À Matignon, Sébastien Lecornu demeure énigmatique. Entre les réserves des socialistes et les frictions qui secouent la majorité, sa manière de rechercher un compromis se déploie dans l’incertitude, alors que les jours à venir pourraient peser sur l’orientation du gouvernement.
Cette extrait provient d’une portion de la transcription du reportage présenté ci-dessus. Cliquez sur la vidéo pour suivre l’intégralité du reportage.
On présente souvent Sébastien Lecornu comme le chef du gouvernement le plus fragilisé de la Cinquième République. Lorsqu’il s’agit de révéler ses choix, une certaine brume plane encore sur sa stratégie. Que vise-t-il vraiment, en définitive ?
Pour nombre d’observateurs, ses intentions demeurent floues. Un parlementaire centriste résume le sentiment: « À Matignon, il paraît à l’écoute, son chien gambade autour de lui, et pourtant il ne dit mot sur ses plans. »
L’entretien accordé le 27 septembre au Parisien, censé clarifier sa trajectoire et apaiser les socialistes, a, au contraire, freiné leurs attentes et balayé bon nombre de propositions portées par l’opposition. « C’est du n’importe quoi. Je ne vois pas comment on pourrait trouver une porte d’entrée avec lui », fulmine un élu socialiste. Olivier Faure ajoute lors d’un entretien: « Si rien ne bouge, les mêmes mécanismes reviendront, et nous opposerons des obstacles. »
Frictions internes et concessions recherchées au sein de la coalition
Même dans son propre socle politique, la méthode et la précipitation de Lecornu commencent à irriter. « Comment engager le dialogue sans fermer définitivement la porte au PS ? » s’interroge un député Modem. Mais d’autres soulignent que tout n’est pas joué: il n’y aura ni taxe Zucman ni ISF, « et pourtant, on voit bien des marges de manœuvre entre les lignes », affirme un parlementaire.
De son côté, Laurent Saint-Martin, ancien ministre chargé du commerce extérieur et des Français de l’étranger, plaide pour le compromis: « Il nous faut accentuer les efforts pour que la culture du compromis et une forme de coalition se renforcent en France. »
« Il faut faire en sorte que le PS ait l’impression de pouvoir arracher quelque chose », poursuit un autre responsable, « notamment sur la fiscalité des plus riches. » Pour un haut responsable de Renaissance, le premier geste de Matignon a été trop « rapide »: « Céder deux jours fériés sans contrepartie était une erreur; il faut garder des cartes dans la manche pour négocier. »
Un proche d’Édouard Philippe se montre également dubitatif: « Il y aura des concessions faites au PS, c’est certain, mais jusqu’où ira-t-on ? C’est toujours la question de la taille du chapeau à avaler, pour eux et surtout pour nous. »
Un ministre sortant voit une autre priorité: « Il faut surtout renouer avec la CFDT pour pousser le PS à s’engager. »
La semaine prochaine sera déterminante, entre nouvelles consultations, mobilisations et reprise des travaux parlementaires. Et pour l’instant, aucun gouvernement n’a encore été formé.