L’auteur-compositeur-interprète Charles Aznavour aurait eu 100 ans mercredi. Un géant de chanson françaisel’artiste franco-arménien à l’origine de « La Bohème » et « Elle » a marqué durablement la musique en France.
Aznavour avait de grands projets pour son centième anniversaire.
« J’ai arrêté de fêter mes anniversaires à 50 ans. J’ai dit à mes amis : la prochaine fois, ce sera à 100 ans, j’ai tout mon temps », a-t-il déclaré à RTL, à l’occasion de ses 90 ans, en mai 2014.
Le chanteur prévoyait même un concert d’adieu spectaculaire, a-t-il déclaré le même mois.
« J’ai fixé la date. Ce sera le 22 mai 2024 », a-t-il annoncé lors d’un discours spécial pour les présidents français et arménien à Erevan.
« Tu seras là, j’espère. »
Ils ne l’ont pas fait : Aznavour est décédé d’un arrêt cardiaque soudain quatre ans plus tard, le 1er octobre 2018.
Il a eu droit à des funérailles nationales suivies par près d’un téléspectateur français sur deux, où le président Emmanuel Macron l’a déclaré « l’un des visages de la France ».
Du clown au croner
Le parcours d’Aznavour vers la célébrité nationale était loin d’être évident.
Né à Paris de parents arméniens le 22 mai 1924, il grandit en jouant du piano et en écrivant des chansons avec sa sœur.
Il a commencé à jouer comme acteur à l’âge de neuf ans et s’est ensuite tourné vers la danse, le vaudeville et l’acrobatie dans des music-halls et des cabarets.
Petit et athlétique, avec un nez proéminent et des sourcils épais et obliques qui lui donnaient un air triste en permanence, il semblait plus adapté au rôle de clown que de crooner.
Mais il a trouvé un partenaire musical dans le pianiste Pierre Roche et une mécène en Edith Piaf, qui a aidé le duo à obtenir leurs premières réservations en France puis au Canada (et a également convaincu Aznavour de se faire opérer du nez).

Il s’est lancé seul dans les années 1950, écrivant alors des chansons aussi peu conventionnelles que son apparence.
« J’ai écrit des chansons parce que personne ne voulait écrire pour moi », a-t-il déclaré dans une interview accordée à 42mag.fr en 2005. « Je ne savais pas que j’en étais capable. »
S’inspirant de son passé théâtral, il a incarné des personnages qui couvraient toute la gamme de l’expérience humaine, d’un alcoolique aigri dans « Je Bois » à un artiste drag gay dans « Comme Ils Disent ».
« Je chantais sur des sujets dont personne ne parlait avant », raconte Aznavour à 42mag.fr, se souvenant de la façon dont il a bousculé les conventions musicales.
« Je savais qu’un jour, ils comprendraient. Et cela a pris du temps, mais toute idée forte prend du temps. »
À la fin des années 1960, il avait sorti une série d’albums à succès, joué dans de nombreux films et donné une performance légendaire au Carnegie Hall de New York, sous le regard de Bob Dylan, qui a déclaré qu’Aznavour « m’a fait exploser la cervelle ».
Mais s’il était autrefois à la pointe de la technologie, il devint plus tard un grand-père respecté. chanson françaisecontinuant à interpréter ses numéros les plus connus devant des foules du monde entier.
« J’écris de manière très classique. Et je n’ai pas honte de dire que je me fiche de ne pas être à la page », confiait-il à 42mag.fr en 2005.
« J’étais à la page il y a 40 ou 50 ans. Je ne suis pas à la page, mais j’écris beaucoup mieux qu’à l’époque. »
À 81 ans, Aznavour écrivait encore des chansons « à chaque instant, quand j’ai cinq minutes, quand j’ai une idée », disait-il.
« Mais je jette plus que je ne garde. »

La seule chose qu’il n’écrirait pas, cependant, était une fin.
« La fin doit arriver. Je ne peux pas l’écrire, enfin, je n’aime pas l’écrire », a-t-il déclaré à 42mag.fr en réponse à une question sur ses mémoires photographiques. Images de Ma Vie (« Images de ma vie »).
« J’aimerais avoir un livre sans fin, et une vie sans fin. Au moins quelques décennies de plus. »
Il a vécu près d’une décennie et demie et a laissé derrière lui quelque 1 400 chansons en neuf langues.
Au lieu d’un concert d’adieu, le 100e anniversaire d’Aznavour sera marqué par des concerts, un coffret de 100 disques de ses enregistrements complets, un timbre commémoratif en France et une pièce de monnaie en édition spéciale en Arménie.
Paris a également rebaptisé une partie des jardins des Champs-Élysées en son honneur.
Un biopic sur le chanteur, avec l’acteur français Tahar Rahim, devrait sortir en octobre.