François Asselin, président de la Confédération des petites et moyennes entreprises, se questionne ce lundi : « Demain, si on décidait de mettre en pause ou même d’annuler cette réforme, de quelle manière pourrions-nous rassembler les milliards qui nous sont si indispensables ? »
« Je ne suis pas favorable à la suspension de cette réforme pendant ces discussions », affirme François Asselin, président de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), ce lundi 13 janvier, au sujet de la réforme des retraites. Cette déclaration intervient à la veille de la déclaration très attendue du Premier ministre François Bayrou concernant la politique générale.
42mag.fr : Pensez-vous que François Bayrou annoncera une pause dans la réforme des retraites ?
François Asselin : François Bayrou est un homme de lettres, il devra donc expliquer la manière de suspendre la réforme sans réellement la suspendre. Ceux qui demandent l’arrêt ou même l’annulation de cette réforme mélangent les intérêts politiques et l’intérêt national, ce qui est clairement différent. La réalité est que cette réforme, dès 2030, sera déséquilibrée en raison de notre système de répartition. Avec le vieillissement de la population et moins de cotisants par rapport aux retraités, ce système de répartition est en péril. Annuler cette réforme reviendrait à ignorer le besoin criant de ressources financières.
« Ceux qui veulent l’abrogation de cette réforme doivent expliquer aux Français le niveau de pension qui les attend demain si on retourne à un départ à la retraite à 62 ans. »
François Asselinsur 42mag.fr
En ce qui concerne les retraites, trois facteurs sont essentiels : les cotisations, qui sont déjà parmi les plus élevées d’Europe ; la durée de cotisation, sinon quand pourrais-je partir en retraite ; et enfin, le montant des pensions.
Mais après votre réunion à Matignon la semaine dernière, Marylise Léon, cheffe de la CFDT, a déclaré que le Premier ministre n’avait « aucun tabou ».
Effectivement, le Premier ministre est sans tabou.
Et vous savez que ce serait une concession importante, attendue par la gauche pour éviter un rejet.
Peut-être que la meilleure solution serait de demander aux partenaires sociaux de se saisir de la question des retraites, et au bout de quelques mois, évaluer s’il est possible de proposer un régime qui satisfait davantage de personnes. Toutefois, il ne faut pas oublier la nécessité de préserver les finances publiques.
Si l’on vous propose de discuter et que l’âge légal de la retraite à 64 ans est mis en suspens, pour trouver une autre manière de financer le régime par répartition, cela vous dérangerait-il ?
Il serait extrêmement difficile de trouver une autre méthode de financement. Cette complexité réside dans la nécessité de ne pas nuire aux finances de l’État et des citoyens, tout en gardant un coût du travail mesuré. Nous faisons face à une équation complexe.
Mais êtes-vous d’accord ?
Oui, je pense qu’il y a un point qui n’a pas été abordé : la responsabilité des partenaires sociaux concernant les carrières touchées par la pénibilité.
« Il me semble juste que quelqu’un comme moi, qui a travaillé principalement dans un bureau ou en voiture, parte à la retraite plus tard qu’un charpentier ou menuisier. »
François Asselinsur 42mag.fr
Avec les partenaires sociaux, nous pourrions progresser significativement sans revenir à des dispositifs contraignants ou lancer de nouveaux régimes spéciaux. Il y a des moyens d’avancer.
Si François Bayrou déclare : « Je renonce, je suspends la réforme, l’âge de départ à 64 ans. À vous, partenaires sociaux, de trouver un accord », seriez-vous d’accord ?
Je ne suis pas pour suspendre la réforme durant ces négociations. Si un modèle amélioré est trouvé, comme l’a suggéré le Premier ministre, prenons-le. Mais si cela échoue, la réforme actuelle devrait continuer à se mettre en œuvre. C’est ce que nous recommandons à l’exécutif.
Des organisations, dont la CPME, ont appelé à la responsabilité il y a un mois, affirmant que l’instabilité actuelle pourrait mener à une crise économique. Que voulez-vous dire ?
Nous souhaitons que le principe de subsidiarité soit appliqué. Si cela échoue, l’État doit reprendre le contrôle. Le Premier ministre souhaite que les partenaires sociaux trouvent une solution ; sinon, la réforme actuelle continuera.
Craignez-vous que suspendre la réforme ne permette pas de revenir en arrière ?
Absolument. C’est ignorer la réalité de financer un système déjà fragile pour 2030. Discussions avec les partenaires sociaux pourraient inclure l’idée d’une épargne pour tous, voire de la capitalisation collective. Nous devrions y songer pour arrêter de compromettre l’avenir financier de nos enfants et petits-enfants.
Redoutez-vous une augmentation des cotisations ?
Ce ne sont pas nous, mais les Français, nos enfants et petits-enfants qui payeront la facture.
Craignez-vous concrètement une hausse des cotisations ?
Une augmentation des cotisations réduirait le salaire net et le travail deviendrait plus coûteux en France. Cela nous laisserait à la traîne. Depuis 1983, l’âge de départ à la retraite a reculé grâce à une espérance de vie accrue de huit ans, une avancée positive !
Qu’en est-il du budget ? Êtes-vous rassuré sur l’absence de hausse fiscale pour les entreprises, comme Éric Lombard et François Bayrou semblent le promettre ?
Nous, chefs d’entreprise, sommes considérablement taxés, mais nous souhaitons juste ne pas l’être davantage. Nous attendons de la stabilité.
Pensez-vous que la fiscalité des entreprises va augmenter ?
Les grandes entreprises verront probablement leur fiscalité augmenter, mais nous espérons que les PME seront épargnées.
N’est-ce pas un moindre mal ?
En réalité, la fiscalité des acteurs économiques devrait être allégée. Toutefois, dans le contexte actuel, il faut rester pragmatique.
Vous quittez vos fonctions la semaine prochaine après dix ans à la CPME. Cette période marquée par des réformes favorables aux entreprises est-elle révolue ?
Malgré ces réformes, nous restons lourdement taxés. Au début de mon mandat, embaucher était risqué et coûteux, mais les entreprises peinent désormais à recruter. Je préfère cette situation même si elle reste complexe.
Que souhaitez-vous à votre successeur ?
Qu’il reste fidèle à ses valeurs d’entrepreneur et qu’il chérisse ceux qui sont à l’origine de la richesse du pays, tout comme je l’ai fait. C’est un honneur de servir cette cause.