Aucune institution ne félicite les propositions de réductions de dépenses budgétaires avancées par François Bayrou, bien que les avis varient quant à la manière d’aborder ce projet. Les différentes parties doivent se réunir en fin de semaine afin d’évaluer la situation.
Les propositions budgétaires de François Bayrou pour réaliser 43,8 milliards d’euros d’économies en 2026 n’ont pas du tout été bien accueillies par les syndicats, alors que le projet sera examiné à l’automne prochain. Dès la fin du discours alarmant du Premier ministre mardi 15 juillet, les portes-paroles des travailleurs n’ont pas caché leur mécontentement, voire leur colère, vis-à-vis des choix budgétaires présentés par le gouvernement : l’instauration d’une année blanche pour les retraites et les prestations sociales, la diminution des effectifs dans la fonction publique, ainsi qu’une refonte du système d’assurance chômage.
La CGT a tout de suite montré son opposition farouche à la suppression envisagée de deux jours fériés, notamment celui du 8 mai, qu’elle a qualifiée de message « extrêmement grave » selon les propos de Sophie Binet rapportés à l’AFP. « Cette année, nous serons sur sa route pour empêcher ces régressions inacceptables », a-t-elle affirmé lors d’un entretien sur 42mag.fr mardi soir. « Nous invitons tous les salariés consternés par ces annonces à rejoindre un syndicat et à s’organiser dans leurs entreprises pour que nous puissions agir collectivement à la rentrée », a-t-elle ajouté dans une interview donnée à RTL mercredi matin.
Analyser les réactions des différents acteurs
Depuis mardi, de nombreux responsables syndicaux se succèdent dans les médias pour exprimer leur désaccord avec ce plan budgétaire focalisé sur une baisse des dépenses publiques. « Les efforts demandés doivent être équitables et partagés. Ici, ce sont principalement les salariés et les retraités qui sont sollicités, tandis que les entreprises ne sont pas mises à contribution », a ainsi dénoncé Cyril Chabanier, président de la CFTC, sur BFM Business. La CFTC fait partie des cinq syndicats dits représentatifs aux côtés de la CGT, de la CFDT, de FO et de la CFE-CGC.
Rapidement, la question d’une réaction collective s’est posée à ces organisations : comment exercer suffisamment de pression sur François Bayrou et son gouvernement avant que le Parlement ne débatte et vote ce budget, attendu début octobre ? Dans cette optique, les dirigeants des cinq syndicats mentionnés prévoient une rencontre « d’ici la fin de la semaine », a indiqué jeudi Marylise Léon, la dirigeante de la CFDT, dans un entretien accordé au Monde. « Ce sera l’occasion d’échanger nos analyses de la situation, comme nous le faisons depuis 2022 », précise-t-elle, reprenant la même position que Frédéric Souillot, le secrétaire général de FO.
« L’objectif est de réfléchir ensemble à une riposte commune possible et de coordonner, le cas échéant, nos actions face au gouvernement. »
Frédéric Souillot, secrétaire général de Force ouvrièreau « Monde »
Dans l’attente de « voir où chacun se positionne dans ce contexte », selon Luc Mathieu, secrétaire national de la CFDT, les syndicats restent prudents quant à la forme que prendra leur mobilisation à la rentrée. La CGT a annoncé à 42mag.fr que ses instances seront réunies en début de semaine prochaine afin de définir une stratégie pour les semaines à venir, au-delà de l’appel à la « mobilisation » lancé par Sophie Binet.
Des échanges prévus avec le gouvernement
La CFDT, de son côté, ne prône pas encore une mobilisation d’envergure contre le projet budgétaire. Interrogée jeudi matin sur France Inter sur l’éventualité d’une grève générale, Marylise Léon a expliqué que « c’est pour l’instant le moment du dialogue, nous allons ouvrir des espaces pour discuter et peser afin de faire reculer certaines mesures ».
Avant d’aller plus loin, le syndicat réformiste souhaite d’abord mieux cerner les détails du plan de François Bayrou afin d’organiser sa réponse. « Il faut comprendre les tenants et aboutissants, et faire passer le message que cette voie n’est pas appropriée », analyse Luc Mathieu. Même si la CFDT marque une pause durant le mois d’août, « une dizaine de jours restent pour travailler » et pour rencontrer les ministères afin de « clarifier » les intentions du gouvernement pour 2026.
« Il faut toujours rester optimiste, car il est possible que les choses évoluent. Pour cela, il faut faire des propositions. »
Luc Mathieu, secrétaire national de la CFDTà 42mag.fr
Cette prudence dans les modalités d’action ne diminue pas la détermination à dénoncer un budget qualifié de « mise inacceptable en jeu » par Marylise Léon, qui a averti Paris : « Fin août, début septembre, la CFDT n’exclut pas une mobilisation. C’est l’une des options possibles. » La CFE-CGC manifeste également une vive opposition. « Une réponse collective à ces attaques scandaleuses pourrait s’avérer indispensable, et il serait alors très compliqué pour mon organisation de ne pas y prendre part », a affirmé François Hommeril, leader du syndicat des cadres, auprès du Monde.
Des syndicats en opposition quand le patronat se montre satisfait
Malgré ces critiques plus ou moins virulentes, la réaction du patronat contraste nettement avec celle des syndicats. Patrick Martin, président du Medef, a salué jeudi les annonces budgétaires comme un facteur de « visibilité » pour les entreprises. « Nous sommes globalement satisfaits des déclarations du Premier ministre et d’autres membres du gouvernement », a déclaré le dirigeant lors d’une conférence tenue dans les locaux du Medef. Il espère par ailleurs que « les débats parlementaires ne viendront pas perturber ce cadre. »
Du côté des syndicats, c’est une toute autre stratégie qui prévaut : ils veulent influencer les responsables politiques et les législateurs afin d’empêcher l’adoption d’un budget qu’ils jugent trop sévère. La CFDT prévoit notamment de mener « un travail auprès des parlementaires », excepté ceux du Rassemblement national, pour faire accepter une version plus supportable pour les Français en 2026. Le combat ne fait que commencer : « Il reste un long chemin entre aujourd’hui et le vote final du budget », conclut Luc Mathieu.