Le 15 juin 1998, le procureur général rattaché à la cour d’appel de Pau avait émis un signalement initial. À ce moment-là, cela faisait déjà un an que François Bayrou avait cessé d’occuper ses fonctions de ministre de l’Éducation nationale.
Entre 1998 et 2000, trois rapports écrits ont été envoyés à Élisabeth Guigou, alors ministre de la Justice, pour la mettre en garde contre une possible affaire majeure au sein de l’établissement catholique Notre-Dame-de-Bétharram, d’après des documents obtenus par France Télévisions le mardi 18 février.
François Bayrou, accusé d’avoir eu connaissance des faits de violence physique et sexuelle dans cette institution dans les années 90 sans avoir pris de mesures, voire d’avoir dissimulé l’affaire, a rejeté mardi ces allégations et a riposté en tournant ses critiques vers le gouvernement dirigé par Lionel Jospin.
« Le procureur général a informé la Chancellerie de ces affaires à quatre reprises durant l’année 1998. Il a pris contact par téléphone le jour de l’incarcération et a suivi par trois correspondances écrites, expliquant la gravité de la situation », a affirmé François Bayrou à l’Assemblée. Le premier rapport du procureur général auprès de la cour d’appel de Pau a été envoyé le 15 juin 1998. À ce moment-là, François Bayrou n’était plus ministre de l’Éducation nationale depuis un an, son successeur étant Claude Allègre.
Une exposition détaillée des faits
Dominique Rousseau, procureur de Pau, se référant également à une conversation téléphonique antérieure du 26 mai 1998 sur le même sujet, écrit à la garde des Sceaux pour expliciter les événements ayant abouti à la mise en examen et à l’arrestation de l’ancien directeur de l’institution, le père Carricart, accusé par un ancien élève d’agressions sexuelles répétées et de viols.
« Actuellement, l’enquête n’a porté que sur les accusations d’une seule personne, mais le plaignant a mentionné d’autres incidents susceptibles d’avoir été commis par des enseignants et religieux sur différents élèves », indique le magistrat, ajoutant que « l’enquête devra clarifier ces allégations ». Le procureur justifie ce rapport par la notoriété régionale de l’institution et par « l’émotion » provoquée par l’arrestation de son ancien directeur.
Cette lettre est suivie par une autre, datée du 23 décembre 1998, qui fait le point sur la situation en indiquant qu’une « commission rogatoire est en cours pour auditionner de nombreux anciens élèves de l’établissement ». Puis, le 8 février 2000, le procureur rédige un nouveau courrier, quelques jours après le suicide à Rome du père Carricart, mis en cause par un autre ancien élève. Dans cette correspondance, il souhaite « informer des derniers développements de cette procédure, qui pourraient lui conférer un certain retentissement médiatique, aussi bien au niveau local que national ».