Afin de maintenir sa position au pouvoir, le chef du gouvernement espagnol conclut une alliance politique avec les séparatistes de Catalogne et consent à discuter d’une loi d’amnistie pour ces derniers. Les opposants de droite expriment leur colère avec véhémence.
Second soir de manifestations en Espagne contre un pacte politique
Le mardi précédent, une multitude de villes espagnoles a été témoin d’une seconde vague de manifestations. Ces dernières contestent le projet d’accord entre le Premier ministre actuel, Pedro Sanchez, et les partis indépendantistes de Catalogne. À l’appel des groupes d’extrême droite, environ 7 000 individus se sont réunis aux abords de la résidence du Parti socialiste à Madrid. La Garde a été contrainte de mettre en place des barricades autour du parlement.
Un pari dangereux pour Sanchez
Pedro Sanchez est en train de jouer un jeu délicat. Depuis les législatives de juillet dernier, il est dans l’obligation de composer avec divers petits partis espagnols pour maintenir une majorité et rester à la tête du gouvernement. Cet équilibre politique précaire est une réalité bien connue en Espagne. Traditionnellement, la balance entre gauche et droite est si instable que les petits partis, particulièrement ceux enracinés en Catalogne, finissent par dicter les conditions du gouvernement en échange de leur soutien.
Sanchez envisage de concéder un privilège important aux indépendantistes catalans. Selon les partis d’opposition, le Parti populaire de droite et surtout l’extrême droite de Vox, cette concession est intolérable. Il s’agit d’une loi d’amnistie s’appliquant à tous les actes liés à la tentative d’indépendance catalane qui a eu lieu six ans auparavant. En octobre 2017 après un référendum sur l’autodétermination, jugé illégal par le Tribunal constitutionnel espagnol, Carles Puigdemont, alors président du gouvernement catalan, avait proclamé l’indépendance de la région. La Catalogne avait été mise sous tutelle par Madrid. Tous les dirigeants impliqués ont par la suite été poursuivis en justice et condamnés pour « rébellion, sédition, détournement de fonds publics et désobéissance à l’autorité ». Finalement, le gouvernement de Pedro Sanchez a décidé de les gracier en juin 2022.
Une loi d’amnistie à forte coloration politique
Cette loi d’amnistie, qui est l’enjeu central des discussions entre Pedro Sanchez et les partis catalans, ne vise en réalité qu’une seule personne: Carles Puigdemont. Il est actuellement en exil à Bruxelles où il s’est réfugié en 2017. Bien que personne n’a une connaissance exacte du contenu de la proposition de loi en cours de discussion, l’opposition est convaincue qu’elle pourrait permettre à Puigdemont un retour victorieux à Barcelone, ce que beaucoup d’Espagnols ne voient pas d’un bon œil. Néanmoins, c’est bien Puigdemont qui, bien qu’indirectement, négocie avec Sanchez. Les sept députés de Junts, le parti indépendantiste catalan dont il est issu, le consultent régulièrement. Pour Carlos Puigdemont, c’est l’occasion rêvée de faire son retour sur la scène politique espagnole. Pour Pedro Sanchez, c’est la seule voie pour garder le pouvoir. Il a jusqu’au 27 novembre pour éviter de nouvelles élections, qui pourraient ouvrir la voie à une coalition entre la droite et l’extrême droite.