Emmanuel Macron n’a pas encore révélé l’identité de la personne qui occupera le poste de Premier ministre. Cela constitue un défi majeur, car il existe une appréhension concernant la possibilité de devoir immédiatement affronter une motion de censure, laquelle pourrait être appuyée par le Rassemblement National et le Nouveau Front Populaire.
Le poste de Premier ministre à Matignon est toujours vacant en ce matin du jeudi 5 septembre, et le rôle du Rassemblement national (RN) dans cette décision semble désormais essentiel. Emmanuel Macron a même dû appeler Marine Le Pen mardi soir pour discuter des candidatures de Bernard Cazeneuve et Xavier Bertrand. Cependant, la dirigeante de l’extrême droite française a clairement fait savoir que ses députés rejetteraient les deux noms proposés, les considérant comme des adversaires politiques du RN. Bien qu’il ait subi une défaite sévère au second tour des législatives et qu’il ait été exclu des postes de responsabilité au sein de l’Assemblée nationale, le RN retrouve une position centrale dans les discussions. Marine Le Pen voit dans cette situation une forme de revanche, pouvant exercer une influence décisive sur le choix du prochain chef du gouvernement grâce au poids de son groupe parlementaire.
La possibilité d’une motion de censure
Le RN a pu retrouver cette importance en raison des erreurs stratégiques de ses opposants. La défaite du parti lépéniste aux législatives et sa marginalisation à l’Assemblée s’expliquent par une coalition entre le Nouveau Front populaire, les macronistes et LR, qui ont formé un front républicain pour battre le RN dans les urnes et le tenir à l’écart au Palais-Bourbon. Ce front républicain, bien qu’efficace lors des élections, a échoué à se transformer en majorité parlementaire stable et en gouvernement. Ainsi, les 126 députés du RN, ainsi que leurs 17 suppléants ciottistes, deviennent incontournables pour toute décision majeure. En conjonction avec les 193 élus du Nouveau Front populaire, ils ont la capacité de censurer tout Premier ministre issu de la droite. Mercredi, cela a propulsé sur le devant de la scène le maire LR de Cannes et président de l’AMF, David Lisnard. Solide sur les sujets régaliens, en bons termes avec Éric Ciotti, ennemi du RN mais sans contentieux personnel avec Marine Le Pen, il apparaît comme un des rares politiciens capables, du moins temporairement, d’éviter la censure du RN.
Tant que les autres forces politiques resteront incapables de s’unir, les députés du RN auront toute latitude pour provoquer la chute du gouvernement à leur guise. Ils pourraient par exemple espérer une nouvelle dissolution en juin prochain. Cependant, ce pouvoir de nuisance comporte des risques pour Marine Le Pen. Un abus de cette force, en censurant plusieurs Premiers ministres consécutifs, pourrait donner l’impression aux électeurs que le parti d’extrême droite cherche avant tout à maintenir le désordre.