Ce jeudi, Bruno Retailleau a partagé un compte rendu sur ses six mois à la tête du ministère de l’Intérieur, mettant l’accent sur ses réussites personnelles à l’approche de l’élection pour la présidence des Républicains, prévue en mai. En parallèle, Laurent Wauquiez, faisant office de « challenger », se montre plus extrémiste dans ses positions, déterminé à tout mettre en œuvre pour prendre l’avantage.
Le 10 avril, Bruno Retailleau a organisé une conférence de presse pour passer en revue ses six mois à la tête du ministère de l’Intérieur. Cet exercice d’autocongratulation semblait quelque peu prématuré. En effet, six mois ne représentent pas une période très longue à Beauvau. En comparaison, si on se réfère aux termes des anniversaires de mariage, cela équivaut aux « noces de tulle », un tissu délicat et translucide, qui n’offre pas la solidité que symbolisent les « noces de coton » célébrées après un an.
Toutefois, Bruno Retailleau est un homme prompt à agir. Son esprit est tourné vers une échéance cruciale se profilant dans six semaines à peine : les militants de LR se prononceront les 17 et 18 mai pour élire leur nouveau président. Face à Laurent Wauquiez, un adversaire redoutable, Retailleau souhaite exploiter pleinement son avantage principal de ministre de l’Intérieur. Ce rôle l’a propulsé dans les sondages, lui conférant une stature de présidentiable crédible. Bruno Retailleau n’hésite pas à se complimenter pour les récents succès enregistrés par la droite lors de plusieurs élections législatives partielles. En matière de communication, qui mieux que lui-même peut prôner ses réussites? Il a donc saisi l’occasion de mettre en avant ses efforts dans la lutte contre la criminalité, le trafic de drogue et l’immigration illégale.
La stratégie plus décontractée de Laurent Wauquiez
Malgré tout, sa position est loin d’être aussi solide qu’il n’y paraît et son concurrent pour le leadership des Républicains, Laurent Wauquiez, joue de cette situation. Selon Wauquiez, Retailleau serait prisonnier des contraintes de ce gouvernement que le chef des députés LR est supposé soutenir. De manière surprenante, Bruno Retailleau a même admis le 10 avril : « Demain, si nous avions le pouvoir, nous pourrions réaliser tellement plus… ». Cela souligne les limites de son approche essentiellement basée sur une communication intense, parfois excessive. Comment maintenir la crédibilité quand les objectifs annoncés sont trop ambitieux ? Il l’a appris à ses dépens avec le dossier algérien. Ayant menacé de quitter son poste s’il n’obtenait pas satisfaction sur le rapatriement des ressortissants sous OQTF et après avoir réclamé une révision des accords de 1968, il a dû temporiser lorsque Emmanuel Macron a rétabli les liens avec le président Tebboune pour apaiser les tensions avec Alger.
Laurent Wauquiez, quant à lui, se trouve dans une situation plus facile : celle du « challenger » sans enjeu imminent, ce qui lui permet de s’aventurer dans des propositions audacieuses, sans s’encombrer de considérations pratiques. Cette semaine, il a illustré cette approche en proposant de déplacer les étrangers sous OQTF à une distance de 4 300 kilomètres de la métropole, vers Saint-Pierre-et-Miquelon. Cette proposition a même suscité des moqueries de Marine Le Pen. Tel un candidat capable de tout oser pour capter l’attention, Jacques Chirac disait autrefois : « Je vous surprendrai par ma démagogie ». Nicolas Sarkozy avait, quant à lui, l’habitude de faire des déclarations fracassantes. Il n’est pas certain que l’audace de Wauquiez soit la clé du succès.