Le collectif baptisé « Bloquons Tout » appelle à des manifestations sur l’ensemble du territoire, et les responsables politiques ne s’y trompent pas quant à la signification de ce signal. À gauche, les réactions se succèdent, chacun apportant son propre point de vue sur le phénomène. Quant au pouvoir exécutif, il préfère minimiser l’ampleur et l’enjeu de ce mouvement.
Le 10 septembre s’impose comme une échéance marquante dans l’agenda des décideurs politiques du pays. Pour certains, elle fait sourire et nourrit l’appétit, tandis que d’autres l’abordent avec inquiétude ou apathie. Sur les réseaux sociaux, les appels à tout bloquer se multiplient, et certains réclament même un confinement du pays, sans qu’on sache aujourd’hui vraiment à quoi s’attendre ni à quoi va ressembler cette journée.
Une chose est certaine, la gauche ne veut pas laisser passer l’occasion. Jean-Luc Mélenchon, animé par l’objectif de s’imposer comme figure centrale à gauche pour 2027, saute sur l’occasion pour ne pas se laisser dépasser, comme lors des épisodes des “gilets jaunes”. La France insoumise se met au service et se met à disposition de ce mouvement, quitte à essuyer les critiques de récupération politique. Officiellement, LFI s’aligne sur l’ensemble des mots d’ordre de cette contestation bigarrée, qui appelle à manifester, à vider son compte en banque ou encore à exiger la démission d’Emmanuel Macron et au rejet du budget élaboré par François Bayrou.
Un mouvement indépendant et apartisan ?
L’écologiste Sandrine Rousseau a lancé jeudi 21 août sur 42mag.fr un appel au peuple: que la population se lève et que la colère du pays puisse s’exprimer sans retenue. Pourtant, ce mouvement semble aussi susceptible d’être récupéré par l’extrême droite. Bien qu’il ne possède pas de leader identifié et qu’il s’organise en dehors des partis et des syndicats, il bénéficie du relais de plusieurs figures d’extrême droite sur les réseaux sociaux. L’objectif pour une partie de la gauche est d’être fidèle à sa mission: accompagner et soutenir des mouvements de contestation dans l’espoir d’y trouver un relais, un soutien solide et une certaine légitimité pour mener une action politique, et, dans un second temps, viser François Bayrou à l’automne.
Le risque, c’est que l’initiative échoue et que le mouvement se dissipe. D’abord parce que l’appui de Mélenchon peut devenir pesant, attirer des attaques et le dévaloriser politiquement. Rappelons que ce mouvement se veut indépendant et sans appartenance partisane. Ensuite, l’idée même d’agréger des colères disparates — cheminots, chauffeurs de taxi, etc. — n’est pas toujours efficace. Par ailleurs, les syndicats restent méfiants et se réuniront la semaine prochaine pour décider de leur position. Cette dimension floue, cette ambiguïté, c’est une carte que joue en coulisses le gouvernement qui, officiellement, ne s’inquiète pas, minimise et relativise. Soit c’est complètement irresponsable, soit, par anticipation, un coup de génie. Mais c’est bien là le type de pari risqué qui anime les débats.