À l’occasion de la Journée consacrée à la filière automobile qui se tient mardi à Paris, les professionnels du secteur demandent le report de l’interdiction de vendre des voitures neuves à moteur thermique, prévue en 2035, ou, à défaut, des ajustements du dispositif. Ils redoutent des pertes d’emplois qui pourraient atteindre des dizaines de milliers de postes.
Haro sur 2035 ! La filière automobile française met la pression mardi 4 novembre lors du grand rendez‑vous annuel du secteur, en pleine quatrième édition de la Journée dédiée à la filière automobile, qui se tient à la Cité des sciences et de l’industrie de La Villette, à Paris. Les participants semblent tous exiger le report de l’interdiction envisagée pour cette date concernant la vente de véhicules neufs à moteur thermique au sein de l’Union européenne.
Cette position s’explique par un pragmatisme assumé face à ce que certains assimilent au dogmatisme présumé de la Commission européenne. En Europe, les ventes de voitures électriques ne représentent encore que 16 % du marché. Et même si elles ont progressé, en octobre, à 24 % en France grâce au dispositif de leasing social mis en place par le gouvernement, l’objectif consistant à ne vendre que des modèles électriques en 2035 n’est pas tenable, affirme Luc Chatel, président de la Plateforme automobile, qui réunit constructeurs et équipementiers. « La réalité, c’est que, malgré des investissements importants, malgré les gigafactories dédiées aux batteries, malgré cette avancée remarquable, atteindre 100 % électrique en 2035, on n’y arrivera pas », soutient-il.
Cette position semble s’aligner sur celle des constructeurs allemands et de leur gouvernement, qui recherchent un report du calendrier imposé par la Commission. Et ce n’est pas Antonio Filosa, le dirigeant de Stellantis, issu de la fusion PSA-Fiat-Chrysler, qui contredirait cette approche. Lui aussi a pris la parole contre la règle de 2035.« Nous pensons réellement que les règles, ainsi que la manière dont Bruxelles les applique en Europe, sont mauvaises, » lance-t-il. Pas « imparfaites », mais « mauvaises ». Des propos largement applaudis par le millier de participants présents.
Un raz-de-marée de normes
Il n’existe pas de demande explicite de report au‑delà de 2035, mais plutôt une demande d’assouplissements des règles afin de permettre la poursuite de la commercialisation de certains modèles hybrides après l’échéance, notamment les gammes les plus imposantes et les véhicules utilitaires. Les constructeurs partagent toutefois l’idée que les petites voitures basculeront bientôt vers une motorisation entièrement électrique, même si cela suppose de s’inspirer largement des Chinois, actuellement en avance sur la technologie et la rapidité de conception des modèles.
François Provost, le nouveau directeur général de Renault, s’apprête à présenter d’ici la fin de la semaine une nouvelle version de la Twingo, partiellement dessinée en Chine. Il insiste surtout sur le poids des exigences réglementaires, jugées trop lourdes à ses yeux, et pas uniquement sur la décarbonation, ce qui, selon lui, a conduit à une hausse de 40 % du coût de fabrication d’une Clio entre la première génération et la sixième, lancée récemment. Et cela se répercute sur le prix de vente.
Provost appelle donc à une pause dans les normes réglementaires. « L’Union européenne a passé ces dernières années à accumuler un tsunami de normes, déplore-t-il. Au final, les conséquences, nous les connaissons : les consommateurs ne peuvent plus s’acheter de voiture, et, par conséquent, on constate la disparition progressive d’un certain nombre de segments, notamment les voitures compactes, qui constituent historiquement le poumon de notre industrie en Europe, et particulièrement en France. »
À terme, il y a aussi le risque de devoir fermer des sites de production et de réduire les effectifs. La Plateforme automobile anticipe ainsi jusqu’à 75 000 pertes d’emplois en France d’ici 2035, en partie liées à l’interdiction des moteurs thermiques.







