L’organisation non gouvernementale Médecins du monde, ainsi que la Fédération addiction – un collectif français réunissant divers organismes et experts spécialisés dans le domaine de l’addictologie – expriment leur inquiétude quant à la possible fermeture des salles de consommation à moindre risque de drogue d’ici la fin de l’année.
Deux organisations, Médecins du monde et la Fédération Addiction, ont pris la décision de poursuivre le gouvernement devant le tribunal administratif. Elles souhaitent que soient pérennisées deux initiatives pilotes concernant des lieux spécifiques de consommation de drogue à moindres risques, comme l’a annoncé ce lundi 14 avril France Inter. L’association Médecins du monde et la Fédération Addiction, qui rassemble en France des structures et des spécialistes dans le domaine de l’addictologie, s’interrogent sur l’avenir de ces lieux de consommation : « Les salles de consommation de drogue à moindres risques vont-elles devoir fermer ? » Ces associations préfèrent éviter l’utilisation du terme « salles de shoot », qu’elles jugent péjoratif et inapproprié.
« Une efficacité démontrée »
Les deux projets en question ont démarré en 2016 à Strasbourg et à Paris, à proximité de la gare du Nord. Leur terme est prévu pour le 31 décembre prochain, ce qui cause des inquiétudes chez Médecins du monde et la Fédération Addiction. Ces lieux permettent « une consommation de drogue sous la supervision de professionnels de santé et de travailleurs sociaux » et aident à « réduire les consommations en extérieur ». Selon plusieurs rapports, y compris ceux des instances gouvernementales, ces structures « ont démontré leur efficacité » et « ont contribué à faire reconnaître la réduction des risques comme une véritable politique de santé publique ».
La salle de consommation située à Paris, près de l’hôpital Lariboisière, accueille quotidiennement 250 personnes qui viennent s’injecter des substances sous supervision. Cet encadrement vise à sécuriser la consommation des usagers de drogue. « C’est une initiative qui préserve des vies », affirme Élisabeth Avril, médecin et directrice de Gaïa, l’association responsable du site à Paris. « En 2024, on a enregistré 79 000 injections dans cet espace, ce qui implique que ces actes ne se sont pas déroulés dans des lieux non appropriés comme des cages d’escalier ou entre des véhicules, comme avant l’existence de la salle », ajoute-t-elle.
« Rendre les salles permanentes »
Ces lieux de consommation, aussi appelés « HSA » pour Haltes Soins Addictions, « ne doivent pas rester de simples tests », selon Médecins du monde et la Fédération Addiction. « Ils doivent devenir une partie intégrante et durable du système de santé en France. Il est impératif d’assurer un accès sans condition aux droits et soins adaptés pour les personnes consommatrices de drogues, en garantissant la législation des HSA. C’est une question de dignité humaine et de santé publique », peut-on lire dans un communiqué annonçant la procédure intentée contre l’État. Bien que les HSA soient « toujours en phase d’essai jusqu’en décembre 2025, aucune garantie de continuité n’est assurée. Au contraire, certaines décisions récentes, comme le refus d’une nouvelle HSA à Marseille, laissent entendre une volonté de réduire la portée de ce dispositif », est-il aussi mentionné.
Les rapports des inspections générales de l’administration et des affaires sociales mettent en exergue les bénéfices pour l’ensemble de la communauté que ces structures apportent, souligne Céline Debeaulieu de Médecins du monde. Son organisation a donc décidé de poursuivre l’État afin de leur assurer un maintien. « Éviter des hospitalisations, empêcher la contamination par des maladies comme le VIH, c’est une réduction des dépenses pour la société entière », argumente-t-elle.
En parallèle, Médecins du monde, accompagnée de l’association AIDES, dépose un nouveau recours à Marseille où le préfet s’est opposé à l’inauguration d’une autre salle de consommation à moindres risques.