Richard Ferrand n’a pas seulement une « connaissance limitée en droit », mais sa « neutralité » pourrait être remise en cause, souligne le spécialiste en droit constitutionnel sur France Inter.
Richard Ferrand, selon le constitutionnaliste Benjamin Morel, ne serait pas « un choix judicieux » pour diriger le Conseil constitutionnel, comme il l’a affirmé le mardi 11 février sur France Inter. Emmanuel Macron a annoncé la veille son intention de proposer l’ancien président de l’Assemblée nationale, un de ses alliés proches, pour succéder à Laurent Fabius à la tête du Conseil.
Le maître de conférences à l’université Paris Panthéon-Assas, Benjamin Morel, observe que « le parcours juridique n’est pas très solide » concernant Richard Ferrand. Il le compare à Jean-Louis Debré, qui avait été président de l’Assemblée nationale mais possédait également un doctorat en droit et une carrière de magistrat, ce qui représente une expertise distincte dans le domaine du droit constitutionnel.
Morel souligne que le contexte entourant cette suggestion de nomination est particulièrement préoccupant. Il constate que « l’État de droit est plus fragile, plus contesté que jamais, avec la possibilité d’une arrivée au pouvoir d’une extrême droite et une remise en question généralisée de l’État de droit, tant à l’intérieur de la France qu’à l’étranger ».
« Un doute planera même sans fondement »
Dans ce climat, « sans l’installation d’une figure d’autorité incarnant l’impartialité, le danger est que beaucoup voient l’État de droit comme un outil pour museler la démocratie, poussant à s’en défaire », déclare-t-il. Il avertit contre une possible « ‘trumpisation’ de la politique vis-à-vis de l’État de droit si l’institution n’est ni forte ni légitime, situation aggravée par certaines nominations. »
« Il n’est pas question de remettre en cause Richard Ferrand en tant que personne », précise-t-il. « Le véritable problème réside dans notre besoin d’une perception d’impartialité dans ce contexte global. » « Pour que la société ait foi dans l’État de droit, le juge doit inspirer une impartialité visible. Cependant, nommer un proche de l’actuel chef de l’État, surtout en vue d’examiner des questions importantes comme celle de la potentielle éligibilité de Marine Le Pen en 2027, ou lorsqu’il s’agit du Conseil constitutionnel comme arbitre durant la présidentielle, cela génère forcément une suspicion, un doute. Même infondé, ce doute s’ancrera dans le public et affaiblira cette institution essentielle qu’est le Conseil constitutionnel. »
En dehors de la question des compétences dont Ferrand pourrait manquer, Benjamin Morel insiste sur l’importance que « les juges choisis soient véritablement des figures susceptibles d’unir un minimum de consensus. »