Après plusieurs semaines d’incertitudes, c’est finalement le nom de la présidente du groupe Renew au Parlement européen qui a été privilégié. Pour certains observateurs, il s’agit d’une sélection plutôt par absence d’une meilleure alternative, alors que d’autres saluent le professionnalisme de celle qui va représenter la majorité prochainement.
A-t-on affaire à un « excellent choix » ou peut-être un choix de dernier recours ? La majorité au pouvoir rend public de manière officielle, ce jeudi 29 février, le candidat principal consacré à la campagne des élections européennes, qui auront lieu en France le 9 juin. Tandis que la plupart des autres groupes politiques ont désigné leur candidat principal depuis quelques semaines déjà, le parti présidentiel a finalement opté pour l’eurodéputée Valérie Hayer, d’après les retours de 42mag.fr. Elle affrontera une lourde tâche pour combler l’écart de Renaissance, qui accuse un retard de 5 à 10 points derrière le Rassemblement national selon les études d’opinion.
Avant de se décider pour Valérie Hayer, l’Elysée a examiné plusieurs profils plus populaires, tels que l’ancien ministre des Affaires étrangères Jean-Yves Le Drian ou l’ancien ministre de l’Agriculture Julien Denormandie. Les deux ont refusé. Stéphane Séjourné, qui dirige le groupe Renew au Parlement européen, un moment pressenti, a été écarté suite à sa nomination au ministère des Affaires étrangères au début du mois de janvier. C’est finalement l’eurodéputée de 37 ans, douzième de la liste macroniste en 2019, qui a été désignée. Un choix de dernière minute selon un conseiller ministériel, qui craint que la majorité ne « nomme quelqu’un juste pour essuyer une défaite ».
Un profil de « travailleuse acharnée » appréciée au Parlement européen
Valérie Hayer présente toutefois des avantages, défendent ses partisans. « C’est une femme, elle est énergique et jeune », dévoile le député Renaissance de la Moselle Ludovic Mendes. Caractérisée comme une « travailleuse acharnée », « capable de dialoguer avec tout le monde », elle est aussi née dans une famille d’agriculteurs, un passé jugé opportun en plein contexte de crise agricole. Ancienne élue du département de la Mayenne, « elle est fermement ancrée dans son terroire, mais possède également un vaste réseau européen », indique le député Renaissance de la Haute-Savoie Antoine Armand.
Son nom n’est peut-être pas familier pour la plupart des Français, mais il est bien connu parmi ses collègues du Parlement européen. Elle a ainsi pris la tête du groupe Renew en janvier, lorsque Stéphane Séjourné a été nommé au ministère des Affaires étrangères. « Elle maîtrise parfaitement ses dossiers, ainsi que ses adversaires, ce qui est essentiel pour mener une campagne », note l’eurodéputée Renaissance Laurence Farreng. « Ce n’est en aucun cas un choix de dernier recours. Elle a travaillé pendant cinq ans, c’est ce qui la distingue des autres candidats », approuve l’eurodéputée Nathalie Loiseau, qui avait mené la campagne en 2019.
Un danger d’affaiblissement « dès le début »
Quelques membres de la majorité expriment cependant leurs préoccupations concernant le manque de notoriété de la future candidate. « Être fille d’agriculteurs, ça ne suffira pas comme argument à son profit… C’est son nom qui sera inscrit sur les bulletins et elle qui va représenter la majorité lors des débats », met en garde un conseiller ministériel. « À part [le candidat du RN] Jordan Bardella, connait-on les noms des autres candidats aux européennes en dehors du cercle politique habituel ? », se demande Ludovic Mendes. « Elle donne l’impression d’être une bourgeoise macroniste », décoche un autre conseiller de l’exécutif, qui doute de la capacité de la candidate principale à attirer des voix au-delà du cercle des électeurs traditionnels d’Emmanuel Macron. La majorité avait-elle une autre alternative ? « Valérie Hayer, c’est le moins pire de tous, elle incarne au moins sa position de députée européenne », fustige, mécontent, le conseiller ministériel.
Au-delà de la popularité de l’eurodéputée, certains macronistes sont préoccupés par ce départ en campagne tardif. « C’est une femme sympathique qui connaît les sujets, mais tout ceci a pris beaucoup trop de temps à se concrétiser », se désole un stratège de la majorité.
« Il y a un risque qu’elle soit affaiblie dès le départ, en se disant : ‘Ce n’était pas le premier choix’. »
Un stratège de la majoritéà 42mag.fr
Valérie Hayer a encore trois mois pour se faire connaître davantage. « Elle n’est pas reconnue du grand public, mais ça viendra », tempère Nathalie Loiseau qui rappelle qu’elle avait, elle, « été désignée en mars » en 2019.
Elle ne défendra pas seule les valeurs de la majorité. Le président de la République et le Premier ministre Gabriel Attal ont l’intention de s’engager dans la campagne, assurent les membres de la majorité. « Le Président a déjà commencé à s’impliquer sérieusement, directement, personnellement dans la campagne, indique par la suite un député Renaissance. Les enjeux – sécurité européenne, unité des États membres, protection de nos citoyens et de nos intérêts agricoles, industriels – sont trop cruciaux. »
La future candidate principale a d’ailleurs été en compagnie d’Emmanuel Macron au Salon de l’agriculture le samedi 24 février. Elle a été aperçue, derrière le président, alors qu’il répondait aux questions des agriculteurs. Peut-on en déduire une ébauche de la future stratégie de campagne ? « Il y a clairement une forme de sexisme, qui prétend que lorsque une femme est en responsabilité, il y a forcément quelqu’un derrière elle », réplique Nathalie Loiseau, qui rappelle que « les figures importantes de la majorité seront forcément présentes lors de la campagne ».