Clément Beaune, qui occupe le poste de haut-commissaire chargé de la stratégie et du plan, est venu répondre aux questions de Jean-Baptiste Marteau lors de l’émission « 4V » diffusée sur France 2, le mercredi 23 juillet.
Ce passage correspond à un extrait de la transcription du reportage présenté ci-dessus. Pour voir la vidéo complète, cliquez sur celle-ci.
Jean-Baptiste Marteau : Vous avez été député de Paris et restez très investi dans la vie politique de la capitale. Rachida Dati a été renvoyée devant le tribunal correctionnel, elle a fait appel et conteste les accusations portées contre elle. Partagez-vous l’appel de nombreux élus parisiens qui demandent sa démission ?
Clément Beaune, haut-commissaire à la stratégie et au plan : Non, elle s’est déjà exprimée à ce sujet. Il me semble également que le président de la République a indiqué qu’il ne souhaitait pas cela. Par ailleurs, il existe une procédure judiciaire en cours, et il ne m’appartient pas d’interférer dans ce domaine. En revanche, je pense qu’il est fondamental que chacun respecte certains principes. Lorsqu’on occupe une fonction publique, un ministère, on ne doit pas s’en prendre aux juges ni remettre en cause leur indépendance.
Nous ne sommes pas aux États-Unis à la manière de Trump, mais bien en République française. Il est impératif d’honorer des principes de confiance et de respect de l’autonomie de la justice. En tant que citoyens justiciables, nous possédons des droits, bien entendu, mais aussi des devoirs, particulièrement quand on exerce une fonction politique. Je dirais donc qu’il faut faire preuve de retenue et ne pas exacerber le débat.
Pensez-vous qu’elle adopte des attitudes proches du trumpisme ?
J’ai entendu des paroles très dures envers la justice et les magistrats. Défendre ses droits est légitime, mais il est encore plus important, voire nécessaire, de respecter la justice.
Rachida Dati peut-elle représenter le centre pour les élections municipales de 2026 ?
Pour ma part, cet épisode ne modifie en rien ma position. Je persiste à penser que le centre politique doit affirmer ses valeurs, son projet et son identité à Paris. Rachida Dati a soutenu Laurent Wauquiez lors de la récente primaire, ce qui est son droit, mais il existe un parti qui s’appelle Renaissance et un bloc central rassemblant Horizon et le Modem. J’aimerais voir cette famille politique porter et défendre son projet dans la capitale.
Prévoyez-vous de vous investir pour ces municipales ? Quand annoncerez-vous votre position ?
Nous prendrons une décision collective en septembre. Mais pour être clair, je souhaite m’impliquer. J’ai été élu à Paris, j’y ai aussi connu une défaite, mais je ne suis pas du genre à renoncer. S’engager, c’est s’investir sur le long terme. Je jouerai donc un rôle actif, loin d’être un simple spectateur.
Une élection législative partielle aura également lieu à la rentrée à Paris, probablement opposant Michel Barnier pour les LR à Rachida Dati. Quelle sera votre position ?
Je me mets dans la peau des habitants de Paris qui assistent à une scène assez désolante. J’ai beaucoup de respect pour Michel Barnier, homme digne et modéré. Pour le reste, on assiste à un spectacle et un débat qui se dégradent, avec une certaine incompréhension. C’est quelque peu illisible. Il vaut mieux laisser retomber la tension […] et ne pas chercher à compliquer davantage la situation.
Donc, vous ne souhaitez pas soutenir publiquement un candidat face à ce duel entre Michel Barnier et Rachida Dati ?
Je me positionne ici en tant que citoyen parisien. Ce que je vois est franchement navrant. Il faut laisser les choses se clarifier, et on jugera ensuite. Il est inutile de distribuer des noms ou des anathèmes dans le débat parisien. Les Parisiens, plus qu’ailleurs en France, aspirent à de la modération, de la dignité, de la décence.
Bruno Retailleau prend ses distances avec Emmanuel Macron dans une interview virulente. Dans Valeurs Actuelles, le ministre de l’Intérieur a déclaré que le macronisme n’était « ni un mouvement politique, ni une idéologie » et qu’il « alimente l’impuissance ». Pensez-vous qu’on puisse rester ministre tout en critiquant aussi vivement le président ?
Encore une fois, certains principes devraient être simples : quand on est nommé par le président de la République, on ne s’en prend pas à lui. C’est un fondement de notre constitution et de notre esprit démocratique.
En tant que ministre, on doit respecter l’institution présidentielle. On peut avoir des désaccords et exprimer différentes sensibilités, mais le respect de la fonction est essentiel. Sinon, le débat public part complètement en vrille. On ne peut pas, chaque matin, accuser les juges ou le président d’agir à tort.
Le président de la République est une personne et une institution. Il a été élu deux fois. Affirmer que ce courant politique serait éphémère ou sans valeur témoigne d’un manque de discernement et d’un irrespect grave.
Clément Beaune, en tant que haut-commissaire à la stratégie et au plan, votre rôle est de penser sur le long terme. Est-ce possible alors que la priorité actuelle est de dégager 40 milliards d’économies dans le prochain budget ?
C’est indispensable. Le gouvernement et le ministère des Finances ont élaboré un budget, présenté par le Premier ministre, qui est ambitieux, difficile mais nécessaire. Notre mission est de réfléchir aux grandes tendances budgétaires, comme celles liées à la démographie. Notre société vieillit, ce qui posera d’immenses défis pour nos comptes sociaux ainsi que pour les systèmes éducatif et sanitaire. Aurons-nous suffisamment de soignants, de militaires, d’enseignants ? Ces questions à moyen et long terme sont cruciales, c’est notre rôle d’y réfléchir et de proposer des solutions.
Il y a le budget 2026, mais aussi les années qui suivront. Honnêtement, l’effort ne porte pas que sur 2026, il devra s’étendre sur les cinq à dix prochaines années. Des réformes structurelles sont nécessaires. Certaines sont déjà engagées par le Premier ministre, comme la réforme de l’assurance chômage ou les discussions sociales qu’il a souhaitées. Ce n’est pas qu’un plan d’austérité, mais bien un projet de transformation, notamment pour simplifier l’organisation administrative et revoir certaines dotations de l’État. En effet, les collectivités locales représentent en France 20 % des dépenses publiques, une part qui augmente rapidement alors que cela n’est pas le cas dans d’autres pays européens. Ces sujets profonds doivent donc être abordés.
Cliquez sur la vidéo pour visionner l’entretien complet.