Lors de son passage en tant qu’invité politique sur La Matinale, mardi 5 août, Éric Michoux, député UDR représentant la 4e circonscription de Saône-et-Loire, dresse le bilan de son parti, fondé par Éric Ciotti en août 2024, après les élections législatives.
À la suite de la décision d’Emmanuel Macron de dissoudre l’Assemblée nationale, Éric Ciotti (à l’époque président des Républicains) et Marine Le Pen avaient tenté de mettre en place une « Alliance des droites », à l’image de l’alliance de la gauche menée par le NFP. Le choix de Ciotti de s’allier avec le Rassemblement National avait provoqué une onde de choc sur la droite. Il a alors quitté LR pour créer l’UDR (Union des Droites Républicaines). À l’été 2025, il convient pour lui et ses députés, dont Éric Michoux, de faire le point: que retenir de l’année écoulée pour l’UDR et ses partenaires du RN ?
Ce texte est la retranscription d’une partie de l’entretien ci-dessus. Pour voir l’intégralité de l’échange, cliquez sur la vidéo.
Alexandre Peyrout : À quoi sert exactement l’UDR au fond ?
Éric Michoux : Vous avez raison, cela fait plus d’un an et nous avons pour mission de porter une voix qui s’inscrit dans un gaullisme moderne. Un gaullisme qui considère que la France doit préserver son autonomie, afficher sa force et lutter contre ce qui pousse à l’exclusion, tout en plaçant l’entreprise au cœur de l’action publique. Notre vraie singularité réside dans l’importance que nous accordons au monde entrepreneurial, à la volonté d’entreprendre et à la liberté d’entreprendre. Nous estimons que l’esprit d’entreprise est l’élément le plus déterminant.
C’est ce qui vous distingue aujourd’hui de vos partenaires du Rassemblement National ?
Oui, exactement. En réalité, si l’on observe les programmes des principaux groupes, beaucoup convergent sur les mêmes axes: mieux protéger la sécurité, augmenter le pouvoir d’achat, réviser les politiques migratoires. Notre signature, c’est la dynamisation de l’esprit d’entreprise et le renforcement de l’économie, car on ne peut pas redistribuer des richesses qui n’ont pas été créées.
La réforme des retraites
Pensez-vous avoir des différences avec le parti de Marine Le Pen sur ce chapitre ? On voit bien que sur la réforme des retraites, les positions divergent. Le RN veut abroger la réforme, alors que vous, à l’UDR, vous envisagez une trajectoire différente.
Nous ne cherchons pas à « aller plus loin » dans le sens d’un durcissement sans limite. Nous partons du constat du vieillissement de la population, qui existe, et qui appelle peut-être à reporter davantage l’âge de départ ou à le réorganiser autrement. Il existe d’autres voies possibles. L’idée n’est pas de repousser encore plus l’âge de départ de manière brutale, mais d’envisager une transition graduelle: par exemple débuter autour de 62 ans, puis progresser par paliers (par exemple 6 mois, puis 3 mois) afin d’assurer une transmission des compétences entre les générations. On peut avoir des cadres et des professionnels de 60 ans ou plus qui restent actifs et apportent leur énergie et leur savoir-faire.
Rien n’empêche certains de poursuivre l’activité s’ils en ressentent le besoin.
C’est une approche pour aborder le sujet: travailler, c’est souvent créer de la richesse. Peu importe le mécanisme retenu, ce n’est pas le principe même qui compte, mais la faisabilité et l’adaptation. En revanche, imposer une rupture nette à 60 ans, ou 62 ans, sans prendre en compte les réalités du terrain, n’est pas acceptable. Il faut aussi tenir compte de la pénibilité de certains métiers. Par exemple, un maçon, un artisan ou un boulanger ayant travaillé toute sa vie mérite une retrainte adaptée et éventuellement un départ anticipé; beaucoup d’entre eux sont très usés. Il s’agit donc d’ajustements qui tiennent compte de l’âge et des structures économiques du pays.
Inéligibilité de Marine Le Pen
Dans les textes que vous avez proposés à l’UDR figure le débat sur l’inéligibilité et l’exécution provisoire, portés par votre patron Éric Ciotti. Est-ce que vous assumez avoir envisagé une sorte de grâce envers Marine Le Pen ?
Non, il ne s’agit pas d’une grâce. Aujourd’hui, elle n’est pas condamnée et peut faire appel.
Elle avait été condamnée en premier ressort.
Voilà, elle n’est pas condamnée pour l’instant; elle est considérée comme présumée innocente. Les textes le reflètent. L’exécution provisoire a, en revanche, posé problème, car elle rend inéligible une femme qui, aujourd’hui, bénéficie du soutien d’une partie des Français, autour de 40 %.
Ce n’est pas parce qu’un sondage montre une opinion qu’elle est jugée innocente pour autant.
Oui, mais ce n’est pas là le sujet. Nous ne sommes pas chargés de juger; ce n’est pas notre rôle. Le Conseil constitutionnel s’est d’ailleurs prononcé et a éclairé ce qui était reproché à Marine Le Pen, en cassant certaines positions des trois magistrats initiaux.
Les recours déposés par Marine Le Pen n’ont pas abouti, notamment devant la Cour européenne des droits de l’homme.
Effectivement, mais permettez-moi de répondre quand même: Marine Le Pen a été condamnée par trois juges avec l’application immédiate des peines, alors qu’un fait remonte à près d’une décennie et ne saurait se reproduire dans les mêmes conditions. De plus, nous sommes confrontés à la question des rapports entre l’action d’un attaché parlementaire et l’action du parti: à partir de quel moment ce dernier agit-il pour le compte du député ou pour le parti lui-même ? Tous les partis sont confrontés à ce dilemme (LFI devra d’ailleurs y répondre bientôt) et l’affaire Bayrou a été évoquée comme référence, sans que le jugement ne soit catastrophique pour lui.
Ce n’était pas les mêmes montants.
Peu importe le montant; ce qui importe, c’est l’acte et les faits. Ce n’est pas une question de somme, que ce soit 1 euro ou 1 milliard…
Je ne suis pas sûr que tout le monde partage votre point de vue sur l’influence.
Non, un milliard, ce serait énorme. Mais ce que je souhaite dire, c’est qu’elle n’est pas jugée coupable à ce stade. En l’empêchant d’aller jusqu’au bout, on porte atteinte à celle qui était largement soutenue par les Français, et cela pose une question démocratique essentielle.
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