Jeudi à Paris, la « Coalition des volontaires » a donné son accord au déploiement de contingents militaires visant à dissuader Moscou d’engager de nouvelles attaques en cas d’arrêt des combats. La question du soutien américain demeure en suspens, tandis que Vladimir Poutine menace de viser les troupes alliées potentiellement présentes sur le sol ukrainien.
Faire bloc. Vingt-six pays appartenant à la « Coalition des volontaires », majoritairement européens, ont pris l’initiative jeudi 4 septembre, lors d’un sommet à Paris, de soutenir militairement l’Ukraine sur le terrain, en mer ou dans les airs, dans le cadre d’un éventuel cessez-le-feu avec la Russie. Le Kremlin a, pour sa part, rejeté vendredi toute garantie militaire occidentale envers son voisin, et Vladimir Poutine a même évoqué l’existence de « cibles légitimes » si des forces alliées venaient à être déployées. Entre « force de réassurance », « filet de sécurité américain » et sanctions économiques… Franceinfo fait le point sur ce sommet et les garanties de sécurité qui ont été validées.
Renforcer la dissuasion: déployer une présence militaire pour prévenir une nouvelle agression russe
Lors de ce rassemblement de la « Coalition des volontaires » tenu à l’Élysée et en présence de Volodymyr Zelensky, 26 États alliés de l’Ukraine — parmi lesquels la France, le Royaume‑Uni, l’Allemagne et l’Italie, mais aussi le Canada, l’Australie et le Japon — ont discuté des mesures de garanties militaires qu’ils pourraient offrir à Kiev. La coalition s’est « formellement engagée » à « déployer, à titre de force de réassurance, des troupes en Ukraine ou à être présents sur le sol, en mer ou dans les airs », a annoncé le président de la République lors d’une conférence de presse, « le jour où le conflit s’arrêtera ». Cette option était à l’ordre du jour depuis la rencontre du 18 août à la Maison‑Blanche entre Donald Trump, Volodymyr Zelensky et les Alliés européens.
Cette mission de réassurance « se déploiera dans le cadre d’un cessez‑le‑feu – pas sur la ligne de front, mais dans des zones en cours de délimitation – et elle vise à prévenir toute nouvelle agression majeure », a précisé le chef de l’État. L’objectif est de dissuader la Russie d’en venir à une nouvelle attaque. Il ne s’agit pas « d’engager une guerre contre la Russie », a-t-il insisté.
Si l’on n’a pas encore de détail sur les contributions de chaque État, Emmanuel Macron a assuré que l’Allemagne, l’Italie et la Pologne figuraient parmi les partenaires « contributeurs importants » du dispositif, sur un total de 26 pays. La Première ministre italienne Giorgia Meloni a, pour sa part, réaffirmé à l’issue de la réunion — co‑animée par le président et le Premier ministre britannique, Keir Starmer — que l’Italie n’enverrait pas de troupes en Ukraine. De son côté, l’Allemagne privilégierait une participation au renforcement du bouclier anti‑aérien ukrainien et à l’équipement des forces terrestres, selon des informations obtenues par l’AFP auprès de sources gouvernementales. Le président Macron a aussi évoqué brièvement la possibilité d’un renforcement de l’armée ukrainienne.
Des incertitudes autour du ‘filet de sécurité’ américain
Les dernières semaines ont vu l’Allemagne, l’Italie et la Pologne exprimer des réserves sur un engagement direct, conditionnant leur participation à un « filet de sécurité » robuste offert par les États‑Unis. Derrière ce terme, on parle de garanties qui pourraient revêtir plusieurs formes — renseignement, soutien logistique, communications — mais excluant toute présence au sol des troupes américaines, Trump’s ayant écarté cette option. Le soutien ou « backstop » américain était au cœur d’une visioconférence avec Joe Biden après le sommet, à laquelle participait aussi l’émissaire américain Steve Witkoff. Aucune annonce n’a été faite à ce sujet. « Nous comptons sur le filet de sécurité des États‑Unis », a répété Volodymyr Zelensky lors d’une conférence de presse.
Dans un message publié ensuite sur Facebook, Zelensky a évoqué diverses options, dont la plus importante demeure la pression par des mesures fortes, notamment économiques, et la protection maximale du ciel ukrainien. Macron a assuré que le « soutien américain » à ces garanties de sécurité pour Kiev serait finalisé « dans les prochains jours » et que les Américains avaient été « très clairs » sur leur participation. « Il n’y a pas de doute sur ce sujet », a-t-il insisté. Une forme de clause de protection, puisant directement dans l’esprit de l’article 5 du traité de l’Otan, avait été évoquée en août.
De nouvelles sanctions économiques envisagées contre la Russie et ses alliés
Le sommet parisien a aussi été l’occasion pour les Européens de réaffirmer leur détermination à pousser Moscou vers des négociations. Le Royaume‑Uni a ainsi estimé « nécessaire d’augmenter la pression » sur Vladimir Poutine, qui, selon Londres, poursuit ses offensives et bloque toute perspective de paix. Emmanuel Macron a aussi assuré que les Européens prendraient de nouvelles sanctions « en lien avec les États‑Unis » si Moscou persistait dans son refus de négocier. Il a évoqué un effort commun avec Washington pour cibler les pays qui soutiennent l’économie russe ou qui aident Moscou à contourner les sanctions. À ce titre, la Chine a été évoquée, sans que des détails supplémentaires ne soient apportés.
Les Européens réclament ces mesures américaines depuis plusieurs mois, sans obtenir gain de cause jusqu’à présent. Trump, se déclarant « très déçu » par Poutine, avait prévenu mercredi qu’il pourrait y avoir « quelque chose » si la Russie ne répond pas sur le chemin de la paix. Zelensky a aussi souligné que l’Europe s’approvisionnait encore en pétrole russe et a cité la Slovaquie et la Hongrie, annonçant par ailleurs qu’il aurait prochainement un nouvel entretien téléphonique avec des dirigeants européens et avec Donald Trump.
Le Kremlin s’oppose fermement à ces garanties de sécurité et Vladimir Poutine menace explicitement
La réponse officielle du Kremlin ne s’est pas fait attendre. Vendredi matin, la Russie a opposé son veto à toute garantie militaire occidentale en faveur de l’Ukraine. « Les étrangers, en particulier les contingents militaires européens et américains, peuvent-ils garantir la sécurité de l’Ukraine ? Absolument pas, ils ne le peuvent pas », a déclaré Dmitri Peskov, porte‑parole du Kremlin, à l’agence Ria Novosti, soulignant que Moscou devait aussi bénéficier de garanties pour sa propre sécurité. Il a en outre accusé les Européens d’« entraver » le règlement du conflit.
Poutine, lors d’un Forum économique de l’Est à Vladivostok, a averti: « Si des forces, quelles qu’elles soient, y mettent les pieds, surtout alors que des combats font toujours rage, nous considérerons qu’elles constituent des cibles légitimes ». Et s’il venait à être décidé d’aboutir à une paix durable, il a ajouté qu’il ne voyait pas de sens à leur présence sur le territoire ukrainien.
La perspective d’une rencontre directe entre la Russie et l’Ukraine avait aussi été évoquée le 18 août lors du sommet à la Maison Blanche. Zelensky a déclaré que ce n’était pas une question de désir mais de nécessaire, affirmant que la Russie fait tout pour retarder les discussions. Selon lui, les partenaires américains auraient transmis que Vladimir Poutine l’avait invité à Moscou; le président ukrainien a toutefois refusé, tout en ajoutant que si la Russie commençait à évoquer une rencontre, ce serait déjà un premier pas.