Ce centre spécialisé, situé sous la tutelle du tribunal de Nanterre, a été source de grands espoirs. Lors d’une inspection des locaux de cette institution, deux ans après sa création, le ministre de la Justice a confirmé qu’un renforcement des effectifs était envisagé avec le recrutement imminent de deux nouveaux juges, afin de répondre aux besoins croissants en termes de ressources.
« L’objectif, c’est une montée en puissance progressive. »
Deux années après la création du pôle national des crimes sériels ou non élucidés, plus communément appelé pôle cold cases, le Ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, a annoncé jeudi 7 mars l’octroi de moyens supplémentaires pour cette juridiction, qu’il considère comme « l’honneur de la justice ». Il prévoit la création d’un poste de juge d’instruction « à l’horizon 2025 » ainsi que l’arrivée prochaine d’un attaché de justice et d’un nouveau magistrat.
Attaché au tribunal judiciaire de Nanterre, ce pôle cold cases, unique en son genre au niveau mondial, a vu le jour sous l’impulsion d’Eric Dupond-Moretti, le 1er mars 2022, en vertu de la loi pour la confiance dans l’institution judiciaire. Cette création était attendue depuis longtemps par les familles de victimes et leurs avocats, en quête de réponses concernant les circonstances entourant la mort ou la disparition de leurs proches.
Au cours des deux dernières années, le parquet de Nanterre, disposant de trois magistrats dédiés au pôle cold cases, a examiné ou examine actuellement 400 dossiers. La décision finale concernant l’acceptation ou le rejet d’un dossier revient au président du tribunal judiciaire de Nanterre. Le procureur, Pascal Prache, tient toutefois à souligner que le pôle n’a pas pour vocation d’accepter tous les dossiers. Une sélection rigoureuse est opérée afin de ne retenir que ceux dans lesquels le pôle peut apporter une plus-value.
Sur les 105 procédures actuellement en cours, 77 concernent des affaires de crimes sériels ou non élucidés, et dix parcours criminels visant à retracer le cheminement d’un tueur en série présumé. Ces dossiers font l’objet d’informations judiciaires menées par les trois juges d’instruction du pôle, sous la coordination de Sabine Kheris. Le procureur de Nanterre souligne que 84% des procédures du pôle sont actuellement à l’instruction. En parallèle, 17 dossiers d’affaires non élucidées et un parcours criminel sont en phase d’enquête préliminaire du côté du parquet.
Depuis sa création, le pôle a déjà permis l’inculpation de trois personnes, notamment Dominique P. et Philippe C. La dernière mise en examen remonte au 20 janvier, quinze ans après la découverte du corps de Caroline Marcel, tuée lors d’un jogging sur les bords du Loiret. Un suspect a été arrêté grâce à des empreintes ADN. Ce cas démontre que les avancées technologiques permettent effectivement la résolution d’affaires cold cases.
Un autre moment clé a été atteint avec le premier procès abouti au sein du pôle, mettant en cause Monique Olivier, ex-épouse du tueur en série Michel Fourniret, pour des crimes datant de plusieurs décennies. Elle a été condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité pour complicité des enlèvements et meurtres de Marie-Angèle Domèce, Joanna Parrish et Estelle Mouzin.
Bien que le père d’Estelle Mouzin, disparue en 2003, se félicite de l’existence du pôle, il exprime des interrogations quant à ses ambitions et ses moyens. Dans une démarche engagée bien avant la création du pôle, il plaide pour la spécialisation des juges dans les affaires de disparitions d’enfants. L’avocat Didier Seban partage ces attentes et espère que le pôle pourra répondre aux espoirs des familles en apportant des solutions concrètes.
Le manque de moyens humains et matériels représente un point sensible. Eric Dupond-Moretti a annoncé l’arrivée d’un quatrième juge d’instruction, mais selon certains acteurs du pôle, deux magistrats supplémentaires seraient nécessaires pour faire avancer les enquêtes. Des avocats spécialisés dans les cold cases réclament aussi davantage de moyens matériels, comme une meilleure infrastructure de travail.
Les familles concernées s’impatientent des délais de traitement des dossiers et regrettent le manque de justifications en cas de refus. Malgré ces difficultés logistiques, le procureur de la République de Nanterre insiste sur la volonté de laisser aux magistrates instructrices le temps nécessaire pour mener des enquêtes approfondies.
En résumé, le pôle cold cases représente une avancée significative dans la lutte contre l’impunité des crimes non résolus. Cependant, des efforts supplémentaires sont nécessaires pour renforcer ses moyens et garantir son efficacité, afin de répondre aux attentes des familles de victimes et de résoudre un plus grand nombre d’affaires.