L’organisation non-gouvernementale de protection des consommateurs exprime sa colère car le Sénat est censé superviser l’accord de commerce sans restriction entre l’Union Européenne et le Canada. Cependant, des alliés politiques de la majorité ont introduit une demande de retrait par peur que cet accord ne soit finalement pas approuvé.
Karine Jacquemart, qui dirige l’organisation Foodwatch en France, a fermement critiqué le processus par lequel le Sénat doit examiner l’accord de libre-échange entre le Canada et l’Union Européenne (connu sous le nom de Ceta), lors d’une interview diffusée sur France Inter le jeudi 21 mars. Elle a qualifié ce processus de « véritable vol antidémocratique ». Le vote du Sénat survient cinq ans après que l’accord ait été adopté par l’Assemblée nationale en 2019, suite à l’inscription de ce texte par les sénateurs communistes dans leur agenda parlementaire, à l’approche des élections européennes.
Le vote au Sénat a transformé la ratification du Ceta en un véritable casse-tête pour la majorité. D’après Jacquemart, le gouvernement a précipité la procédure lors de son adoption initiale en juillet 2019, ce qui a empêché un débat démocratique adéquat. Elle est convaincue qu’un processus plus démocratique aurait permis de remettre en question la pertinence de l’accord.
En dépit du refus de 10 pays dont la France, « 90% du texte » du Ceta est appliqué provisoirement
Jacquemart affirme qu’un retournement de situation a eu lieu cinq ans plus tard, avec des alliés du gouvernement au sein du Sénat cherchant à repousser le vote en raison de doutes sur son acceptation par la majorité.
Karine Jacquemart, à France Inter, avait expliqué : « Face à la peur de voir leur proposition refusée par la plupart des sénateurs, ils proposent une motion expresse pour repousser le vote en commission ».
Jacquemart dénonce cette manœuvre qui, selon elle, est une façon de contourner le processus lorsque le résultat ne leur convient pas. Elle souligne également que, bien que la France soit l’un des 10 pays de l’UE à ne pas avoir ratifié l’accord, 90% de son contenu est déjà mis en œuvre depuis 2017.
Elle met en lumière les écarts considérables entre les normes de production alimentaire et d’élevage au Canada et en Europe. Par exemple, le Canada autorise toujours l’utilisation de plus de 40 pesticides et l’alimentation du bétail avec certains types de farines animales. De plus, le bétail canadien peut recevoir des antibiotiques pour stimuler sa croissance. Selon Jacquemart, le Canada utilise l’accord pour contester les normes de protection sociale et environnementale de l’UE.
La directrice de Foodwatch critique un système qui favorise certains acteurs au détriment des autres, tels que les gros exportateurs de fromages et de vins. Elle précise que si le Ceta est signé, un quota de 65 000 tonnes de bœuf serait autorisé toutes les fois que le Canada décide de l’exporter.