Lors de deux allocutions concises, l’ancien et le nouveau Premier ministre ont échangé leur rôle dans une atmosphère solennelle mais non conflictuelle.
La Transition de Pouvoirs à Matignon : Un Rituel Bien Rodé
Pour la troisième fois cette année, le passage de relais à Matignon suit un protocole familier. Le nouvel occupant des lieux fait son entrée dans la cour, marche sur un tapis rouge avant de monter les escaliers où l’attend son prédécesseur. Vendredi 13 décembre, François Bayrou s’est exprimé brièvement, esquissant les axes principaux de sa future mission alors qu’il se prépare à constituer son gouvernement. Certains membres de l’équipe précédente, présents parmi l’assistance, espèrent peut-être poursuivre leur engagement ministériel dans les domaines de l’Intérieur ou de l’Éducation, que ce soit Bruno Retailleau ou Anne Genetet.
Un « Chemin Inédit » vers la Réconciliation : Une Condition sine qua non
Conscient des défis qui l’attendent, le nouveau Premier ministre a reconnu l’ampleur de sa tâche dans un discours de 10 minutes. Il a exprimé sa lucidité face aux obstacles en affirmant : « Je sais que la probabilité de rencontrer des difficultés est bien plus grande que celle de réussir. Je ne sous-estime pas l’ampleur de l’Himalaya qui nous fait face. Je suis conscient de tout cela et je crois qu’il faut essayer. » Ancien haut-commissaire au Plan, François Bayrou aspire à découvrir un « chemin inédit » vers la réconciliation, qu’il considère comme crucial pour assurer la pérennité de son gouvernement.
Le jour du 13 décembre, François Bayrou a fait une référence au roi Henri IV, qu’il qualifie d’ »ami », et s’est comparé à ce souverain qui tenta de rapprocher catholiques et protestants à la fin du XVIe siècle. « Il a forgé sa relation avec la France dans des circonstances bien plus difficiles que les nôtres. Si je le peux, je m’efforcerai aussi d’œuvrer à cette réconciliation essentielle. À mon sens, il n’y a pas d’autre voie vers le succès. »
Donner des Chances : Une Priorité pour François Bayrou
François Bayrou a évoqué deux préoccupations majeures. « La première est le fossé qui s’est creusé entre les citoyens et les instances de pouvoir. » Il a également affirmé que « donner des chances à ceux qui n’en ont pas » est un « devoir sacré ». Cette promesse fait partie intégrante du programme de Macron en 2017, un engagement que Bayrou soutenait déjà et qui pourrait résonner dans les milieux de gauche.
En dépit de leur âge similaire – tous deux ont 73 ans – François Bayrou n’a pas cherché à se démarquer de Michel Barnier, avec qui il partage des engagements anciens pour l’Europe, comme mentionné par son prédécesseur. Ils ont également collaboré au sein du mouvement des Rénovateurs à la fin des années 1980, un groupe de députés RPR et UDF souhaitant renouveler la droite.
Michel Barnier : Une Fierté Revendiquée d’Avoir Remis l’État en Mouvement
Dans une rétrospective des trois mois à Matignon, Michel Barnier a dressé le bilan de sa courte période au gouvernement. « Nous avons ouvert de nombreux chantiers, » a-t-il déclaré. À défaut de présenter des résultats concrets, Barnier a mis en avant sa démarche, prônant « une politique autrement, sans bruit médiatique, avec de l’écoute et moins de paroles, » ainsi que ses objectifs : « Nous avons remis l’État en marche, » tout en évoquant les difficultés rencontrées : « Je savais dès le début que la durée de mon gouvernement était limitée. »
Il a aussi évoqué l’épisode du budget, qui lui a coûté sa position. « Nous étions proches d’un compromis équitable, notamment au Sénat. Ce déficit budgétaire persiste, malgré la motion de censure. » Michel Barnier a conclu sur une note d’avertissement : « Notre pays traverse une situation sans précédent et sérieuse, » insistant sur le besoin national de « calme, dignité et réconciliation. » Cette mission délicate ne relève désormais plus de sa responsabilité.