Les brasseurs ont du mal à accepter les propositions visant à augmenter les taxes sur les boissons alcoolisées et sucrées dans le cadre du dernier budget français, actuellement débattu au Parlement. Alors que les partisans affirment que ces mesures permettraient de lever des fonds indispensables au système de santé français, les fabricants de bière préviennent qu’elles pourraient finir par pénaliser les brasseries indépendantes qui ont déjà du mal à survivre.
Sous la pression de réduire le gigantesque déficit de la France, le nouveau gouvernement cherche des moyens d’économiser des milliards d’euros sur la sécurité sociale – et l’augmentation des taxes sur les aliments et boissons potentiellement malsains semble faire partie du plan.
Les députés ont proposé des amendements au projet de loi de financement qui cibleraient l’alcool et le sucre transformé, et plus particulièrement les bières sucrées à haute concentration.
La proposition la plus ambitieuse consisterait à étendre la « cotisation de sécurité sociale » prélevée sur certains produits et affectée au financement de l’assurance maladie nationale. Actuellement appliquée uniquement aux boissons ayant une teneur en alcool de 18 pour cent ou plus, la taxe révisée serait perçue sur tous les alcools, y compris le vin et la bière.
Un autre amendement prévoit l’introduction d’un nouveau droit sur les bières à un taux supérieur à 5,5 pour cent, tandis qu’une autre proposition vise à taxer les bières aromatisées et sucrées contenant l’équivalent d’au moins 20 grammes de sucre par litre.
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Contrecoup de brassage
La commission des affaires sociales du Parlement a déjà approuvé les propositions, dont les députés débattent actuellement avant le vote du projet de loi budgétaire la semaine prochaine.
Les partisans soutiennent qu’ils contribueraient à prévenir la consommation excessive d’alcool – en particulier chez les jeunes attirés par les boissons sucrées et fortes – et à financer le système de santé qui traite les retombées.
La ministre de la Santé, Geneviève Darrieussecq, a exprimé son soutien à une taxe sur le sucre, déclarant La Tribune que les industriels ont « une responsabilité collective, et j’aimerais les voir trouver des solutions pour faire évoluer leurs recettes ».
Elle a toutefois souligné qu’« il ne s’agit pas de pénaliser les artisans ».
L’industrie brassicole n’est pas d’accord, les syndicats avertissant que des taxes supplémentaires pourraient faire augmenter les coûts et mettre des centaines d’entreprises à la faillite.
Jérôme Gervais, qui dirige la microbrasserie Brewbaix à Roubaix, dans le nord du pays, estime que les prélèvements supplémentaires ajouteraient 70 centimes au prix de détail de sa bière blonde en bouteille, le portant à 6 euros les 75 cl.
S’adressant à BFMTV, il s’interroge : « Les consommateurs seront-ils prêts à payer autant pour déguster leur bière ? »
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Manifestations de l’industrie
Une taxe sur les bières plus fortes « protégerait et favoriserait les bières industrielles » au détriment des bières artisanales, qui ont tendance à contenir plus d’alcool, a déclaré Jean-François Drouin, président du Syndicat national des brasseries indépendantes (SNBI).
L’association industrielle des Brasseurs de France a fait valoir que la combinaison de nouvelles taxes « compromettrait définitivement la viabilité économique des brasseries » dans tout le pays.
Dans une industrie qui peine déjà à absorber la hausse des prix de l’énergie et des coûts des matières premières, une brasserie ferme ses portes en moyenne chaque semaine, a déclaré le groupe, et l’ajout d’une taxe « amplifierait ce phénomène ».
Si la chambre basse du Parlement approuve les propositions, elles seront ensuite examinées par le Sénat. Certains brasseurs ont déclaré à la presse qu’ils exhortaient leurs députés locaux à voter contre ces mesures, mettant en garde contre l’impact sur les emplois locaux.
Les fabricants de boissons énergisantes non alcoolisées, de chocolat, de glaces et d’autres produits qui risquent d’être affectés par de nouvelles taxes sur le sucre transformé ont également protesté, tandis que la ministre de l’Agriculture Annie Genevard a mis en garde contre l’imposition de charges supplémentaires aux entreprises françaises concurrentes sur les marchés mondiaux.