Le 2015 Charlie Hebdo Les attentats terroristes ont fait la Une de tous les grands journaux français mardi, alors que le pays marquait le dixième anniversaire des événements tragiques au cours desquels 17 personnes ont été tuées. Partagés entre rendre hommage aux victimes et réfléchir à la façon dont la France a changé, tous s’accordent sur le fait que le droit à la liberté d’expression est un droit que la société doit continuer à défendre.
Charlie Hebdo
Le journal satirique français Charlie Hebdo a dévoilé une édition spéciale pour marquer les 10 ans de l’attaque de ses bureaux par des hommes armés islamistes.
La première page présente un dessin célébrant l’existence du journal athée avec la légende « Indestructible! », tandis que quatre pages intérieures montrent les résultats d’un concours de caricatures visant à se moquer de Dieu et des dirigeants religieux.
« La satire a une vertu qui nous a permis de traverser ces années tragiques : l’optimisme », écrit dans un éditorial le réalisateur Riss, rescapé du massacre du 7 janvier 2015 qui a fait 12 morts, dont huit rédacteurs.
« Si vous voulez rire, cela signifie que vous voulez vivre. Le rire, l’ironie et les caricatures sont des manifestations d’optimisme. Quoi qu’il arrive, dramatique ou heureux, l’envie de rire ne cessera jamais. »
Charlie Hebdo vante son « indestructibilité » 10 ans après le massacre
Le Monde
Quotidien conservateur Le Monde avait pour titre « Charlie Hebdo, Hypercacher, 10 ans après » accompagné d’un dessin animé de 2015 du Mexique Boligan pour le collectif Cartooning for Peace.
Il représente Marianne – symbole de la Liberté – en référence au tableau d’Eugène Delacroix de 1830. Elle est représentée ici comme une jeune femme, la poitrine partiellement exposée, agitant un drapeau français éclaboussé de sang. Dans son autre main, elle tient une copie de Charlie Hebdo.
« La France, toujours sous le choc », lit-on dans l’éditorial, qui compare ensuite les attentats de Paris et de Montrouge aux attentats du 11 septembre aux États-Unis en ce qui concerne la manière dont ils ont remodelé une nation.
Au lieu de cibler un symbole financier tel que le World Trade Center, l’éditeur suggère que ce sont la liberté d’expression et le droit de la communauté juive de pratiquer sa foi en paix qui ont été critiqués en France.
L’anniversaire des événements rappelle la fragilité de ces droits au sein de la démocratie française, et que la société doit rester vigilante pour les protéger, peut-on lire.
Les journalistes ont également rassemblé des archives sous le titre « Cher Charlie » – exemples des milliers de lettres et de dessins envoyés par le public au Charlie Hebdo équipe après les attentats.
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La Croix
La Une du quotidien catholique La Croix On y lit « Charlie Hebdo, 10 ans » et présente une image de dessin animé représentant un crayon droit et une gomme percée d’un trou de balle. Les ombres créées par le crayon sur des feuilles de papier vierges forment le chiffre 10.
Dans son éditorial « Je suis la République », Fabienne Lemahieu souligne que tous les aspects de la vie française ont été touchés par les attentats du 7 janvier, que l’on se reconnaisse ou non dans l’esprit satirique des attentats du 7 janvier. Charlie Hebdo ou non.
Elle souligne l’importance de se souvenir de toutes les victimes, avant de les énumérer.
Lemahieu souligne également le travail considérable réalisé par la justice française pour traiter les actes criminels eux-mêmes et la nécessité de faire confiance aux valeurs républicaines.
L’Humanité
« C’était Charlie », titre le quotidien communiste L’Humanité avec une illustration des caricaturistes tués dans les attentats de Charlie Hebdo sur fond jaune pâle. Ils sourient, dessinent et vivent leur journée comme d’habitude.
Inside le journal rend hommage aux membres de l’équipe tués le 7 janvier ainsi qu’à ceux qui ont survécu et à la façon dont ils se débrouillent au quotidien.
Le rédacteur en chef Fabien Gay écrit que partout en France, les journalistes sont « toujours debout » (« Toujours debout»).
« L’esprit Charlie est celui de l’art irrévérencieux, à nous de le porter », dit-il en saluant ceux qui ont eu le courage de réaliser des œuvres subversives, destinées à provoquer le débat.
Concernant la presse, il déplore qu’en dix ans le débat public ait diminué et que les discours de haine et les vérités « alternatives » abondent désormais grâce aux algorithmes sur les réseaux sociaux.
Pour Gay, le 7 janvier a marqué une attaque flagrante contre les valeurs laïques de la France et le droit de pratiquer pacifiquement sa religion. Plus que jamais, dit-il, la nation doit rester unie et éviter d’établir des liens entre les terroristes islamistes et les musulmans ordinaires.
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Le Figaro
Le quotidien conservateur Le Figaro » titre « Dix ans après, la France est toujours sous la menace islamiste ». A côté se trouve une photo de la fresque sur le mur de l’ancien Charlie Hebdo bureau à Paris, mettant en scène les visages des caricaturistes décédés.
Dans son éditorial intitulé « Liberté, douce liberté » (Liberté, liberté chérie), Vincent Trémollet de Villers commence par énumérer les noms de ceux qui sont morts au cours de ces trois jours de tuerie.
Il fait référence au slogan qui surgit presque immédiatement, accompagné d’un élan de solidarité envers les victimes, avec le mot « »Je suis Charlie, je suis juif, je suis flic» traduit par « Je suis Charlie, je suis juif, je suis policier ».
Cependant, Trémollet de Villers critique le fait qu’une manifestation spontanée de solidarité nationale ait été « récupérée » et transformée par des groupes de gauche comme France Insoumise, et ce qu’il appelle le « mouvement islamo-gauchiste ».
Il poursuit en affirmant que dix ans plus tard, la France est toujours menacée par les attentats terroristes islamistes, tant sur le plan physique que psychologique. Il impute cela aux politiques d’immigration débridées et à l’explosion de la « liberté d’expression » sur Internet, qui permet aux discours de haine de prospérer, alors que les médias traditionnels ont été affaiblis dans leur quête « d’inclusion et de diversité ».
Pour lui, les artistes et les écrivains resteront les « phares » dans l’obscurité ambiante des temps modernes.
Libération
Le quotidien de gauche Libération a publié une édition spéciale comportant le texte « 7 janvier, 10 ans après, édition spéciale » imprimé sur fond rouge vif.
L’illustration est de Coco, l’une des Charlie Hebdo caricaturistes ayant survécu aux attentats de 2015. La légende «Liberté, liberté Charlie» (« Liberté, liberté Charlie ») est porté par une silhouette sortant d’un turban porté par un mollah islamique.
Un morceau du turban explosif a transpercé l’œil d’un personnage représentant Jésus, avec une couronne d’épines et un trou de crucifixion au poignet.
Dans son éditorial, Paul Quinio encourage les lecteurs à prendre une minute pour se souvenir des morts et de ce qu’ils représentaient, sans passer du temps à se concentrer sur les tueurs et leurs « idéologies de la mort ». Il insiste pour ne pas laisser « notre humanité être volée par ceux qui souhaitent répandre la haine ». Les terroristes n’ont pas gagné, dit-il, mais le « oui, mais » se développe, tout comme l’autocensure.
Pour lui, il est primordial de protéger le droit à la liberté d’expression, toujours menacé.
Le Parisien
« Dix ans après « Charlie », la menace terroriste n’a jamais été aussi présente », titre le journal Le Parisien tous les jours.
On y retrouve une photo du ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau qui a accordé une interview exclusive sur le nombre d’attentats terroristes déjoués au cours de l’année écoulée.
L’éditorial de Marie-Christine Tabet « La fin de l’insouciance » revient sur comment la « bataille culturelle » en France a réellement commencé en 2012 avec les attentats de Mohamed Merah. Il a fallu attendre 2015 et la succession d’attentats terroristes pour que la France comprenne qu’elle se trouvait en plein « terrorisme aveugle » et dans un climat de peur quotidienne, avec des rappels réguliers de Strasbourg à la Nouvelle-Orléans.
Cependant, se référant à l’entretien avec le ministre de l’Intérieur, elle conclut que malgré les menaces, la France a appris à y faire face et est donc mieux équipée.