Samedi, Bruno Retailleau a exprimé son intention de quitter le gouvernement si la France décidait de ne pas maintenir une pression sur l’Algérie. L’objectif est de persuader ce pays d’accepter le retour de ses citoyens présents illégalement sur le sol français. La coopération momentanée entre le Premier ministre et le ministre de l’Intérieur est basée sur des intérêts partagés mais précaires.
Bruno Retailleau, chef de file sur des dossiers sensibles
Le ministre de l’Intérieur, Bruno Retailleau, est actuellement en première ligne sur des questions complexes telles que le trafic de drogue. Il se trouve également au centre de l’attention sur d’autres sujets pressants, notamment la crise des relations diplomatiques entre la France et l’Algérie et la mise en œuvre des OQTF envers les migrants en situation irrégulière. Sur ces sujets brûlants, Bruno Retailleau est très actif, cherchant à capter l’attention et à influencer le débat. Il fait entendre sa voix distinctement dans les médias, exprime ses indignations et énonce ses conditions. Cela l’amène parfois à empiéter sur les compétences de certains confrères, comme Gérald Darmanin à la Justice ou Jean-Noël Barrot aux Affaires étrangères, parfois même en remettant en question la primauté présidentielle concernant les accords de 1968 avec l’Algérie – ce qui lui a valu un rappel à l’ordre de l’Élysée. Retailleau s’appuie sur l’opinion publique pour renforcer sa position au sein du gouvernement, prônant par exemple un « rapport de forces avec l’Algérie », selon ses propos rapportés le 15 mars par Le Parisien-Aujourd’hui en France. Il n’hésite pas à insinuer qu’il pourrait démissionner si ses demandes ne sont pas satisfaites.
Cette approche présente des risques. Bien que réellement populaire dans les sondages, Retailleau pense, pour le moment, être à l’abri des retombées négatives. Il use de son autorité même au sein du gouvernement, comme en témoigne son rappel à l’ordre de la ministre des Sports, Marie Barsacq, qu’il critique pour avoir déclaré que le port du voile n’était pas nécessairement synonyme d’« entrisme » dans le milieu sportif. Cette intervention tranche avec l’attitude de François Bayrou, Premier ministre, qui préfère parfois laisser certaines ambiguïtés s’installer pour mieux naviguer dans le tumulte gouvernemental. La question de savoir si cette alliance tiendra repose sur une interrogation : lequel des deux, Retailleau ou Bayrou, a le plus besoin de l’autre ?
Éviter l’image d’un ministre seulement en paroles
La réponse à cette question n’est pas simple. Bien qu’il paraisse essentiel au fonctionnement du gouvernement, Bruno Retailleau n’a pas le contrôle absolu du calendrier politique. Quitter son poste avant le 17 mai, date du congrès des militants du parti LR, reviendrait à concéder la victoire à son concurrent, Laurent Wauquiez, et à conforter Marine Le Pen dans sa critique, selon laquelle Retailleau ne représenterait que « des mots et du vent ». En outre, la situation géopolitique, renforcée par la menace russe et l’affaiblissement de Donald Trump, complique davantage les défis du ministre de l’Intérieur.
Actuellement, Bruno Retailleau n’est plus au centre de toutes les attentions. L’incertitude quant à la longévité du duo Bayrou-Retailleau provient de sa nature même : une alliance temporaire, fondée sur des intérêts communs fragiles. C’est un mariage de convenance, similaire à ceux que le ministre de l’Intérieur critique lorsqu’ils concernent des étrangers.