L’ancien chef d’État a été à nouveau entendu par le tribunal correctionnel ce mercredi. Lors de cette audience, il a nié toute implication dans le processus d’extraction de l’ancien directeur de cabinet de Mouammar Kadhafi.
Un retour à la réalité pour Nicolas Sarkozy
L’ancien président Nicolas Sarkozy, confronté à la réalité de sa situation de justiciable, peine à comprendre les raisons de son implication dans l’affaire présumée de financement libyen de sa campagne électorale de 2007. Alors que le procès est en cours depuis un mois, il a exprimé son incrédulité à la barre le mercredi 5 février, en déclarant : « Je suis quelque peu fatigué de devoir me défendre contre des accusations de financement, alors qu’on me dit que des preuves existent aux quatre coins du globe sans jamais m’en montrer une seule. »
Ce qui est en jeu, entre autres, ce sont les supposés « 70 cartons de cassettes d’enregistrements de Mouammar Kadhafi », mentionnés par un témoin le jeudi précédent, mais jamais retrouvés. En haussant le ton et gesticulant, Sarkozy s’insurge : « Si une seule conversation entre Kadhafi et moi existait quelque part, elle aurait déjà fait le tour du monde en un nombre incalculable de copies ! ». Quant à son implication supposée dans la fuite discrète de France de Bechir Saleh en 2012, ex-directeur de cabinet du régime libyen, geste supposé avoir été fait pour le réduire au silence selon l’accusation, Sarkozy fait valoir sa logique habituelle : « Pourquoi aurais-je voulu faire partir quelqu’un qui était catégorique sur le fait que le document de Mediapart – concernant le financement de la campagne – était un faux ? Il était dans mon intérêt qu’il demeure en France ! »
Des indices et des témoignages
Alors que la présidente énonce divers témoignages libyens et autres « révélations » suggérant un tel financement, Sarkozy persiste à souligner son scepticisme : « Après dix ans d’enquête, je m’attendais à ce qu’il y ait plus que le récit de discussions entre Libyens que je n’ai jamais rencontrés ! » Avec tranquillité, la présidente lui rappelle : « N’oubliez pas que la preuve peut être construite par un faisceau d’indices, combinant divers éléments dont des témoignages. » Les juges d’instruction, dans leur décision de renvoi, avaient également noté que « affirmer qu’une preuve définitive du pacte de corruption est inexistante ne constitue pas un argument suffisant pour invalider l’ensemble de la procédure. »
Sarkozy admet, sur un ton conciliant : « Bien sûr qu’il y a un ensemble d’indices. » Pourtant, il ajoute : « Mais lorsqu’on parle d’un financement de plusieurs dizaines de millions d’euros, il serait vraiment judicieux d’en retrouver la trace dans ma campagne ou dans mes biens. Comment peut-on faire disparaître tout cela ? », s’interroge-t-il en levant les épaules. « Personne n’y comprend rien », conclut-il, suscitant des sourires dans l’audience, en allusion au titre d’un documentaire de Mediapart sur cette affaire. Le tribunal a encore plusieurs semaines pour faire lumière sur cette situation complexe et a commencé à examiner, dès mercredi soir, les transactions financières qui, selon l’accusation, matérialisent le prétendu pacte de corruption.