elle, « Mayotte a toujours réclamé la suppression du droit du sol », voyant cela comme un « abus et un détournement clair » de ce droit. Évoquant une nécessité d’« adaptation urgente de toutes nos politiques publiques » face à l’« exceptionnelle pression migratoire et démographique » que subit l’île, le député LR Philippe Gosselin a pris parole à l’Assemblée nationale, soulignant que « le département le plus pauvre de France subit une croissance incontrôlée de sa population » en raison de l’immigration massive des Comores.
Un doute sur l’efficacité
La question se pose de l’efficacité de cette mesure. Les spécialistes du sujet expriment leur scepticisme. Selon François Hermet, maître de conférences en sciences économiques à l’université de La Réunion, « aucune étude d’impact ne permet de juger des effets de la réforme de 2018 ». Il souligne que « rendre une loi inefficace plus stricte n’améliorera pas la lutte contre l’immigration clandestine ». De plus, aucune étude ne permet de comprendre les motivations des migrants, principalement originaires des Comores.
Sacha Houlié, ancien président de la commission des Lois, a repris ces arguments à l’Assemblée nationale, critiquant « la démagogie » et les « textes d’opinion » des Républicains, tout en mettant en avant l’inefficacité de la réforme de 2018. Certains membres du bloc central partagent également ce scepticisme de fond. Un influent membre de Renaissance a confié à 42mag.fr la nécessité de tempérer les débats sur la nationalité, indiquant que l’enjeu demeure de nature diplomatique concernant les relations avec les Comores.