Un fonds spécial pour la prévention des risques naturels majeurs – appelé « fonds Barnier » du nom du nouveau Premier ministre – est au cœur d’un débat entre le gouvernement français et les compagnies d’assurance, divisés sur son financement.
Également connu sous son acronyme français FPRNM, le fonds est considéré comme l’épine dorsale de la politique française de prévention des catastrophes naturelles, selon le dernier rapport du CCR sur le sujet.
Ce fonds permet aux collectivités locales, aux petites entreprises et aux particuliers de financer des travaux visant à réduire la vulnérabilité des bâtiments exposés aux catastrophes naturelles.
Initialement destiné à financer les indemnisations versées aux propriétaires de biens expropriés à la suite de catastrophes naturelles graves, le champ d’action du fonds s’est considérablement élargi depuis sa création en 1995.
Le CCR indique qu’entre 2009 et 2020, le « fonds Barnier » a financé environ 700 opérations préventives pour un montant annuel moyen de plus de 170 millions d’euros – soit plus de 2 milliards d’euros sur la dernière décennie.
Plus de la moitié d’entre eux seraient liés à la construction ou au renforcement d’ouvrages hydrauliques de protection contre les inondations, tels que des digues et des ouvrages de contrôle des eaux.
D’autres fonds européens contribuent à la prévention des risques naturels – comme le Fonds européen de développement régional – permettant de presque doubler chaque année le montant moyen des caisses d’urgence.
Contributions de l’État
Toutefois, depuis 2021, le FPRNM est inscrit au budget de l’État français, son montant est donc convenu et voté par le Parlement.
Jusqu’en 2020, le fonds était financé par une taxe sur la « surtaxe » catastrophe naturelle – une contribution supplémentaire prélevée notamment sur les contrats d’assurance multirisque habitation au profit de la CCR et sa contribution lorsque une catastrophe naturelle est déclarée par l’État.
Ce mécanisme de taxation « surtaxe » aurait permis au fonds d’être bien meilleur l’année prochaine, puisque la taxe sur les catastrophes naturelles passera de 12% à 20% à partir du 1er janvier 2025.
L’année dernière, le CCR avait appelé le gouvernement français à augmenter progressivement les moyens dédiés à la prévention « compte tenu de l’augmentation prévisible du coût des sinistres à l’horizon 2050 ».
Taxe controversée
Dimanche, le président de France Assureurs s’est toutefois prononcé contre l’idée selon laquelle les ressources du fonds Barnier devraient rester statiques dans le budget 2025, même si le produit de la taxe augmenterait automatiquement.
« Arrêtez le hold-up sur le fonds Barnier… c’est intolérable ! » Florence Lustman a déclaré à France Info.
La prévention est l’un des piliers du secteur de l’assurance en France, qui y voit un moyen efficace de limiter les sinistres.
Par exemple, la commission des Finances du Sénat estime qu’il y aura d’ici 2023 un écart de 73 millions d’euros entre le montant du fonds Barnier et le produit des prélèvements sur la garantie catastrophes naturelles.
Selon Lustman, le fonds devrait atteindre « environ 450 millions d’euros d’ici 2025… et aujourd’hui nous n’en trouvons que la moitié ».
Dans une interview à l’hebdomadaire français Journal du DimancheBarnier s’est dit convaincu que le fonds qui porte son nom pourrait être « mobilisé » pour financer le plan national d’adaptation au changement climatique, prévu fin octobre et présenté comme prioritaire.
Ce n’est pas la première fois que le fonds Barnier se retrouve au centre de polémiques.
En mars 2017, la Cour des comptes française a critiqué la gestion du fonds, citant une comptabilité « inutilement complexe », des dépenses mal évaluées et des cas d’indemnisations indues.
Selon la Cour, le fonds a fini par financer des dépenses ordinaires de l’État, telles que des études ou des subventions aux collectivités locales, augmentant ainsi ses propres coûts.