Mardi, les chefs d’État russe et français ont échangé pendant plus de deux heures, renouant ainsi un dialogue interrompu depuis septembre 2022. Leur conversation a abordé plusieurs thèmes, en particulier le conflit en Ukraine, mais c’est surtout la question du programme nucléaire iranien qui a dominé les échanges. Ce dossier, très sensible, pourrait servir de terrain commun propice à un rapprochement entre Paris et Moscou.
La conversation a donc repris quasiment au même point où elle s’était interrompue. Près de trois ans après leur dernier échange, qui portait sur la centrale nucléaire de Zaporijjia en Ukraine, Emmanuel Macron et Vladimir Poutine ont renoué le contact mardi 1er juillet, partageant une inquiétude commune autour de la question nucléaire, cette fois centrée sur l’Iran.
Après une coupure des communications depuis septembre 2022, un entretien de plus de deux heures s’est finalement tenu entre l’Élysée et le Kremlin. Le futur du programme nucléaire iranien semble avoir déclenché cette reprise des discussions interrompues entre les deux chefs d’État. Deux présidents à la tête de nations siégeant au Conseil de sécurité des Nations unies et possédant l’arme nucléaire.
Ce dialogue survient pile une semaine après l’entrée en vigueur d’un fragile cessez-le-feu entre Israël et l’Iran, alors que le régime de Téhéran menace désormais de se retirer du Traité de non-prolifération nucléaire et envisage d’interdire totalement les inspections de l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) sur son sol.
Éviter de laisser les États-Unis seuls aux commandes du dossier iranien
Malgré les menaces de Donald Trump visant à détruire les installations nucléaires iraniennes, le doute reste entier quant à la capacité de l’Iran à progresser dans son programme atomique. Sur cette question, Paris et Moscou défendent une voie diplomatique, convergeant dans l’objectif d’empêcher Téhéran d’acquérir la bombe nucléaire. Cela constitue un rapprochement circonstanciel, face à une approche unilatérale de Washington dans ce dossier. Ni la France ni la Russie ne veulent que les États-Unis monopolisent la gestion de ce dossier, et l’Élysée souhaite rappeler que l’Europe doit aussi peser dans les négociations. Alors que les relations sont tendues entre Emmanuel Macron et Benjamin Nétanyahou, la Russie détient une position plutôt équilibrée entre Israël et l’Iran et maintient une capacité d’échange avec les deux parties.
Ces derniers jours, Vladimir Poutine a même tenté de se positionner comme un médiateur potentiel dans cette affaire, une idée aussitôt rejetée par Donald Trump. Lors de son entretien avec Emmanuel Macron, le président russe a réitéré son appui au développement d’un programme « nucléaire civil » iranien, tandis que Paris souhaite étendre les discussions « à la question des missiles iraniens » ainsi qu’à la stabilité régionale, selon les indications de l’Élysée.
Des divergences profondes sur la situation en Ukraine
La conversation a également abordé la question ukrainienne, où les positions des deux dirigeants se sont révélées radicalement opposées, probablement irréconciliables. Emmanuel Macron a réaffirmé « le soutien sans faille de la France à la souveraineté et à l’intégrité territoriale de l’Ukraine« , tandis que Vladimir Poutine a adopté un discours habituel, accusant les pays occidentaux d’être responsables du conflit et réclamant un accord de paix « à long terme« , reposant sur les « nouvelles réalités territoriales« . En clair, cela signifie obtenir une reconnaissance de la présence russe sur les 20% du territoire ukrainien sous contrôle de ses forces.
Paris a précisé avoir informé Volodymyr Zelensky de cette prise de contact, mais la décision de rompre le silence avec Moscou, lourde de significations, a indéniablement suscité débats en interne à l’Élysée. En choisissant de renouer le dialogue, Emmanuel Macron fait le choix de la voie diplomatique, mais reconnaît en même temps la position de force de Vladimir Poutine. Il remet ainsi le président russe dans le jeu, comme Donald Trump l’avait fait auparavant, alors que le Kremlin n’a pas abandonné un seul centimètre de terrain dans le dossier ukrainien, et que l’armée russe intensifie ses bombardements en Ukraine avec une vigueur inédite depuis plusieurs semaines.