Le metteur en scène use des principes des films de gangsters pour décrier la violence sociale. « Hopeless », une œuvre de cinéma astucieuse et provocatrice.
Des scènes d’une brutalité implacable sont capturées de manière percutante dans le film sud-coréen Désespérément, en projection sur les écrans français à partir du 17 avril. L’intensité des situations de violence physique et psychologique présentées dans certaines parties du film est exceptionnellement effrayante.
Ce point de vue est audacieusement adopté par Kim Chang-hoon, le metteur en scène et auteur de l’œuvre. Il ne tente pas d’atténuer la dureté des relations sociales qui caractérisent une partie de la société de sa patrie. Le réalisateur oblige les spectateurs à confronter la souffrance, ceux qui y résistent et ceux qui en tirent profit. Au milieu de cette obscurité abjecte, cependant, il y a une lueur d’endurance.
« Je suis en cours de transformation »
Le film débute par une scène troublante dans laquelle un lycéen, Yeon-gyu, interprété avec brio par Xa-bin Hong, agresse un de ses pairs en lui assénant un coup de pierre au visage. Yeon-gyu est en pleine effervescence intérieure. Son impuissance le dévore. Il se prend à rêver d’un pays où ‘l’équité règne’, les Pays-Bas. Ayant peu de moyens, sa famille vit modestement. Son beau-père alcoolique dont les affaires sont en déclin, espère changer et s’améliorer, tout en le maltraitant quotidiennement. Yeon-gyu, ne voyant plus de lueur d’espoir, se laisse attirer par un gang, séduit par son leader charismatique et énigmatique, Chi-geon, incarné par Song Joong-ki, qui renonça à son salaire pour que le film puisse être réalisé.
« Appelle-moi frère, pas chef », suggère le chef du gang au lycéen en quête d’une figure paternelle ou fraternelle. L’introduction du jeune homme dans le monde mafieux se transforme en un véritable enfer. En tentant de s’éloigner de la violence familiale, il se retrouve piégé par une autre forme de violence. « Le pays où règne l’égalité n’existe pas », lui rappelle son nouveau défenseur. Et Yeon-gyu apprend, malgré lui, le véritable coût de cette protection.
Désespérément ne se limite pas à une simple représentation du monde du crime. Il s’agit plutôt d’un film noir social, au ton profondément sombre. Pour son premier long-métrage, Kim Chang-hoon réussit un véritable tour de force. Il bouleverse son public. Il envisage l’inégalité comme un mécanisme inarrêtable qui bénéficie uniquement aux plus forts, soutenus par un pouvoir politique faible et malléable.
Désespérément, porté par deux interprétations remarquables, présente un tableau brutal de la société. Il a été sélectionné dans la catégorie Un Certain Regard au Festival de Cannes 2023 et au Reims Polar en avril 2024. Désespérément n’hésite pas à s’appuyer sur les codes classiques des films de mafia pour aller encore plus loin.
Les détails
Catégorie : Policier, Drame
Réalisation : Kim Chang-hoon
Interprétation : Hong Xa-bin, Song Joong-ki, Kim Hyoung-seo
Origine : Corée
Durée : 2h04
Sortie : 17 avril 2024
Distributeur : Bac Films
Résumé : Un jeune homme tente de fuir sa vie misérable et sans perspective, mais se retrouve emporté dans une spirale de violence. Il se retrouve au centre d’une organisation criminelle dirigée par un leader charismatique.