Le parlementaire européen, Yannick Jadot, déclare que suite à la loi sur la sécurité publique de 2017, il y a eu une augmentation de cinq fois le nombre de morts successives à un tir des forces de l’ordre sur des automobiles en déplacement.
Le lendemain d’une troisième nuit de protestations éclatées aux quatre coins de l’Hexagone suite au décès de Nahel, 17 ans, abattu par un agent de police lors d’un contrôle routier, plusieurs personnalités politiques mettent en avant le sujet des tirs mortels effectués par la police à la suite d’un refus d’obtempérer, en particulier depuis l’instauration de la loi de « sécurité publique » de 2017. Cette législation facilite l’emploi des armes à feu pour les forces de l’ordre. D’après Yannnik Jadot, député européen, invité sur 42mag.fr le jeudi 29 juin, cette loi a entrainé une multiplication significative de ces tirs mortels. « Depuis l’instauration de cette loi, selon des travaux de recherche, le nombre de ces tirs mortels sur des individus à bord de voitures a été multiplié par cinq », déclare-t-il.
En réalité, aucune statistique officielle n’est disponible à ce sujet. Il existe bel et bien un rapport de l’IGPN paru en 2021 qui répertorie les tirs exercés par la police sur des véhicules en déplacement, soit après un refus d’obtempérer. Cependant, ce rapport ne différencie pas les tirs mortels des tirs non mortels. 42mag.fr a donc demandé au ministère de l’Intérieur de fournir ces données, qui nous a informé que ces statistiques étaient « en cours de compilation ».
Une recherche à interpréter avec discernement
Le chiffre mis en avant par Yannick Jadot provient d’une recherche publiée l’année passée dans la revue de sciences humaines Esprit, réalisée par trois chercheurs affiliés au CNRS, à l’université de Lille et à l’université de Grenoble. Les chercheurs ont étudié le nombre de morts provoqués par des tirs de policiers sur des véhicules en déplacement entre septembre 2011 et février 2017, moment où la loi a été mise en place, puis entre mars 2017 et aout 2022. Ils ont découvert qu’avant la modification de la législation, le nombre de morts du aux tirs de la police sur des véhicules en mouvement était de 0,06 par mois en moyenne et qu’il est passé à 0,32 après l’adoption du texte législatif. Il s’agit donc bien d’une multiplication par cinq, comme l’a affirmé Yannick Jadot.
Cependant, il faut examiner cette recherche avec un certain degré de scepticisme. En effet, les chercheurs ont utilisé, entre autres, une base de données réalisée par le média online Basta qui a recensé le nombre de décès suite à une intervention des forces de l’ordre sur une période allant de 1977 à 2022. Or, Basta n’est pas une source officielle. C’est un média, résolument de gauche, et qui n’est donc pas impartial.
Malgré tout, il est possible de démontrer un impact de la loi de 2017. Le dernier rapport de l’IGPN fait clairement apparaître un pic du nombre de tirs (qu’ils soient mortels ou non) sur des véhicules en déplacement pour l’année où la loi de sécurité publique a été adoptée. Il y a eu 202 tirs contre 137 l’année précédente, en 2016. Ce chiffre décline ensuite progressivement : 170 en 2018, 153 en 2020, pour enfin revenir au niveau d’avant la loi, avec 138 tirs recensés en 2022.