Il est essentiel de donner au juge une marge de manœuvre pour qu’il puisse mettre en œuvre le droit pénal, souligne Ludovic Friat, président de l’Union syndicale des magistrats, dans une déclaration faite jeudi.
« Il n’existe pas de gouvernement des juges, les magistrats se contentent de faire respecter la loi adoptée par nos représentants parlementaires », déclare Ludovic Friat, président de l’Union syndicale des magistrats (USM), lors d’une intervention sur 42mag.fr le jeudi 14 novembre. Il s’exprime en réponse aux réactions politiques suscitées par les réquisitions du ministère public, qui a demandé des peines d’inéligibilité pour tous les accusés, dont Marine Le Pen, dans le cadre du procès lié aux assistants parlementaires du Front national, aujourd’hui connu sous le nom de Rassemblement national.
Les critiques et le devoir d’objectivité des magistrats
Alors que Jordan Bardella considère ces réquisitions comme une « atteinte à la démocratie » et que Bruno Gollnisch parle d’un procès politique, Ludovic Friat souligne que « le formuler de cette manière nourrit l’idée, chez certains, que nous vivrions sous un gouvernement des juges ». Bien qu’il admette que les juges demeurent des êtres humains avec « une certaine subjectivité », il insiste sur le fait que le système judiciaire prend en compte ces biais potentiels. « Le parquet fonctionne de manière collective ; les décisions ne sont jamais prises isolément mais discutées en équipe avec le procureur pour s’assurer de leur pertinence », précise Ludovic Friat. « De même, les juges rendent leur verdict de façon collégiale, à plusieurs, pour limiter l’influence des préjugés », poursuit-il.
La défense de la collégialité et les critiques des décisions judiciaires
Ludovic Friat exprime son « regret » face aux « critiques croissantes envers cette collégialité ». Lors de son intervention sur 42mag.fr, Bruno Gollnisch, un ancien haut responsable du RN, également menacé de cinq ans d’inéligibilité, s’est déclaré « stupéfait et indigné », affirmant que si Marine Le Pen « était empêchée de se présenter au vote populaire, cela ferait de la France une république bananière ». Ludovic Friat réagit à ces propos en notant que ce qu’il entend de Bruno Gollnisch est davantage une défense personnelle, battant ainsi son plein dans son rôle. Il réaffirme que son syndicat, l’USM, est « le syndicat principal des magistrats », un syndicat « neutre politiquement » et opposé aux peines automatiques telles que l’inéligibilité. « Il est crucial de donner aux juges une latitude d’appréciation. Ils appliquent le droit pénal et la loi Sapin 2, qui stipule qu’en cas de culpabilité, cette sanction est automatique, une loi largement adoptée par nos députés et sénateurs », conclut-il.