Les Amerloques sont et resteront les pionniers de la culture hip-hop mondiale, longtemps dominée par des artistes issus de la mainstream comme Dre (dont on attend toujours l’album), les « doggs », ainsi que d’autres talents peu connus du grand public comme Sean Price, Masta Ace et MosDef. Le rap US trouve lui aussi son « next level ». De nouveaux rappeurs ont fait leur apparition avec des styles bien précis. Certains sont même les protégés de vieux briscards du rap reconvertis dans la prod. L’occasion de vous faire (re)découvrir les 10 mecs qui ont changé le rap game aux États-Unis.
Putain, il est Canadien !
Drizzy n’est pas ricain et pourtant il sait poser ! Il a commencé en 2001 sans grand succès. À cette époque, il est plus connu pour ses talents d’acteur notamment pour le rôle de Jimmy Brooks dans Degrassi : la nouvelle génération. En 2006, il sort sa première mixtape qu’il publie sur son MySpace. Drake s’enflamme et ComeBack Season arrive l’année d’après, ce qui sera synonyme de tremplin pour celui dont les doutes se font sentir à propos de l’utilisation de l’autotune. En 2010, Thank me later sera la consécration en tant qu’artiste signé. On parlera même de « plus grande guerre d’offre de tous les temps ». La confirmation sera Take Care en duo avec Rihanna et Headlines. Aussi étonnant que cela puisse paraître, Drake a fortement été influencé par Aaliyah, aussi bien quotidiennement que musicalement, ce qui lui vaut sans doute le clivage léger dont il fait l’objet entre rap et R’n’B dans certains de ses morceaux, bien que les featuring du moment aient raison de cette réputation.
Rakim Mayers a.k.a. A$AP Rocky
Depuis le début de ses activités en 2007, A$AP s’est créé une place de choix dans la « next level ». En recherche capillaire, il a en revanche vite trouvé son style. Moultes sont les influences qui le corroborent et, en plus d’envoyer du bois, la liste est longue avec notamment Three 6 Mafia, Mobb Deep, Wu-Tang Clan, UGK, Run DMC et Bone Thugs-n-Harmony. Peso et Purple Swag sont les deux premières cartouches de sa première mixtape Live.Love.ASAP, qui lui ont valu la signature de deux contrats juteux à près de 3 millions de dollars. A$AP Rocky ou A$AP Rocky Balboa vues les punchlines qu’il a balancées avec son crew A$AP Mob, dont il reste le plus connu, avec notamment Ferg et Twelvy portant le même patronyme. Son rap est à l’image de ce qui l’a propulsé au rang du « mainstream » de la relève, avec des titres comme PMF Pussy Money Weed dans son premier album Long.live.A$AP. Certains rappeurs de son entourage font partie de la relève comme Drake et surtout Kendrick Lamar, tous deux en boucle sur nos ondes avec le single Fucking’ problem’s sur le dernier opus d’A$AP.
Le pur-sang de Dr Dre, K-Dot
C’est que Kendrick a mis du temps à décoller. Il a commencé en 2002 et c’est en 2012 qu’il sort son véritable album, Good Kid, M.A.A.D City, nommé disque d’or par RIAA. Il est évident qu’avec une production du créateur de la G-funk, K-Dot n’avait pas d’autre choix que de balancer de pures galettes. Son rap transpire ses influences, avec des noms comme Dr Dre bien sûr, tout deux natifs de Compton, Dj Quick, Jay-Z et Notorious Big. Mais curieusement, selon le site Complex.com, c’est 2Pac qui met les choses au clair avec Me Against The World, All Eyez On Me et Makaveli, qui fut « en rotation lourde en permanence sur la platine de mon père », déclare-t-il. K-Dot reste dans la lignée de ses influences et son dernier opus réunit tout ce qu’il faut : un phrasé hors du commun, des rimes à en couper le souffle, et ce sur une production grand cru. Il s’impose comme la relève du rap west coast.
Sombres et espiègles comme on les aime
OFWGKTA. Derrière ces sept lettres énigmatiques se cache l’un des groupes les plus subversifs de ces dix dernières années. Odd Future Wolf Gang Kill Them All, plus connu sous le diminutif d’Odd Future, ne cesse de prendre de l’ampleur à grands coups de clips licencieux et de références scabreuses à un tel point que leurs frasques les ont amenés à la sacro-sainte émission de Jimmy Fallon. Emmenés par un jeune et charismatique Tyler The Creator, ils sont dix, ont 20 ans ou plus et sont la bête noire des parents : ils ont pour but de montrer leur rage d’adolescent et de constamment provoquer les adultes en les mettant mal à l’aise. Il est vrai que sur le compte Twitter de certains membres du groupe, des phrases comme « If niggas ain’t mad at you, you’re doing something wrong » (si les gens ne sont pas furax contre toi, c’est que tu as fait un truc de travers) apparaissent. Plusieurs groupes sont également associés au collectif : MellowHype, The Jet Age of Tomorrow, The Internet et MellowHigh. Leur hip-hop alternatif s’inspire de RUN DMC, base du hip-hop sur tous les fronts. En 2010, le groupe signe un contrat avec RED Distribution pour créer leur propre label, Odd Future Records et en 2012 leur premier album studio The OF tape Vol 2 débarque. Le 23 août dernier, ils étaient en France au Trianon et ont créé la polémique concernant le temps passé sur scène. Certes, ils ont vendu leurs corps, mais au bout de trois quarts d’heure, la jeunesse effrontée du groupe était déjà cuite. Swaaaagggg !!!
Quelqu’un a dit pédale ?
Le californien Frank Ocean est homo. C’est vrai que, de prime abord ça ne saute pas aux yeux, surtout quand on évolue dans un groupe où les « fuck you faggot » sont comme de dire « nice » à tout va, pour les Ricains. C’est le seul membre du groupe OFWGKTA actif en solo avec Tyler. Franky a sorti deux mixtapes peu connues, The Lonny Breaux Collection et Nostalgia ultra, qui ont fait un bide presque parfait… Son influence majeure reste celle de son groupe mais il flanche quand même dans le R’n’B. Avec ses potes les baroudeurs voyous, il se fait un nom. Mais, ce nom, il se le fait surtout en faisant son coming-out en juillet 2012 sur son Tumblr dans une lettre ouverte. Cette lettre est également disponible dans son dernier album à succès Channel Orange. Ça aura mis le temps mais pour une pédale, il a porté ses couilles surtout dans le milieu et le pays dans lesquels il évolue.
Non, ce n’est pas Robbie mais Robert Williams
Le emcee* de Philadelphie, Meek Mill, encore inconnu du grand public il y a deux ans, a véritablement explosé en 2011. C’est naturellement que Rick Ross s’est empressé de le signer pour en faire sa première grosse prise de son label Maybach. Dopé par une notoriété ascendante, Meek Mill ne s’est pas jeté à l’assaut du rap jeu avec un album dès sa signature. C’est avec une mixtape que le rookie lance sa carrière dans la cour des vrais bonhommes avec Dreamchaser. Il parle de fric de suite, dans un label où Rozay est fanatique de dollars. Ses influences south sont clairement entendues dans ses morceaux. Chasseur de rêve si on en croit sa dernière mixtape, Meek Mill passe plus de temps à les réaliser qu’à les chasser. Ses influences auraient mérité, sans doute, un autre label mais l’appel du fric a été bien plus aguichant.
Tyga mais grand talent
Thank you god always se fait connaître grâce à son titre Coconut juice d’abord. No introduction est son premier album indépendant en 2008 après sa mixtape, sortie peu de temps en amont. Son talent est sûrement dû à son enfance à Compton, poudrière de nombreux MC dont Dre et Kendrick Lamar, cités précédemment. Tyga étudie minutieusement les paroles et rappe sur des instrus d’Eminem, de Cash Money Records, 2Pac ou Nas, et s’inspire beaucoup de Fabolous et Cam’ron. Parmi ses singles, Rack city Bitch inonde nos ondes, et ce Tyga s’offre même un feat avec Drake dans Still Got it. Il est reconnu dans son milieu pour son rap dit hard. Il fût même une figure du Crunk quand il atteint son paroxysme.
Action in the rap jeu
Action in the kitchen. Certains connaissent celui que l’on surnomme le « Rick Ross blanc » grâce à cette émission qu’il anime sur le web. Mais Bronsolini est un emcee. Un vrai. Action Bronson est vraiment fat physiquement et musicalement. C’est qu’il a lâché quelques galettes le cuisto, pas de bouffe mais bien musicalement. Dans Blue chips et Rare chandeliers, il réunit tout ce qu’on est en droit d’exiger d’un bon rappeur et d’un bon album de rap, c’est-à-dire le fond et la forme, le phrasé et des rimes bourrées de jeux de mots. La bouffe ? Son influence majeure, d’où il puise son inspiration. Le mieux dans tout ça, c’est la tête qu’il garde fermement sur les épaules. Même depuis sa signature avec le label Vice, sa dernière mixtape Rare Chandeliers est disponible en téléchargement gratuit sur un site de Vice. Bronson est connu et reconnu pour les concerts qu’il donne. Le dernier s’est tenu le 12 décembre dernier. Le cuisinier de renom a tout donné sur scène comme si la fin du monde était imminente. Il n’hésite pas à sauter dans la fosse et à stopper son concert pour des pauses photos quand même ! Un concert avec ce gros-là, ça fait perdre des calories, je vous le dis, moi.
18 berges mais bonhomme
Joey Bada$$ (aussi écrit Joey Badass) a 18 ans et est déjà grand. Il est rappeur et producteur à la fois. Le natif de Brooklyn ne perd pas de temps quant à son avenir. Pensant devenir acteur, il se lance dans le rap à 11 ans. Il crée avec trois de ses collègues le collectif Pro Era, pro étant le diminutif de « progressive ». En 2010, l’adolescent prodige est repéré par le label Cinematic Music Group, grâce à un de ses freestyles posté sur YouTube. S’en suit la signature de Pro Era par le même label avec une première mixtape The Secc$ Tape, en mai 2012. Ses influences sont peut-être dues à son succès. Nas, Mos Def, Guru ou Q-Tip mettent New York à genoux, et Joey aussi, qui phrase ces vieux briscards-là quand il lâche ses galettes. En juin 2012, sa mixtape 1999 débarque. Devant l’énorme succès critique de cette dernière, Joey Badass revient en septembre pour Rejex. C’est avec Pro Era qu’il sort en décembre The aPROcalypse, tandis que des rumeurs l’envoient sur Roc Nation, le label de Jay-Z. En 2013, il apparaît sur le premier album d’A$AP Rocky dans 1 train, aux côtés de 2chainz et Action Bronson notamment. Le précoce a encore du chemin à faire mais s’impose déjà comme la relève du rap US.
19 piges et gros morceau aussi
19 ans, originaire de Crown Heights à Brooklyn, un style de rap et une esthétique très années 90…Les comparaisons avec Joey Bada$$, le jeune prodige, sont inévitables. Mais Dillon Cooper, de son vrai nom, a beaucoup plus à offrir. Présenté comme la relève de la Big Apple, il aime le rap bien sûr mais ce n’est pas son unique influence. L’ado aime par-dessus tout la musique. Dillon Cooper est un fan invétéré du guitariste John Mayer et du légendaire Jimi Hendrix. Cooper Dillon, pour convaincre, n’a pas besoin de trop en faire. Sur Survival Of The Fittest, un classique de Mobb Deep, il prouve qu’il a sans aucun doute sa place dans la new school. De toute manière, en tant qu’étudiant à la prestigieuse Berklee College Of Music, on ne se fait pas de souci pour Dillon !
Après des années d’abrutissement, les États-Unis semblent avoir trouvé la relève aux vieux parrains du rap jeu, reconvertis pour leur part dans la production ou persistant dans la profession en vain. Certains ne font aucun doute comme Drake, A$AP Rocky ou encore OFWGKTA, et s’imposent comme le courant principal de la relève. Puis il y a d’autres talents comme Action Bronson, Joey Badass moins sur le devant de la scène mais bourrés de talent. Cette relève a de la gueule, putain. À quand notre tour ? Les Amerloques entament la relève et nous l’abrutissement. Quand est-ce qu’on va rattraper notre train de retard ? Pas demain la veille si les bouffons du moment ne laissent pas la place aux talents underground en devenir.
* ou MC (Maître de cérémonie) un équivalent de rappeur. Au début des années 80, c’était simplement la personne qui animait les soirées hip-hop constituées de danseurs et DJ. Dorénavant, c’est celui qui pose ses textes sur une instrumentale.